Le Japon, pays en voie de développement dans le monde de l’IA ?

Ce projet, baptisé « Beyond AI », se concrétisera par la création, d’ici fin 2020, de deux établissements, l’un sur le campus de Hyogo de l’Université de Tokyo et l’autre dans les nouveaux bureaux de SoftBank à Takeshiba. Les résultats émanant des activités de recherche menées à Hyogo seront transmis au centre de Takeshiba, qui travaillera à les concrétiser en solutions appliquées et à définir les modèles économiques associés à leur déploiement sur le marché. La conduite autonome et l’intelligence artificielle appliquée à la médecine sont cités parmi les thèmes principaux auxquels s’intéresseront les chercheurs de ce centre. SoftBank Corp. et l’Université de Tokyo annoncent rechercher pour ce centre des experts en IA provenant des universités japonaises mais également du monde entier.

Ce projet s’appuie sur le dispositif « Collaborative Innovation Partnership (CIP) » du METI (ministère japonais de l’économie, du commerce et de l’industrie), qui a pour objectif de promouvoir les partenariats en R&D entre universités ou instituts de recherche et entreprises. SoftBank Corp. prévoit un investissement de ¥20 milliards sur 10 ans pour la création de ces établissements et les frais de personnels. Les profits générés par les entreprises créées seront investis dans la recherche et le développement des ressources humaines.

En effet, le développement des talents en Intelligence Artificielle est un enjeu crucial, en particulier au Japon où le gouvernement prévoit un manque de 50 000 talents pour la seule année 2020 (et prévoit un manque de 120 000 personnes d’ici 2030, dû à une augmentation de la demande provenant des secteurs automobiles et financiers) . Le manque de de formations en IA disponibles dans les universités japonaises, couplé à un contexte de déclin démographique, crée une situation dans laquelle les employeurs ne parviennent pas à recruterles ressources humaines dont ils ont besoin dans ce domaine.

SON Masayoshi, PDG de SoftBank Corp., est critique à l’égard de la situation de son pays, qu’il qualifie de « pays en développement » vis-à-vis de ce qui constitue selon lui la plus importante révolution technologique actuelle, pour laquelle les investissements sont insuffisants. Les conséquences de ce retard sont objectivées par l’écart grandissant entre le Japon et la Chine ou les Etats-Unis en termes de nombres de brevets déposés. Lors d’une réunion gouvernementale où il était invité à exprimer sa vision, SON a proposé que l’IA devienne une matière obligatoire pour les examens d’entrée à l’université.

En parallèle de l’écosystème d’entreprises détenues par le groupe SoftBank Corp. et les fonds d’investissement SoftBank Vision Fund 1 et 2, SON Masayoshi a établi en 2016, sur ses fonds propres, la « Masason Foundation ». Cette fondation soutient de jeunes talents (le plus jeune a 8 ans) dans le développement de leurs idées avec des fonds « illimités ». Ces financements prennent la forme de bourses d’étude, d’achat de matériels, de mise à disposition d’environnements de travail et d’organisation de conférence et opportunités d’élargir les réseaux de chacun.

Bien que les sujets d’étude des 187 membres de la fondation soient transversaux, le sujet principal est l’Intelligence Artificielle, qui concerne 23 % des projets. S’il avoue lui-même ne pas savoir spécifiquement de quelle manière sa fondation pourra contribuer à l’humanité dans le futur, SON Masayoshi envisage le développement des capacités humaines pour garder la main sur celles des intelligences artificielles.

Sources :
https://www.japantimes.co.jp/?post_type=news&p=2354623
https://www.reuters.com/article/us-softbank-group-strategy/softbanks-son-says-japan-lacks-investment-opportunities-is-ai-developing-country-idUSKCN1UD08Q
https://japantoday.com/category/tech/SoftBank’s-Son-says-Japan-should-make-AI-mandatory-subject-for-college-students
https://asia.nikkei.com/Business/Companies/SoftBank-s-Son-funds-young-geniuses-to-avert-AI-domination

Rédacteur :
Guillaume Barraud, Chargé de mission Numérique, Matériaux et Sciences de l’ingénieur, Ambassade de France au Japon
guillaume.barraud -at- diplomatie.gouv.fr