Cancer des voies aérodigestives supérieures liés au HPV & traitement laser

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Canada | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie | Médecine individualisée
19 février 2016

Des cliniciens, des chercheurs de l’université Dalhousie en Nouvelle-Ecosse ciblent une menace croissante de cancers des voies aérodigestives supérieures liés au HPV et proposent de privilégier un traitement au laser.

Des cliniciens, des chercheurs ciblent une menace croissante de cancers des voies aérodigestives supérieures liés au HPV

Une nouvelle vague de cancers émerge. Il s’agit d’un cancer agressif de la gorge et de la bouche causé par le virus du papillome humain- le même virus sexuellement transmissible qui entraîne le cancer du col de l’utérus- mais il affecte principalement des hommes dans la force de l’âge.

Les responsables de santé publique estiment que presque 90% de la population adulte est infectée par le papillomavirus humain. La majorité de la population adulte élimine le virus dans les 18 mois suivant la contamination ; on ignore pourquoi et comment il demeure et évolue en cancer dans d’autres cas.

Des chirurgiens, des médecins et des chercheurs à l’Ecole de médecine de l’université Dalhousie (Halifax, Nouvelle-Ecosse) s’efforcent de mieux comprendre, traiter et soigner ces cancers de la gorge et de la bouche liés au HPV, dont les taux ont plus que quadrupler dans les seules dix dernières années. « On prévoit une augmentation du taux de cancers oropharyngés jusqu’à au moins 2030, avant une stabilisation et une baisse au fur et à mesure que de plus en plus de personnes sont vaccinées contre le virus », remarque le Dr Matthew Rigby, professeur associé à la division d’otolaryngologie du département de chirurgie de l’Ecole de médecine de Dalhousie et chirurgien des voies aérodigestives supérieures au Centre des sciences de la santé QEII.

Les jeunes filles de Grade 7 (équivalent de la 5ème en France) sont vaccinées en Nouvelle-Ecosse depuis 2007 pour les protéger du cancer du col utérin ; cette année, les jeunes garçons de Grade 7 ont commencé à se faire vacciner contre le risque de cancers de la gorge et de la bouche. « Dans l’intervalle, nous avons fait face à un nombre croissant de patients plus jeunes, principalement des hommes, à traiter pour ce type de cancer. » ajoute Dr Rigby.

Les cancers buccaux HPV-positifs tendent à se développer à la base de la langue, des amygdales, du palais mou ou à l’arrière de la gorge, partie connue sous le nom d’oropharynx. Cela les rend plus difficile à détecter que les cancers proches de l’avant de la bouche, souvent identifiés par les dentistes et les hygiénistes dentaires. De plus, contrairement au cancer du col utérin, il n’existe pas de test de dépistage pour les cancers de la gorge.

« Le premier symptôme relevé par de nombreux hommes pour ce type de cancer est une grosseur alors qu’ils se rasent », précise le Dr Rigby. « Cela signifie que le cancer s’est déjà propagé aux ganglions lymphatiques au moment où ils vont consulter un médecin. »

En tête au Canada pour la chirurgie au laser pour les cancers

Dr. Rigby fait partie d’un petit nombre de chirurgiens au Canada - de fait, en Amérique du Nord- qui a la formation et les compétences nécessaires pour enlever les tumeurs de l’arrière de la bouche et la gorge avec un faisceau laser.

« Beaucoup de centres en Europe utilisent des lasers pour enlever les cancers de l’oropharynx, et quelques centres aux États-Unis, mais nous sommes le seul centre au Canada qui utilise la chirurgie au laser à grande échelle pour éliminer les grosses tumeurs de la base de la langue et d’autres zones de l’oropharynx », explique le Dr Rigby. « Il serait impossible de manœuvrer un scalpel dans cette zone, en passant au travers de la bouche, mais on peut y arriver en toute sécurité avec des lasers. »

Dr Rigby a appris l’art de la microchirurgie endoscopique au laser à la clinique Mayo à Scottsdale, en Arizona. L’un de ses mentors Dal, le Dr Mark Taylor, est aussi un expert, formé dans un autre centre des Etats-Unis, l’Université de Washington à St. Louis, Missouri. Drs. Rigby et Taylor sont formateurs à leur tour maintenant pour cette technique chirurgicale de pointe à Halifax, qui offre de nombreux avantages pour les patients.

« Le point du faisceau laser soude en même temps qu’il coupe le tissu, ce qui réduit de manière substantielle le saignement et accélère le processus de cicatrisation » explique le Dr Rigby. « Contrairement aux procédures qui requièrent de fendre la mâchoire et de la déplacer pour atteindre la tumeur, la convalescence post-opératoire est beaucoup plus rapide et présente moins de complications et de problèmes à long-terme. »

En l’absence de l’option chirurgie au laser, les patients atteints de cancers de la gorge et la bouche de pointe sont généralement traités par radiothérapie et chimiothérapie. Les cancers oropharyngés HPV répondent très bien à ces traitements, mais leur toxicité peuvent laisser des patients avec des problèmes à long terme de déglutition, de perte de sens du goût, de mastication et / ou de parole. La chimiothérapie peut également endommager les reins, l’ouïe, et les nerfs des mains et des pieds.

Dr Rigby et ses collègues de l’Equipe cancer des voies aérodigestives supérieures du Centre de soins en santé QEII recommandent de plus en plus la chirurgie au laser comme première étape du traitement, afin de réduire l’exposition aux radiations dont un patient a besoin et potentiellement éviter totalement la chimiothérapie. En impliquant un pathologiste pour l’examen des tissus alors qu’ils sont réséqués, pendant la chirurgie, l’équipe espère assurer l’ablation chirurgicale la plus minutieuse des tissus cancéreux potentiels.

« Notre objectif, en tant qu’équipe, est de guérir ces cancers, tout en préservant les fonctions importantes des patients, » précise le Dr Rigby, qui a commencé à amasser une base de données des traitements des cancers des voies aérodigestives supérieures et de leurs résultats en 2004, alors qu’il était encore étudiant en médecine. Il continue de construire et d’analyser cette base de données désormais étendue. « Notre étude et les résultats d’autres études suggèrent que l’utilisation de la chirurgie au laser dans un premier temps améliore les résultats fonctionnels à long terme. »

A la recherche des traitements d’avenir

Alors que le Dr Rigby et ses collègues cherchent à améliorer les résultats des traitements disponibles aujourd’hui, un autre chirurgien spécialiste, le Dr Robert Hart, est à la recherche d’indices pour les traitements de demain. Il travaille avec un professeur de pharmacologie de l’université Dalhousie, le Dr James Fawcett, et un professeur de pathologie, le Dr Martin Bullock, pour apprendre comment le HPV favorise la croissance des cancers de la bouche et de la gorge.

« Nous recherchons les voies moléculaires qui mènent de l’infection au HPV au cancer de l’oropharynx, afin d’identifier avec précision les protéines impliquées, ce qu’elles peuvent nous révéler sur le niveau de progression ou d’agressivité d’un cancer, et comment le cancer peut être mieux traité, » explique le Dr Hart.

Le Département de chirurgie de Dalhousie a attribué aux Dr Hart et Fawcett 50.000 $ pour démêler la chaîne d’événements moléculaires qui se produisent dans les cellules qui tapissent la bouche et de la gorge, une fois qu’elles ont été infectées par le HPV. Ils examinent des tissus cancéreux humains qui leur sont fournis par le Dr Bullock, et tracent le développement du cancer dans des lignées cellulaires et des modèles de souris.

« Nous voyons le potentiel pour des thérapies à base d’anticorps qui ciblent une voie clé que nous avons identifiée, connue sous le nom de ‘’hippo pathway," explique le Dr Fawcett, « Pour des patients atteints de cancer des voies aérodigestives supérieures lié au HPV qui ont besoin d’une intervention chirurgicale importante, de radiothérapie et de chimiothérapie, des traitements plus ciblés pourraient réduire considérablement la nécessité de faire appel à des procédures plus traumatiques et coûteuses. »

Source :
Dal News 1er février 2016 : http://www.dal.ca/news/2016/02/01/dal-clinicians--scientists-target-growing-menace-of-hpvrelated-t.html- Melanie Jollymore

Rédacteur :
Armelle Chataigner-Guidez, Assistante du Conseiller pour la Scienc e& la Technologie, Ambassade de France au Canada- armelle.chataigner-guidez[a]diplomatie.gouv.fr