Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) trois découvertes importantes

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Canada | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
28 octobre 2016

Une technologie mise au point par Michel Bouvier, de l’IRIC, permet de mieux comprendre le fonctionnement des récepteurs cellulaires visés par le tiers des médicaments que prescrivent les médecins.

Une technologie mise au point à l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) de l’Université de Montréal est à l’origine de trois découvertes qui pourraient permettre de grandes avancées thérapeutiques, dont la réduction des effets indésirables des nouveaux médicaments dans la lutte contre le cancer.

Plus spécifiquement, cette technologie permet de mieux comprendre le fonctionnement des récepteurs cellulaires visés par le tiers des médicaments que prescrivent actuellement les médecins.

Depuis des décennies, Michel Bouvier s’intéresse aux récepteurs qui sont couplés aux protéines G (RCPG) – la plus grande famille de récepteurs chez les mammifères. Les protéines G ont pour rôle d’engendrer une réponse cellulaire appropriée.

Un récepteur est l’élément d’une cellule qui capte et analyse les signaux émis par d’autres cellules, tels les hormones et les neurotransmetteurs, et qui les transmet à la cellule cible afin qu’elle puisse y réagir de façon adéquate.

Comme les méduses qui brillent dans l’océan
« Une cellule peut comporter plusieurs récepteurs et, jusqu’à maintenant, on croyait que les protéines membranaires RCPG transmettaient leurs signaux par des cascades de signalisation linéaires n’impliquant qu’un seul type de protéine G à la fois et que les signaux étaient arrêtés par l’action d’une protéine régulatrice connue sous le nom de β-Arrestine », note M. Bouvier, qui est directeur général et chercheur principal de l’IRIC.

Or, la nouvelle technologie mise au point par l’équipe de son laboratoire et d’autres chercheurs a permis de démontrer que « les mécanismes d’action de ces récepteurs sont beaucoup plus diversifiés et complexes qu’on le pensait », dit le pionnier dans la recherche de méthodes de transfert d’énergie de résonance de bioluminescence – qui porte le nom de BRET (pour bioluminescence resonance energy transfer).

Grâce au BRET, il est possible de détecter les interactions protéine-protéine de même que les changements de forme des protéines à l’intérieur d’une cellule vivante « en mesurant la luminescence qui se dégage lorsque se produit un transfert d’énergie entre les protéines donneuses et acceptrices d’énergie, ajoute Michel Bouvier. Ce phénomène naturel est le même que celui qui permet aux méduses d’émettre leurs couleurs spectaculaires ! »

« L’utilisation du BRET permet donc de mesurer en temps réel l’activation des RCPG et des voies de signalisation en aval directement dans la cellule », précise celui qui est aussi vice-recteur associé à la recherche, à la création et à l’innovation de l’Université de Montréal.

Au fil des ans, la technologie du BRET a permis de créer plus de 40 biocapteurs* qui ont révélé que chaque RCPG peut activer plusieurs protéines G distinctes de même que leurs cascades de signalisation, et que la β-Arrestine peut freiner la signalisation des protéines G et aussi activer certaines voies de signalisation.

De même, l’équipe de Michel Bouvier a découvert que « certains médicaments peuvent activer sélectivement un sous-ensemble de ces voies, donnant naissance au concept de signalisation biaisée ; celui-ci a des répercussions significatives pour la découverte de médicaments, permettant de cibler les voies de signalisation importantes du point de vue de leur activité thérapeutique tout en évitant celles responsables des effets secondaires indésirables ».

Trois études publiées dans le même été !

Poussant plus loin l’utilisation du BRET, le laboratoire de M. Bouvier, en collaboration avec l’équipe de Stéphane A. Laporte, de l’Université McGill, a conçu une application du BRET pour détecter, quantifier et visualiser le mouvement des protéines au sein des divers sous-compartiments cellulaires, et ainsi obtenir une résolution spatiotemporelle inégalée de la signalisation des RCPG. Ces travaux ont fait l’objet d’une publication en juillet dernier dans la revue scientifique Nature Communication.

Le recours aux approches du BRET a aussi permis de réaliser une étude avec les laboratoires du Dr R. J. Lefkowitz, de l’Université Duke (Prix Nobel de chimie en 2012), et du professeur Giorgios Skiniotis, de l’Université du Michigan, qui a révélé un complexe dont on ne soupçonnait pas l’existence.

« Ce complexe favorise des signaux plus durables dans la cellule et représente une nouvelle modalité de signalisation dans l’élaboration de solutions pharmacologiques pour le traitement de maladies dans lesquelles une telle signalisation de longue durée pourrait être problématique », explique Bianca Plouffe, étudiante postdoctorante du professeur Bouvier qui cosigne l’étude publiée dans Cell.

Une troisième étude parue dans la revue Nature a permis de mettre au jour les mécanismes intimes d’activation des protéines G par les récepteurs. Malgré la grande diversité des structures et de la réorganisation structurelle des RCPG au contact des molécules externes, l’activation des protéines G implique toujours les six mêmes changements de contact au sein de la structure de chaque RCPG.

Entreprise avec les groupes de recherche de Michel Bouvier, de Madan Babu, de l’Université de Cambridge (Grande-Bretagne), et de Genhard Schertier, de l’Institut Paul Scherrer (Suisse), cette étude pourrait, elle aussi, favoriser la découverte de médicaments plus efficaces et sécuritaires, en permettant de cibler plus spécifiquement les processus d’activation des protéines G.

« Ces études, qui remettent en question les paradigmes classiques d’activation des RCPG et promettent de nouvelles avenues thérapeutiques, montrent l’importance des approches multidisciplinaires en partenariat avec des laboratoires de pointe situés dans des établissements d’enseignement majeurs », a conclu Michel Bouvier.
* Ces biocapteurs ont été conçus par un groupe de chercheurs québécois dirigé par M. Bouvier et formé de Christian Le Gouill (Université de Montréal), Graciela Pineyro (CHU Sainte-Justine), Richard Leduc (Université de Sherbrooke) et Stéphane A. Laporte (Université McGill).

Pour en savoir plus sur les trois publications :

Nature communications – 11 juillet 2016 – Monitoring G protein-coupled receptor and β-arrestin trafficking in live cells using enhanced bystander BRET (http://www.nature.com/articles/ncomms12178)

Cell – 11 août 2016 - GPCR-G Protein-β-Arrestin Super-Complex Mediates Sustained G Protein Signaling (http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0092867416309102)

Nature – 16 août 2016 - Diverse activation pathways in class A GPCRs converge near the G-protein-coupling region (http://www.nature.com/nature/journal/v536/n7617/full/nature19107.html)

Source :
UdeM nouvelles – 19 octobre 2016 - http://nouvelles.umontreal.ca/article/2016/10/19/une-nouvelle-technologie-mise-au-point-par-l-iric-permet-trois-decouvertes-importantes/

Relayé par : Clémence Rampillon, chargée de mission Science et Technologie à Montréal, clemence.rampillon[a]diplomatie.gouv.fr