L’appel à projets des « 1.000 idées » récompense les projets de recherche originaux : entretien avec Frédéric Berger, chercheur français lauréat

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Autriche | Politiques de recherche, technologiques et universitaires | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
31 août 2020

Le Fonds autrichien pour la science (FWF) a annoncé l’octroi de 24 bourses finançant des projets risqués. L’Institut français d’Autriche a rencontré Frédéric Berger, biologiste français spécialiste des relations épigénétiques et lauréat de cet appel à projets pilote.

Le programme « 1.000 idées » : nouvel appel à projets du Fonds autrichien pour la science

Le Fonds autrichien pour la science (FWF) a dévoilé fin juillet les lauréats d’un appel à projets pilote lancé en novembre 2019. Il s’agit du programme « 1.000 idées » (1.000-Ideen Programm) qui finance des projets scientifiques risqués ou jugés particulièrement originaux, et qui comportent un fort potentiel en termes d’avancées scientifiques ou d’impact sur la société. Selon Frédéric Berger, chercheur à l’Institut Gregor Mendel de biologie végétale moléculaire au sein de l’Académie autrichienne des sciences (ÖAW) et lauréat d’une de ces bourses, avec ce programme, « les chercheurs sont incités à aller à la frontière de ce qu’ils font ».

Les financements accordés s’échelonnent de 100.000 à 150.000 euros par projet sur une période pouvant aller jusqu’à 24 mois.

Le Fonds autrichien pour la science est l’une des principales agences de financement de la recherche en Autriche. Elle se caractérise par sa volonté de financer la recherche fondamentale, une attention à l’international, puisque que le FWF propose de nombreuses bourses bilatérales ou multilatérales, dont l’ANR-FWF en partenariat avec l’Agence Nationale de la Recherche, et une prédominance d’appels à projets non-thématiques, afin de laisser aux chercheurs le soin de choisir les sujets sur lesquels se pencher.

24 projets lauréats sélectionnés par le FWF

A l’issue du premier appel à projets du programme 1.000 idées, 24 projets ont été sélectionnés parmi 306 candidatures. Ils bénéficieront d’un financement à hauteur de 3,4 millions d’euros.

Le communiqué de presse du Fonds autrichien de la recherche présente plusieurs projets lauréats, en insistant sur la diversité des domaines concernés. Parmi les lauréats se trouvent par exemple Karin Albrecht-Schgör (Université de médecine d’Innsbruck) dont le projet porte sur de nouveaux traitements du paludisme ; Ariane Sadjed (Académie autrichienne des sciences) propose une analyse comparative des expériences et des biographies de personnes appartenant à des minorités religieuses juives et musulmanes en Autriche ; Jan Steinbrener (Université de Klagenfurt) qui utilise l’intelligence artificielle pour que des drones apprennent d’eux-mêmes à voler ; Toma Susi (Université de Vienne), qui étudie l’atome de positronium pour faire avancer les connaissances de physique de l’antimatière ; ou encore Adelheid Woehrer (Université de médecine de Vienne) qui étudie les tumeurs cancéreuses et cherche à savoir comment celles-ci évoluent.

Frédéric Berger coordonne un projet qui explore les possibilités des histones, les protéines associées à l’ADN

L’Institut français d’Autriche a rencontré Frédéric Berger, chercheur français dont le projet a été sélectionné par le FWF. Pour Frédéric Berger, le programme des 1.000 idées de la FWF est intéressant, car il lui permet de financer un projet de recherche avec moins de résultats préliminaires qu’un appel à projets classique.

Frédéric Berger a rejoint l’Académie autrichienne des sciences en 2013, après avoir travaillé 10 ans à Singapore. Ses travaux de recherche portent en particulier sur les histones, qui sont les protéines, autour desquelles l’ADN est enveloppé, et qui « sont un soutien du génome, mais surtout sont essentielles dans sa régulation », explique Frédéric Berger.

On sait que les quatre familles d’histones présentent des variants (c’est-à-dire qu’une séquence de cette histone diffère des histones conventionnelles), qui jouent un rôle très important puisqu’ils changent les propriétés des nucléosomes (formés par huit histones et un segments d’ADN). Au cours de l’évolution, ces variants se sont diversifiés et leur combinaison a produit de nouvelles formes de régulation propres aux plantes et mammifères. ces régulations sont absentes chez les organismes les plus simples comme la levure, un modèle très utilisé par les biologistes pour faire un travail d’ingénierie du vivant. Frédéric Berger et son équipe sont déjà parvenus à de premiers résultats en reproduisant le type de régulation associé à un variant des plantes dans les levures. Le projet présenté au FWF consiste à étendre les études réalisées à d’autres variants et à utiliser la levure pour produire des milliers de nouveaux variants pour permettre de rejouer en accéléré l’évolution des histones et comprendre l’origine de variants des plantes.

Par ailleurs, les chercheurs vont aussi aller au-delà de l’évolution et créer in vitro des variants non naturels et qui possèdent des propriétés encore inexistantes à ce jour, mais utiles pour effectuer des manipulations en laboratoire ou intéressantes en biotechnologie. Ce projet de recherche fondamental et exploratoire porte le nom « Un nouveau code épigénétique » (Ein neuartiger epigenetischer Code).

La liste complète des bénéficiaires de ce programme est disponible en ligne.

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Image de nucléosome obtenue en collaboration avec Hitoshi Kurumizaka (Université de Tokyo)

Pour en savoir plus :

Sources :