Fedor Gomory, « scientifique slovaque de l’année » récompensé pour sa cape d’invisibilité magnétique

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29 juillet 2015

Le prix du « Scientifique Slovaque de l’année 2014 » a été attribué à Fedor Gomory, de l’Institut d’Ingénierie Electrique de l’Académie Slovaque des Sciences (SAV). Il a été récompensé pour ses recherches sur la « cape » d’invisibilité magnétique. Le prix a été remis le 12 mai 2015 à la Maison de la Radio de Bratislava, en présence du Président de la République Slovaque Andrej Kiska qui a salué la réussite des scientifiques Slovaques.

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L’homme invisible | Crédits : Adam Koford

La cape d’invisibilité d’Harry Potter ne sera bientôt plus de l’ordre de la science-fiction. C’est l’objectif que se donnent de nombreuses équipes scientifiques dans le monde qui rivalisent pour rendre des objets indétectables. Des chercheurs de l’Institut d’Ingénierie Electrique de l’Académie Slovaque des Sciences (SAV) ont développé un dispositif expérimental cylindrique creux qui rend invisible tout corps situé en son sein pour un champ magnétique donné. Ce travail a été mené en collaboration avec des chercheurs espagnols de l’Université Autonome de Barcelone. Le projet est basé sur les calculs théoriques de l’équipe catalane, directement réalisés à partir des équations de Maxwell décrivant les lois de l’électromagnétisme. Selon les scientifiques, ce dispositif simple obtient des résultats probants et très prometteurs en laboratoire.

• Principes physiques

Un courant électrique est produit par le déplacement des électrons dans un matériau conducteur. Les électrons subissent des chocs et ralentissent. On parle de résistance électrique du matériau. A très basses températures, les propriétés de certains matériaux changent radicalement. On dit qu’un matériau est supraconducteur quand il n’oppose plus aucune résistance au passage du courant électrique et expulse le champ magnétique auquel il est soumis vers l’extérieur. Ce phénomène est appelé « effet Meissner ».

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A gauche : la couche ferromagnétique, le champ magnétique pénètre dans le cylindre. Au centre : la couche supraconductrice, il est repoussé par le cylindre. A droite : le champ ne pénètre pas le cylindre et ne subit pas de distorsion. L’objet placé dans le cylindre devient invisibles magnétiquement. | Crédits : Jordi Prat

Dans leurs travaux, les scientifiques slovaques ont créé un cylindre de 12.5 mm de diamètre constitué de deux couches différentes. Les expériences ont été menées pour un champ magnétique de 40 milliTesla et une température de -196.15 degrés Celsius obtenue par refroidissement du dispositif à l’azote liquide. La première couche est faite d’un matériau qui devient supraconducteur quand il est refroidit. Elle permet d’empêcher le champ magnétique d’atteindre le cœur du cylindre en le repoussant vers l’extérieur (effet Meissner). En contrepartie, elle génère une distorsion du champ magnétique externe, ce qui rend ce dernier détectable. Pour résoudre ce problème, les chercheurs ont ajouté une couche ferromagnétique au cylindre, composée de fer, de nickel et de chrome. Cette deuxième couche est capable d’attirer le champ magnétique grâce à ces propriétés d’aimant. La distorsion crée par la couche supraconductrice est ainsi compensée par la couche ferromagnétique. Au final, le champ magnétique est nul à l’intérieur du cylindre et il n’y a pas de distorsion du champ magnétique à l’extérieur. Un objet placé au cœur de dispositif est ainsi protégé des ondes extérieures et indétectable par les appareils de surveillance magnétique (pour un champ magnétique spécifique).

• Applications

Au-delà de nourrir nos rêves d’invisibilité, les secteurs d’applications se révèlent être nombreux : défense, surveillance, spatial, énergie, biologie, médical… A l’avenir, ce type d’appareil d’invisibilité magnétique pourrait par exemple permettre d’isoler les appareils médicaux magnéto-sensibles comme les stimulateurs cardiaques (pacemaker) ou les implants auditifs, chez des patients ayant besoin de subir une imagerie à résonance magnétique (IRM).

Les résultats prometteurs des équipes slovaques et espagnoles intéressent de nombreuses institutions internationales. C’est le cas de la NASA qui utilisent ces travaux afin d’examiner l’impact des champs magnétiques sur les organismes vivants.

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Appareil d’imagerie à résonance magnétique | Crédits : emirkoo

En physique, la notion de champ traduit l’influence que peut exercer à distance un objet sur son environnement. Qu’ils soient d’origine naturelle ou artificielle, les champs magnétiques sont omniprésents dans notre quotidien. Les études concernant leur impact sur notre santé et notre environnement soulèvent des inquiétudes. Elles suscitent des débats de société grandissants, notamment en ce qui concerne les lignes à haute tension, les antennes relais ou plus largement les nouvelles technologies.

Les scientifiques maitrisent les lois physiques qui régissent les champs magnétiques. Pour autant, leur contrôle et suppression restent aujourd’hui un défi scientifique et technologique majeur. Les travaux du docteur Gomory représentent un progrès notable dans la compréhension du contrôle des champs magnétiques. Cette nouvelle technologie a de beaux jours devant elle.

Sources :

PUBLICATION SCIENTIFIQUE

PRIX

TRAVAUX SCIENTIFIQUES

NASA

Pour en savoir plus, contacts :

Rédacteur(s) :

Marie-Flore Michel - Chargée de mission scientifique et COP 21 - marie-flore.michel[a]diplomatie.gouv.fr