L’huile de palme perturberait nos comportements alimentaires

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Canada | Agronomie et alimentation
4 août 2015

Une équipe de l’Université de Montréal a mis en évidence qu’une alimentation riche en graisses peut provoquer d’importants dysfonctionnements de la dopamine mésolimbique. Ce neurotransmetteur est directement impliqué dans le circuit de la récompense dont découlent les troubles de l’humeur et les conduites toxicomaniaques.

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Plantation de palmiers à huile, Indonésie

Les résultats d’une étude publiée le 14 juillet dans la revue Neuropsychopharmacology, montrent qu’«  indépendamment de la prise de poids et de l’obésité, une alimentation riche en matières grasses peut provoquer des déficiences dans le fonctionnement des circuits du cerveau directement impliqué dans les troubles de l’humeur, la motivation, la toxicomanie, la suralimentation ainsi que dans l’hédonie, qui caractérise un état mental de bien-être », explique Stéphanie Fulton, professeure au sein du département de nutrition de l’université de Montréal. « Nous concluons qu’à long terme, une alimentation riche en gras saturés, à base d’huile de palme dans le cas de cette étude, atténue la sensibilité de ce système aux récompenses, c’est-à-dire qu’il faut en consommer davantage pour atteindre le même niveau de satisfaction. À l’inverse, les gras mono-insaturés, comme l’huile d’olive utilisée dans cette étude, ne créent pas ce besoin. »

Pour parvenir à ces résultats, l’équipe de chercheurs a travaillé avec trois groupes de rats. Le premier groupe, ou groupe témoin, a été nourri avec une nourriture légère, peu grasse, comprenant autant d’acides gras saturés (huile de palme) que mono-insaturés (huile d’olive). Le second groupe a quant à lui reçut un régime à teneur élevée en acides gras mono-insaturés. Enfin, le troisième groupe de rongeurs a eu accès à une assiette riche en acides gras saturés.

Après huit semaines, tous les rats présentaient un poids, des niveaux d’insuline et de leptine (hormones importantes pour le fonctionnement endocrine et métabolique) et une glycémie relative comparables. Ils ont ensuite été soumis à des tests comportementaux et biochimiques reconnus pour évaluer le fonctionnement du système dopaminergique chez le rat. Les chercheurs ont alors constaté que le système de récompense des rats ayant été nourris avec un régime enrichi en acides gras insaturés était émoussé et que l’effet stimulant des amphétamines sur leur comportement était amoindri. Au niveau du noyau acubens (structure essentielle du système de la récompense), les récepteurs à la dopamine étaient moins exprimés. Aucun de ces changements n’a été observé chez les rats ayant eu accès au régime riche en acides gras mono-insaturés. « Nous avons déterminé que les rats soumis à une diète enrichie en huile de palme avaient une fonction dopaminergique considérablement atténuée, mentionne Cecile Hryhorczuk, première auteure de l’étude. Notre groupe de recherche et d’autres chercheurs ont formulé l’hypothèse que cette atténuation pousse le cerveau à essayer de compenser cet état en renforçant le comportement de “recherche de récompense”, soit un phénomène semblable à la tolérance aux drogues, qui fait que la personne doit augmenter la dose avec le temps pour obtenir le même effet. Donc, une personne qui consomme trop de gras saturés pourrait vouloir compenser une expérience de récompense réduite en recherchant et en consommant des aliments à teneur plus élevée en gras et en sucre pour obtenir le même niveau de plaisir ou de récompense. »

L’étude de l’équipe de Stéphanie Fulton est la première du genre à démontrer que, indépendamment du changement de poids, une consommation incontrôlée de gras saturés peut avoir des effets négatifs sur le contrôle de la motivation par le cerveau.

En savoir plus :
Neuropsychopharmacology 14 juillet 2015-
Dampened Mesolimbic Dopamine Function and Signaling by Saturated but not Monounsaturated Dietary Lipids doi : 10.1038/npp.2015.207
http://www.nature.com/npp/journal/vaop/naam/abs/npp2015207a.html

Source :
Communiqué de l’Université de Montréal, 14 juillet 2015 http://nouvelles.umontreal.ca/recherche/sciences-de-la-sante/20150714-votre-cerveau-sous-lemprise-de-la-friture.html

Rédacteur :
Pauline Bryère, Chargée de mission scientifique à Montréal, pauline.bryere[a]diplomatie.gouv.fr