Les mystères du saphir de mer

Partager
Israël

Actualité
Israël | Science de la terre, de l’univers et de l’environnement : énergie, transports, espace, environnement
9 novembre 2015

Nombreux sommes-nous à avoir rêvé de percer le secret de l’invisibilité, encore plus après avoir lu le célèbre tome I de Harry Potter de J.K Rowling. Mais rares sont ceux qui ont réellement eu la chance d’observer ce phénomène. Des biologistes israéliens qui se sont intéressés aux Sapphirinidae, appelés plus communément saphirs de mer, ont non seulement eu la chance d’en être témoins mais ont en plus le mérite d’en avoir élucidé le mécanisme optique.

Le saphir de mer

Le saphir de mer est une petite créature qui appartient au groupe des copépodes (groupe de petits crustacés dont le nom se traduit, en grec, par « pied en forme de rames ») vivant dans l’eau douce ou salée. Ces animaux sont presque invisibles pour l’homme car ils mesurent de un à quelques millimètres de longueur. La femelle est transparente. Le mâle, quant à lui, a la particularité de posséder de magnifiques et lumineuses couleurs bleue, rouge ou violette, qui attirent les femelles et lui vallent l’appellation de saphir. Ces petits crustacés apparentés à de petites paillettes irisées sont connus pour leur pouvoir d’invisibilité. En effet, les mâles sont capables d’une prouesse dont le secret demeurait inconnu à tous les biologistes marins jusqu’à maintenant : d ‘un instant à l’autre ils deviennent invisibles, ou plus exactement transparents.
Comment de telles créatures sont-elles capables de posséder des couleurs si resplendissantes et de devenir transparentes instantanément ?

Dans quel but ?

Les scientifiques pensent que les Sapphirinidae resplendissent de leur couleur lorsqu’ils sont en présence d’une femelle ou d’un mâle de leur espèce et deviennent invisibles dès lors qu’ils ne le sont plus pour se protéger des prédateurs.

Quel est leur secret ?

Une nouvelle étude de l’institut Weizmann et de l’Université des sciences marines d’Eilat en Israël, publiée en juin 2015, dans la revue Journal of the American Chemical Society (JACS), brise le mystère de ce processus. Dans cette étude, les chercheurs se sont intéressés aux écailles hexagonales qui recouvrent le dos des mâles et qui possèdent une structure cristalline. Ils ont pu mesurer la réflectivité de cette structure qui est à l’origine de la couleur du crustacé. En utilisant une technique de cryo-microscopie électronique (1), ils ont pu observer l’organisation de cette structure cristalline sur le matériel cellulaire. Ces couleurs s’expliquent par le phénomène d’iridescence ou de goniochromisme selon lequel certaines surfaces semblent changer de couleur selon l’illumination, due à la réflexion de la lumière sur des structures périodiques. De fait, la structure cristalline des écailles est effectivement disposée de façon précise et périodique. La couleur différente de chaque espèce proviendrait donc de l’espace entre ces structures cristallines, lui même contrôlé par la fine couche de matériel cellulaire entre chaque structure.
En se basant sur cette explication, les chercheurs ont réussi à expliquer l’effet de transparence : lorsque certains Sapphirinidae tournent leur dos à la lumière et que celle-ci frappe leur structure cristalline à 45°, la longueur d’ondes de la lumière réfléchie passe dans le domaine de l’invisible ultra violet. Les Sapphirinidae ont ainsi la faculté de contrôler leur visibilité en se positionnant de différentes manières en fonction de la lumière arrivant dans l’océan.

Des applications potentielles

Plus les structures de cristal sont proches les unes des autres, plus courtes sont les longueurs d’ondes et plus bleue est la lumière qui en est réfléchie. Cette stratégie sophistiquée pourrait être utilisée pour manipuler la lumière et construire une structure nanométrique permettant de manipuler les flux de photons, ce qui pourrait inspirer le développement de nouvelles technologies optiques. Quand à la cape d’invisibilité, on la verra peut-être arriver sur le marché !

Sources :
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/diplomatie-scientifique/veille-scientifique-et-technologique/israel/article/la-microscopie-electronique-et-ses-avancees?xtor=RSS-4ici

https://www.youtube.com/watch?v=26kus22RaTo

http://pubs.acs.org/stoken/presspac/presspac/full/10.1021/jacs.5b05289#aff1

http://wis-wander.weizmann.ac.il/a-marine-creature’s-magic-trick-explained#.VgvgveDPbMN

Auteur : Amaranta Kahn, Volontaire internationale chercheuse à l’Institut Weizmann