Déclaration de M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, à son arrivée au Conseil Affaires étrangères (27 janvier 2025)

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Aujourd’hui, nous commémorons les 80 ans de la libération d’Auschwitz. Nous nous souvenons des heures les plus sombres de notre histoire, nous saluons la mémoire des victimes de l’Holocauste et nous affirmons notre rejet absolu de l’antisémitisme sous toutes ses formes.

En Afrique, dans la région des Grands Lacs, les combats font rage alors que Goma s’apprête à tomber. La France exprime sa solidarité à l’égard de la République démocratique du Congo, de son intégrité territoriale. La France condamne fermement l’offensive menée par le M23 soutenue par les forces armées rwandaise qui ont entraîné la mort de six casques bleus et provoqué le déplacement de plusieurs dizaines de milliers de personnes civiles. Les combats doivent cesser et le dialogue doit reprendre. C’est en ce sens que la France s’exprimera au Conseil de sécurité des Nations Unies.

À un mois du troisième anniversaire du début de la guerre d’agression russe en Ukraine, l’Europe continue de soutenir les Ukrainiens pour leur permettre d’entrer au moment où ils le jugeront opportun dans des négociations de paix en situation de force. Aujourd’hui, nous décidons de renouveler le régime de sanctions qui a permis de priver la Russie de Vladimir Poutine de 400 milliards d’euros, c’est-à-dire de le priver de l’équivalent de trois années de financement de son effort de guerre. Nous allons également sanctionner trois citoyens russes, deux citoyens de 26 ans et un citoyen de 45 ans qui se sont rendus coupables d’attaques cyber qui ont visé et déstabilisé l’Estonie. Et puis nous annonçons un paquet de soutien à l’égard de la Moldavie qui fait l’objet d’une asphyxie énergétique de la part de la Russie qui entend, comme elle l’a fait à de nombreuses reprises ces derniers mois, perturber le débat démocratique et les processus électoraux dans ce pays qui aspire à rejoindre l’Union Européenne.

Au Proche-Orient, le cessez-le-feu au Liban et l’accord que la France a obtenu de haute lutte aux côtés des Américains est prolongé jusqu’au 18 février. La France déplore les pertes humaines provoquées par les tirs israéliens qui ont eu lieu hier et appelle à un respect de l’accord du cessez-le-feu qui doit conduire à un retrait complet des forces israéliennes au sud du Liban et un désarmement complet du Hezbollah au sud du fleuve Litani.

Pour la Syrie, nous allons décider aujourd’hui de suspendre certaines sanctions qui s’appliquent au secteur de l’énergie, du transport ou des institutions financières et qui entravent la stabilisation économique du pays et le démarrage du processus de reconstruction. Ces suspensions dans les sanctions doivent avoir pour contrepartie une transition politique qui associe toutes les Syriennes et tous les Syriens ainsi que des mesures résolues pour garantir la sécurité et en particulier une lutte sans relâche contre toute forme de résurgence du terrorisme de Daesh ainsi que la détection, la maîtrise et la destruction des stocks d’armes chimiques du régime de Bachar al-Assad. La France accueillera le 13 février prochain la troisième édition de la Conférence d’Aqaba associant les partenaires internationaux de la Syrie pour apporter ce soutien et veiller à la mise en œuvre des mesures de transition politique et d’assurance s’agissant de la sécurité puisque c’est aussi la sécurité des Européennes et des Européens, des Françaises et des Français qui se joue en Syrie.

À Gaza, nous accueillons avec beaucoup de soulagement cette première phase du cessez-le-feu qui a permis des premières libérations d’otages. Nous appelons toutes les parties à respecter les termes de l’accord. Il doit permettre la libération de tous les otages, notamment des deux otages français, Ofer Kalderon et Ohad Yahalomi. Il doit permettre aussi de mettre fin à cette guerre qui a trop duré et qui a fait tant de victimes, et ouvrir un chemin vers une solution politique seule susceptible d’apporter la paix et la stabilité dans la région. Il faut que l’aide humanitaire puisse désormais être acheminée sans entrave dans l’enclave et de ce point de vue-là, l’UNRWA doit pouvoir continuer à exercer sa mission essentielle en soutien des populations civiles.

Dans quelques semaines, les gendarmes français et européens de la mission EUBAM seront déployés à Gaza pour pouvoir assurer le bon fonctionnement du point de passage de Rafah.

Enfin, s’agissant de l’Iran, la France condamne les conditions de détention arbitraire des otages français détenus sur place et dont les conditions sont assimilables en droit international à de la torture. Nous avons appelé nos ressortissants à ne plus se rendre en Iran, appelé nos ressortissants de passage là-bas à revenir en France, et j’annoncerai aujourd’hui que nous proposerons que les responsables de ces détentions arbitraires puissent être sanctionnés par l’Union Européenne dans les mois qui viennent.

Enfin, nous décidons aujourd’hui de suspendre l’exemption de visa qui s’applique aux diplomates, aux officiels du gouvernement géorgien que nous appelons une nouvelle fois, et avec beaucoup de fermeté, à mettre fin à la répression qui vise les manifestants, les journalistes et les représentants d’organisations de la société civile. Le peuple géorgien a exprimé constamment et avec beaucoup de persévérance son aspiration européenne, son aspiration à la démocratie et à la liberté. Elle doit être entendue.

[Question]

R - La France est très attachée au fait que les Kurdes sont complètement intégrés dans la transition politique en Syrie. Il faut qu’il y ait une solution politique qui respecte les droits des Kurdes, et qui prenne en compte les intérêts de sécurité de la Turquie. Il faut qu’il y ait un processus pacifique qui respecte et prenne en compte le fait que les Kurdes ont joué un rôle important dans la lutte contre l’État islamique, et le fait que les guerriers terroristes de l’État islamique sont maintenant détenus en prison, plutôt que de diffuser l’insécurité en Syrie et en Europe.

Q - Qu’est-ce que vous pensez du renouvellement des sanctions par un seul pays membre ?

R - Je vous l’ai dit, aujourd’hui les sanctions seront renouvelées. Elles ont permis de priver Vladimir Poutine de 400 milliards d’euros, c’est-à-dire l’équivalent de trois années d’efforts de guerre. Elles ont prouvé leur efficacité et elles vont être maintenues et se poursuivre. Merci beaucoup.