Etude des troubles d’apprentissage et de la mémoire grâce aux cerveaux des mouches

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Canada | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
23 décembre 2016

C’est un sacré fléau pour beaucoup d’entre nous. Toutefois, pour un chercheur de l’Université de Western Ontario, les milliers de mouches à fruits présentes sur les étagères de son laboratoire pourraient révéler d’importants secrets sur les troubles de la mémoire et de l’apprentissage, grâce aux similitudes que nous partageons avec ces petits insectes.

Jamie Kramer, professeur à la Faculté des sciences et à l’École de médecine et de dentisterie de Schulich, et son équipe se penchent sur les processus biologiques qui activent et désactivent les gènes - un champ connu sous le nom d’épigénétique - et sur la chromatine, combinaison d’ADN et de protéines qui constitue les chromosomes.

Le Dr. Kramer, récemment été nommé titulaire de la nouvelle Chaire de recherche du Canada (CRC) en neuro-épigénétique, a précédemment démontré que la régulation de la chromatine perturbait fréquemment les processus sous-jacents aux troubles du développement neurologique tels que la déficience intellectuelle. Grâce à des recherches supplémentaires, il espère fournir une meilleure compréhension du rôle que l’épigénétique et la chromatine jouent dans l’apprentissage et la mémoire, ce qui permettra d’améliorer les connaissances fondamentales de ces processus biologiques importants dans la déficience intellectuelle.

« La mémoire exige la régulation des gènes. Certains gènes doivent être activés ou désactivés afin que la mémoire fonctionne », explique le Dr. Kramer. « Et ce n’est pas seulement la mémoire ; de nombreux processus, comme l’addiction et le développement des neurones, sont liés à la régulation épigénétique des gènes. Nous voulons en savoir plus sur la façon dont ces mécanismes fonctionnent. Nous savons que la régulation des gènes est importante, mais nous ne connaissons pas le mode de régulation de gènes spécifiques. »

« C’est un problème difficile car le cerveau est très complexe. Nous devons regarder dans des régions spécifiques du cerveau et découvrir ce qui se passe dans certains neurones et comment les gènes régulent ces circuits. »

En se concentrant sur le développement neuronal et la mémoire chez les humains, on pourrait se demander comment une mouche à fruits s’inscrit dans la recherche du Dr. Kramer.

Une région spécifique du cerveau de la mouche - connue sous le nom de « corps de champignon », le centre de l’apprentissage et de la mémoire - est assez similaire à celle des humains. Le cerveau de la mouche est beaucoup plus complexe que ce que la plupart des gens imagine, selon le Dr. Kramer, avec 75% de leurs gènes semblables aux nôtres.

« Beaucoup de gènes mutés chez des individus atteints de troubles neurologiques du développement sont impliqués dans la régulation épigénétique des gènes », poursuit-il. « Cela ne ressemble en rien à un cerveau de mammifère, mais les mécanismes moléculaires cellulaires de l’apprentissage et de la mémoire sont les mêmes chez les mouches et les humains. C’est donc un bon modèle pour l’étude des gènes. »

Le mâle courtise la femelle en faisant vibrant ses ailes comme parade nuptiale. Cependant, l’effort sera vain si la femelle vient récemment de s’accoupler, et elle rejettera toutes ses tentatives.

« Si un mâle courtise une femelle et qu’il ne réussit pas à s’accoupler pendant un certain temps, il apprend que poursuivre l’effort est inutile » explique le Dr. Kramer. « Si vous prenez alors ce mâle, qui a eu cette expérience négative, et le testez plus tard, il a alors un niveau inférieur de parade parce qu’il se souvient. Les mouches qui ont des mutations dans leurs gènes n’ont tout simplement pas appris et continuent de courtiser quoi qu’il en soit. »

Il veut étudier ce dernier groupe - ceux qui « ne reçoivent pas le message » - pour comprendre les mécanismes sous-jacents à ce processus décisionnel.

« C’est un point de départ pour comprendre ces troubles et comment ils régulent l’activité génétique dans le cerveau, dans le contexte de l’apprentissage et de la mémoire », déclare le Dr. Kramer. « Ces troubles (humains) sont très rares et ne suscitent pas beaucoup d’attention. C’est une étape à la fois. Nous trouverons quelque chose. »

Source :
Nouvelles de l’université de Western- 8 décembre 2016
http://news.westernu.ca/2016/12/fly-brain-idea-explores-memory-learning-disabilities/

Rédacteur :
Sophie DECAMPS – Chargée de Mission pour la Science et la Technologie à Toronto – sophie.decamps[a]diplomatie.gouv.fr