Nations unies - Ukraine - Intervention de Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères de la République française, au Conseil de sécurité (New-York, 29 avril 2025)
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
J’aurais voulu ne pas avoir à convoquer, avec nos partenaires européens, cette réunion du Conseil de sécurité sur l’Ukraine, mais la guerre d’agression à haute intensité menée par la Russie continue de ravager l’Ukraine, comme l’ont rappelé la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et la Sous-Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires, avec des conséquences humanitaires dramatiques en violation du droit international, en violation de la Charte des Nations unies. De notre Charte.
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Au commencement se trouve l’aspiration des Ukrainiennes et des Ukrainiens à la liberté et la démocratie, que la Russie a voulu réprimer sur le Maïdan en 2014.
Il y a dix ans, un cessez-le-feu fragile était décidé à Minsk. Il fut violé par vingt fois.
Il y a trois ans, la Russie lançait son invasion à grande échelle de l’Ukraine, une guerre d’agression, unilatérale, brutale, injustifiable, qui doit enfin cesser. Une guerre qui n’était pas défensive, qui n’était pas inévitable. Une guerre qui n’était pas justifiée et qui reste injustifiable. Elle est tout simplement l’expression d’un projet révisionniste assumé.
Mesdames et Messieurs,
Le 24 février dernier, le Conseil de sécurité a adopté une résolution américaine, la résolution 2774, et je veux la citer pour rappel : "le Conseil de sécurité demande instamment qu’il soit mis fin au conflit dans les plus brefs délais".
Qu’a fait l’Ukraine depuis le 24 février dernier ?
Le 9 mars, l’Ukraine a accepté le principe d’un cessez-le-feu complet et sans condition, conforme à la résolution 2774, démontrant sa bonne volonté et son souhait sincère de cheminer vers la paix.
Et qu’a fait la Russie depuis le 24 février dernier et l’adoption de la résolution 2774 ?
Elle a poursuivi ses crimes de guerre, ses crimes contre l’humanité en frappant les infrastructures et en prenant pour cibles les civils, des femmes et des enfants, des travailleurs humanitaires.
Alors qu’elle viole intégralement le droit international, la Russie voudrait nous faire croire qu’elle est dans son droit, que les territoires ukrainiens doivent lui revenir au nom du principe d’autodétermination. Mais c’est un dévoiement, cela est faux. Ce qui est vrai, c’est que la Russie viole la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, c’est que la Russie agresse son voisin, et que dans cette guerre d’agression, elle viole le droit international et le droit international humanitaire. Tout le monde le voit, tout le monde le sait.
Et aujourd’hui le seul obstacle au cessez-le-feu désormais, le seul obstacle à l’application de la résolution 2774 adoptée par ce Conseil le 24 février dernier, c’est Vladimir Poutine.
Alors pourquoi s’opposer ainsi à l’application de cette résolution ?
Sans doute la Russie de Vladimir Poutine voudrait-elle pousser jusqu’à une capitulation de l’Ukraine. Mais la France, comme beaucoup d’autres membres de ce Conseil, s’y oppose et continuera de s’y opposer.
D’abord, parce qu’il s’agit d’un enjeu de sécurité pour l’Europe et pour la France, que la Russie cherche à déstabiliser.
Parce que oui, Mesdames et Messieurs, la France est déjà prise pour cible.
Depuis le début du conflit, notre pays, soutien de l’Ukraine, est visé par des cyberattaques russes émanant du GRU, le service de renseignement militaire russe, selon le mode opératoire APT28. Elles ont visé une douzaine d’entités françaises : services publics, entreprises, organisations sportives liées aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Nous condamnons ces cyberattaques avec la plus grande fermeté. Elles sont indignes d’un membre permanent du Conseil de sécurité et contraires au cadre fixé par les Nations unies. Elles doivent cesser sans délais.
Mais si la France, comme d’autres membres de ce Conseil, s’oppose à toute forme de capitulation de l’Ukraine, ce n’est pas seulement pour la sécurité de l’Europe, pour la sécurité de la France, c’est aussi pour la paix et la sécurité du monde. Parce qu’une telle issue à la guerre consacrerait la loi du plus fort, elle entrainerait inévitablement le monde dans une course effrénée aux armements et sans doute à la prolifération.
Je crois qu’il faut tout simplement revenir à certains des principes élémentaires de notre Charte, que je veux là-aussi rappeler pour rafraîchir la mémoire à tous les membres de ce Conseil. Au chapitre I, article 2, alinéa 4, il est écrit que : "les Membres de l’Organisation des Nations unies s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations unies."
Alors revenons à des principes simples : les agresseurs ne doivent pas être récompensés aux dépens des agressés ; les frontières sont intangibles ; les États, quels qu’ils soient, sont souverains.
J’en appelle donc au Président Poutine pour lui dire :
Cessez le feu !
Cessez le feu !
Cessez le feu !
C’est alors que la paix redeviendra possible.
Une paix juste et véritable.
Une paix conforme à la Charte des Nations unies et au droit international.
Une paix qui respecte la souveraineté, l’intégrité territoriale et la sécurité de l’Ukraine.
Nous pouvons y parvenir.
C’est pourquoi, saluant les efforts de médiation engagés notamment par les États-Unis d’Amérique et au plus haut niveau, la France souhaite que ce Conseil puisse exiger unanimement un cessez-le-feu complet, immédiat et sans condition, je veux dire par là : le silence des armes.
Je vous remercie.
Informations complémentaires
- Pour en savoir plus
- Mission permanente de la France auprès des Nations-Unies (New-York) : www.franceonu.org
- Compte Twitter de la mission permanente de la France auprès des Nations Unies
- Mission permanente de la France auprès des Nations-Unies (Genève)
- Mission permanente de la France auprès des Nations Unies (Rome)
- Mission permanente de la France auprès des Nations-Unies (Vienne)
- Délégation des fonctionnaires internationaux (DFI)
- Site web de l’ONU en français
- Emploi et stage à l’ONU
- Entreprises : les marchés de l’ONU
- Site web de l’UNESCO en français