Taïwan veut devenir un paradis pour les startups

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Actualité
Taïwan | Politiques de recherche, technologiques et universitaires
26 février 2016

La nouvelle présidente, Tsai Ing-wen, a fait des startups une des priorités du pays. Environ 130 incubateurs auraient déjà vu le jour sur l’île.

C’est un parking aérien quelconque, derrière un immeuble moderne, un peu au nord de Taipei. L’ascenseur du bâtiment qui le coiffe ne recèle rien de particulier non plus. Et pourtant. Au 9e étage, changement d’ambiance assuré : en lettres vertes géantes, le logo qui accueille le visiteur ne laisse pas de doute. Bienvenu chez Garage+, l’un des incubateurs les plus en vue de Taïwan. Figurines géantes tout sourire, bar convivial et boissons gratuites, ou encore chaises en plastique blanc design… plus d’une trentaine de jeunes pousses ont élu domicile ici - les plus matures ont droit à un espace clos au-dessus - dans cette émanation de la fondation Epoch, représentative de la fièvre créatrice actuelle.

En finir avec la sous-traitance

Réputée pour ses grands sous-traitants électroniques - comme Foxconn ou TSMC -, Taïwan connaît un essoufflement de son modèle de croissance, faute d’une valeur ajoutée suffisante. Très dépendants des exportations, les grands champions mais aussi les PME sont passés maîtres dans l’optimisation industrielle, mais ils font face à une concurrence grandissante de la Chine, notamment. Présent sur place depuis vingt ans à Taïwan, Giuseppe Izzo, le patron de la chambre européenne de commerce (et aussi celui de STMicroelectronics dans le pays) confirme : "La pression est forte pour baisser les coûts et on trouve toujours un industriel moins cher." Comme le ferait un "McKinsey boy", il dessine au tableau la solution d’une courbe magique : migrer vers la droite c’est-à-dire créer des marques, ce qui n’a pas vraiment marché jusque-là, ou vers la gauche c’est-à-dire vers plus de conception, et donc d’innovation.
L’innovation ? Elue présidente mi-janvier, Tsai Ing-wen, la figure de proue du parti indépendantiste, en a fait le cheval de bataille de son programme, en ciblant cinq domaines : informatique, énergies renouvelables, santé, sécurité et mécanique de précision. Le pli, à vrai dire, est déjà pris depuis quelque temps, et Garage + n’est qu’un parmi la myriade d’incubateurs apparus récemment. On en compterait plus de 130, la plupart dans le milieu universitaire. "L’état d’esprit entrepreneurial est très ancien à Taïwan, même si les start-up innovantes c’est assez récent", explique Pascal Viaud, conseiller du commerce extérieur de la France et fondateur d’Ubik, une société de conseil en technologies. Assez récent, mais prometteur car les jeunes Taïwanais, mal payés et inquiets pour leur avenir, semblent de moins en moins attirés par des carrières au sein de grands groupes très hiérarchisés.

Un chantier de plus de dix ans

"Taïwan peut réaliser cette transition, mais cela va demander du temps, entre dix et vingt ans", tempère Dachrahn Wu, directeur du Centre de recherche pour le développement économique de Taïwan à l’université centrale nationale de Taipei. Aux yeux de ce professeur, le nouveau gouvernement ne devra pas trop se disperser car, dans certains domaines, comme la santé, il faut des années avant de pouvoir commercialiser une molécule et, de toute façon, les jeux sont déjà faits.

Dans ce contexte foisonnant, le bureau français a fait de la French Tech sa priorité numéro un. Taïwan espère obtenir le label French Tech Hub. Tout est fait pour attirer des jeunes pousses françaises et les associer aux grands du hardware local. Un expert innovation est d’ailleurs arrivé depuis peu et une grosse présence est prévue en mars sur le Salon Taipei Smart city & IoT. La compétence hexagonale en logiciel et dans tout ce qui a trait à l’expérience utilisateur peut combler un manque criant dans l’île. Attention, toutefois, témoigne Pascal Viaux : “"A Taïwan, les portes s’ouvrent facilement car la curiosité domine, mais nombre de start-up échouent, faute d’être… prêtes. Je préviens toujours mes clients : Préparez-vous à réussir."”

Rédacteur : Emmanuelle Platzgummer et Joanne Antonetti (Bureau Français de Taipei)

Source : Taïwan veut devenir un paradis pour les startups, Les Echos, 4 février 2016, http://start.lesechos.fr/travailler-a-letranger/actu-internationales/taiwan-veut-devenir-un-paradis-pour-les-startups-3870.php#xtor=RSS-2