L’Université de Vienne travaille à une alternative au pétrole grâce aux déchets des usines à papier

Le directeur de l’Institut, Alexander Bismarck, et son équipe ont mis au point un procédé permettant d’utiliser la matière dérivée issue de la cuisson de la production de papier comme matériau semblable à celle du plastique, mais en étant durable et respectueuse de l’environnement. Cette matière, appelée « la liqueur noire » ou « l’or noir », contient de grandes quantités de lignine, une biomolécule provenant de la cellulose du bois et véritable réserve à carbone.

La lignine possède une importante résistance à la traction et une grande élasticité, qui pourraient lui permettre d’être utilisée pour la fabrication de polymère. Bien que ces propriétés soient connues de longue date, les lignines nettoyées n’étaient jusqu’alors pas utilisées par l’industrie chimique, car le processus de nettoyage complexe et nécessaire opère une solidification de la matière. En raison de son grand taux en carbone, elles étaient alors seulement utilisées comme combustible par les usines à papier.

Le travail des chercheurs viennois, soutenu par le Fonds autrichien pour la science (FWF), montre qu’il est possible d’utiliser la lignine directement sans avoir besoin de la nettoyer. En utilisant un procédé utilisant de l’épichlorohydrine, dont le brevet a récemment été déposé, les chercheurs ont réussi à créer de la résine fait de lignine. Cette dernière associée à des fibres de carbone peut permettre de créer des polymères utilisés pour des constructions légères et résistantes dans divers secteurs de l’industrie, comme pour le secteur automobile. Le point faible de ce nouveau procédé reste néanmoins l’utilisation de l’épichlorohydrine, qui est un dérivé du pétrole. Afin d’établir une résine de lignine durable et respectueuse de l’environnement, l’équipe du Professeur Bismarck souhaite utiliser prochainement une épichlorohydrine issue de matières premières renouvelables.

Par ailleurs, la ressource en lignine est importante et peu coûteuse. En Europe, plus de 100 000 tonnes de liquide noire sont produites chaque année et la production d’une tonne de cet « or noir » coûte moins de 100 euros. Le directeur du groupe de recherche souligne cependant que renoncer complétement au pétrole semble encore très compliqué, même si une grande partie de la matière plastique peut être fabriquée en utilisant de la matière durable. Mais ce projet de recherche offre une vision : « Nous pouvons imaginer qu’un jour, nous trouverons des champignons qui pourront construire des polymères tout en étant comestibles, mais cela reste au futur de nous dire si cela est possible », comme l’a rappelé le Professeur Bismarck.

Source :

• Die Presse, Alternative au pétrole : l’or noir de l’usine de papier, 09.09.2023 (format papier, en allemand)

Rédactrice : Emeline Ogereau, emeline.ogereau[at]diplomatie.gouv.fr - http:/at.ambafrance.org.