Partenariat UE-Japon : « Voitures contre fromages »… et données

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Japon

Brève
Japon | Sciences et technologies de l’information et de la communication : TIC, télécoms, micro-nanotechnologies, informatique | Big Data
19 février 2019

L’Union Européenne et le Japon ont adopté, le 23 janvier 2019, un accord reconnaissant l’adéquation de leurs systèmes de protection des données, donnant naissance au plus grand espace de flux sécurisés de données au monde, concernant plus de 600 millions de personnes. Celui-ci s’ajoute et complète l’accord de partenariat économique (JEFTA) entré en vigueur le 1er février 2019.

Concrètement, cette décision d’adéquation autorise le transfert de données personnelles entre l’Union Européenne et la Japon sans contrôle supplémentaire. En d’autres termes, les modalités d’échanges de données avec le Japon seront les mêmes qu’entre membres de l’UE.

Cet accord a été rendu possible par la mise en place par le Japon de garanties supplémentaires permettant d’assurer que les données transférées de l’UE vers le Japon bénéficieront d’un niveau de protection conforme aux normes européennes (fondées sur le RGPD – règlement général sur la protection des données – entré en vigueur en mai 2018).

Ces garanties concernent notamment : l’extension du périmètre des données sensibles ; les conditions selon lesquelles les données de l’UE peuvent être transférées ultérieurement depuis le Japon vers un pays tiers ; le contrôle de l’accès aux données par les autorités publiques japonaises ; l’exercice des droits individuels en matière d’accès et de rectification.

Ces règles sont contraignantes pour les entreprises japonaises qui importent des données de l’UE et pourront être invoquées par l’autorité indépendante japonaise de protection des données (PPC) et les juridictions japonaises. Un premier réexamen conjoint sera réalisé après deux ans pour évaluer le fonctionnement du cadre.

Les avis positifs reçus du comité européen de la protection des données (EDBP) ainsi que d’un comité composé de représentants des États membres de l’Union ont permis d’adopter cet accord conclu en juillet 2018, concrétisant ainsi des discussions initiées à l’été 2017. La décision équivalente a été adoptée par le Japon ce même 23 janvier 2019.

L’entrée en application de cet accord précède d’une semaine, et vient compléter, celle de l’accord de libre-échange entre le Japon et l’UE (JEFTA), relayé métaphoriquement comme l’accord « voitures contre fromages ».
Avec ce nouvel accord, l’UE et le Japon affirment ainsi qu’à l’ère numérique, la promotion de normes élevées en matière de respect de la vie privée et de protection des données à caractère personnel est compatible avec la facilitation du commerce international.

Le jour-même de la mise en application de l’accord, le Premier ministre Japonais Shinzo Abe réaffirmait cette ligne politique lors de son discours au forum économique mondial de Davos.

M. Abe a ainsi annoncé vouloir mettre le sujet de la gouvernance internationale des données à l’agenda du sommet du G20 qui se tiendra à Osaka en juin prochain. « J’aimerais que l’on se souvienne de ce G20 à Osaka comme du sommet ayant déclenché la réflexion mondiale sur la gouvernance des données » a-t-il déclaré.

En effet, à l’instar du commerce de biens et services, la gouvernance des données voit s’affronter deux visions, entre partisans du libre-échange et ceux du protectionnisme. En reconnaissant l’adéquation de leurs systèmes de protection des données, l’Union Européenne et le Japon espèrent ouvrir la voie à la conclusion d’accords multilatéraux avec d’autres pays partageant ces mêmes valeurs. En effet, pour Mme Věra Jourová, ayant mené les négociations pour l’Union Européenne, « cet accord servira d’exemple aux futurs partenariats dans ce domaine stratégique et contribuera à édicter des normes mondiales ».

Sources :
http://europa.eu/rapid/press-release_IP-19-421_fr.htm
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32019D0419&from=EN
https://asia.nikkei.com/Economy/Abe-to-push-for-global-data-sharing-rules-at-Davos

Rédacteur : Guillaume Barraud, Chargé de mission Numérique, Matériaux et Sciences de l’ingénieur, Ambassade de France au Japon