Sommet du G20 - Interventions de Catherine Colonna (New Delhi, 2 mars 2023)

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Intervention de Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, lors de la première session de la réunion des ministres des affaires étrangères des pays du G20 (New Delhi, 2 mars 2023)

Seul le prononcé fait foi

"Permettez-moi tout d’abord de remercier la présidence indienne et de vous féliciter, Monsieur Jaishankar, pour l’organisation de cette très importante réunion ministérielle du G20. Nous sommes à un moment crucial et la présidence de l’Inde ainsi que son rôle moteur sont absolument nécessaires. « Une Terre, une famille, un futur » est une formule qui nous guide face aux nombreux défis et ce dès à présent.

Un futur, pour les Ukrainiennes et les Ukrainiens. Nous avons déjà vu un an de guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine et contre le droit. Une guerre sans aucune justification et basée sur un tissu de mensonges, une sale guerre qui plus est, menée en violant toutes les lois de la guerre et de la simple humanité. Le G20 doit répondre clairement, comme il l’a fait au sommet de Bali et comme l’Assemblée générale des Nations unies l’y invite à une très large majorité de 141 voix contre 7, appelant à une paix juste et durable qui respecte les principes de la Charte. Ce vote l’a montré une nouvelle fois : venant de toutes les régions du monde, ces voix rejettent ses tentatives de faire primer la force sur le droit, et de mettre à mal ce faisant notre sécurité collective.

De plus, la guerre voulue et poursuivie par la Fédération de Russie a des conséquences négatives pour la quasi-totalité des pays de la planète, pour lesquels elle crée des difficultés sur l’alimentation, l’énergie, les prix.

À Bali, le message de nos chefs d’État ou de gouvernement était sans équivoque : en tant que G20, nous devons trouver les moyens de protéger les plus vulnérables au lieu de laisser la guerre entretenue par la Russie les pénaliser tous.

Sur ce sujet comme sur d’autres, notre mission collective sera de parvenir à des résultats. Cela vaut aussi face aux autres défis que sont la lutte contre le changement climatique, lequel s’aggrave, et la nécessité de trouver des solutions nouvelles de financement pour les pays qui en ont besoin. Cela requiert un sens des « responsabilités communes » et non pas une fragmentation, une opposition systématique. Chacun de nos membres doit y contribuer. Nous devons dépasser les idées fausses, comme celles d’une opposition entre le Nord et le Sud, et construire ensemble un multilatéralisme ambitieux et efficace car c’est l’intérêt commun de tous nos pays et de tous nos peuples.

C’est en ce sens que nous soutenons les institutions internationales et, en même temps, leur réforme. La gouvernance mondiale, qu’il s’agisse de l’ONU ou des institutions de Bretton Woods, doit être adaptée aux réalités et défis d’aujourd’hui. Comme vous le savez, la France plaide en ce sens de longue date et est prête à mener dès maintenant cette discussion, par exemple en soutenant l’aspiration de l’UA à participer au G20.

C’est aussi pour cette raison que le Président de la République, Emmanuel Macron, présidera à Paris les 22 et 23 juin un sommet pour sceller un nouveau pacte financier global, en pleine complémentarité avec la présidence indienne du G20 et en nous renforçant mutuellement. Notre objectif est de donner un coup d’accélérateur aux financements en faveur des pays en développement et de réviser les instruments qui leur permettront de combler leurs besoins et notamment de mener à bien leurs transitions énergétiques.

Et n’oublions jamais que nos actions seront observées de près : au sommet du SGNU sur les Objectifs de développement durable comme à la COP28, des bilans seront dressés. L’heure tourne. Nous devons faire plus et plus vite et faire prévaloir notre intérêt commun.

Je vous remercie."

Intervention de Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, lors de la deuxième session de la réunion des ministres des affaires étrangères des pays du G20 (New Delhi, 2 mars 2023)

Seul le prononcé fait foi

"Nombre de nos pays ont été frappés par la brutalité des attaques terroristes. Malgré la défaite territoriale de Daech/ISIS au Levant, grâce à nos efforts conjoints au sein de la Coalition internationale, le terrorisme djihadiste évolue et reste une menace sérieuse pesant sur notre sécurité internationale. Nous le voyons chaque jour et sur chaque continent. Notre lutte contre le terrorisme djihadiste doit donc rester une priorité. Nos victoires, acquises à un prix élevé, ne doivent pas être vaines.

Outre ces actions de terrain, nous devons renforcer nos actions de prévention et contre la mauvaise utilisation des nouvelles technologies, surtout dans les secteurs financiers et de la communication. Daech et Al-Qaïda y ont de plus en plus recours pour se financer et répandre leur propagande. Les législations et les systèmes de suivi doivent donc être adaptés en ce sens.

Nous devons aussi tenir bon dans la défense des valeurs universelles indivisibles que sont les droits de l’Homme et dans le respect du droit international. Toute action qui irait contre ces droits et libertés ferait le jeu de l’adversaire que nous combattons. C’est le sens de l’engagement du G20 d’Osaka en 2019 et de l’appel de Christchurch contre le terrorisme et l’extrémisme violent en ligne.

Parmi nos autres défis, je souhaite souligner que nous devons aussi renforcer la cyber-sécurité. Les cyberattaques augmentent de manière exponentielle et sont de plus en plus dangereuses et sophistiquées. Elles visent quotidiennement de nombreux pays ou acteurs économiques. Nous devons donc à la fois établir un cadre normatif pour garantir une attitude responsable des États dans l’espace numérique et travailler étroitement avec le secteur privé et la société civile. C’est le sens de l’appel de Paris de novembre 2018, qui rassemble États, entreprises et ONG. Nous vous encourageons à utiliser cette initiative pour renforcer la confiance et la sécurité dans ce domaine.

Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir mis l’aide humanitaire à l’ordre du jour, au moment où la guerre russe a dramatiquement aggravé la situation, en Ukraine mais aussi bien au-delà.

Et je souhaite au nom de la France présenter nos condoléances aux populations et aux familles endeuillées par le terrible séisme qui a frappé la Turquie et la Syrie. Nous avons immédiatement déployé une aide d’urgence pour secourir les personnes touchées et prodiguer des soins, et apporter une aide financière aux organisations qui travaillent directement auprès des populations.

La faim, la soif, les maladies représentent dans trop de pays une menace quotidienne mais aussi croissante. Les populations n’ont en effet jamais eu autant besoin d’aide humanitaire. Les chiffres le montrent : une personne sur 23 ne peut survivre sans cette aide ; c’est plus du double du chiffre d’il y a quatre ans. Face à cette tragique augmentation, nous devons collectivement renforcer notre aide humanitaire (c’est ce qu’a fait la France de manière significative ces dernières années) mais aussi mieux la coordonner. Nous devons tous y contribuer et rationaliser notre action.

Comme beaucoup d’entre nous, aux Nations unies, j’étais à Genève lundi et ai pu échanger avec les acteurs humanitaires. J’ai entendu leur cri d’alarme. Leur espace se réduit, ils travaillent sous une constante menace. Nous avons tous ici une responsabilité collective d’exercer notre influence politique pour qu’ils puissent travailler en sécurité et venir en aide aux populations qui en ont tant besoin.

Je vous remercie."