Mutation D614G du SARS-COV2 : recherches japonaises pour évaluer la virulence et le pouvoir pathogène d’un variant devenu dominant

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Brève
Japon | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
26 novembre 2020

Des recherches dirigées par le Prof. Yoshihiro Kawaoka de l’Institut des sciences médicales de l’Université de Tokyo démontrent comment la mutation émergente D614G de la protéine « Spike » du SARS-CoV-2 pourrait impacter la transmissibilité et la pathogénicité du virus.

Des recherches dirigées par le Prof. Yoshihiro Kawaoka de l’Institut des sciences médicales de l’Université de Tokyo, en collaboration avec le Prof. Ralph Baric de l’Université de Caroline du Nord aux États-Unis, démontrent comment la mutation émergente D614G de la protéine « Spike » du SARS-CoV-2 pourrait impacter la transmissibilité et la pathogénicité du virus – sa capacité à provoquer la maladie.

Bien que le SARS-CoV-2 ne muterait que peu en comparaison avec les virus grippaux, plusieurs dizaines de mutations ont d’ores et déjà été identifiées, dont le variant D614G de Spike, qui est aujourd’hui la forme la plus répandue à l’échelle mondiale.

La protéine « Spike » joue un rôle fondamental en permettant au virus de pénétrer dans les cellules en se liant à un récepteur de surface. Une mutation de cette protéine pourrait donc faciliter ou altérer l’infection. L’étude publiée dans la revue scientifique Science le 13 novembre 2020 montre que le variant D614G de Spike augmente les capacités d’infection, de réplication et de compétition ainsi que la transmissibilité du virus dans des cellules primaires humaines et dans un modèle animal. Les résultats de l’étude ne permettent cependant pas de conclure quant à l’influence de cette mutation sur la pathogénicité de ce variant et ne sont pas, pour l’instant, généralisables au cas humain. L’étude démontre également que le variant D614G présente une morphologie similaire à la souche mère et reste sensible à la neutralisation par des anticorps dirigés contre la forme initiale du SARS-CoV-2. Ces résultats sont donc encourageants pour la recherche vaccinale contre le virus.

L’équipe du Prof. Yoshihiro Kawaoka a comparé la capacité d’infection de la souche originale et du virus muté sur des hamsters, ces derniers pouvant développer une pneumonie de manière similaire à l’homme. Pour chaque type de virus, un hamster sain et un hamster infecté ont été placés à proximité et sans contacts physiques afin d’évaluer le temps de propagation du virus d’un animal à l’autre. Cinq des huit hamsters sains mis en contact avec le variant D614G ont été infectés deux jours plus tôt que les contrôles mis en contact avec la forme sauvage. L’étude a également montré que la transmission par aérosols et gouttelettes était plus rapide dans le cas de la mutation D614G.

Les résultats ont également permis d’identifier d’autres effets de la maladie qui pourront faire l’objet de futures études, telle qu’une perte de poids significative chez les sujets malades ou encore l’augmentation de la capacité de réplication chez les hamsters porteurs de la mutation de type D614G. Ces effets, même s’ils apparaissent marginaux pour l’instant, pourraient entraîner des complications chez les cas graves.

Au-delà de l’identification des mutations de ce virus, l’enjeu de telles études est d’en évaluer les potentielles implications cliniques afin d’accompagner au mieux la recherche thérapeutique et vaccinale relative au SARS-CoV-2.

Sources :
[1] Asahi Shinbun, Mutated strain of new coronavirus more infectious than Wuhan type. http://www.asahi.com/ajw/articles/13927621

[2] Science, SARS-CoV-2 D614G variant exhibits efficient replication ex vivo and transmission in vivo. By Yixuan J. Hou, Shiho Chiba, Peter Halfmann, Camille Ehre, Makoto Kuroda, Kenneth H. Dinnon III, Sarah R. Leist, Alexandra Schäfer, Noriko Nakajima, Kenta Takahashi, Rhianna E. Lee, Teresa M. Mascenik, Rachel Graham, Caitlin E. Edwards, Longping V. Tse, Kenichi Okuda, Alena J. Markmann, Luther Bartelt, Aravinda de Silva, David M. Margolis, Richard C. Boucher, Scott H. Randell, Tadaki Suzuki, Lisa E. Gralinski, Yoshihiro Kawaoka, Ralph S. Baric DOI : 10.1126/science.abe8499 https://science.sciencemag.org/content/early/2020/11/11/science.abe8499.full

[3] INSERM, Des mutations rendant le SARS-CoV-2 plus dangereux, vraiment ? https://presse.inserm.fr/des-mutations-rendant-le-sars-cov2-plus-dangereux-vraiment/41099/

Rédactrices :
Hélène Le Brun, Chargée de mission du pôle Santé, Environnement et Vie au sein du Service pour la Science et la Technologie de l’Ambassade de France au Japon.
helene.le-brun -at- diplomatie.gouv.fr

Myriam Baratin, Attachée scientifique du pôle Santé, Environnement et Vie au sein du Service pour la Science et la Technologie de l’Ambassade de France au Japon.