La recherche médicale australienne s’attaque au Covid-19 : retour sur 3 mois d’avancées scientifiques

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Australie | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
17 avril 2020

Cet article revient de manière chronologique sur les avancées et premières mondiales réalisées par les instituts australiens dans la recherche sur le Covid-19, en s’intéressant à trois axes particuliers : la compréhension du virus, l’élaboration d’un vaccin et la recherche sur les traitements médicaux.

Trois organismes de recherche australiens se distinguent dans la recherche menée sur le Covid 19. Ces organismes ont été parmi les premiers à faire état d’avancées significatives concernant le développement d’un vaccin ou d’un traitement contre le COVID-19. Il s’agit du Pete Doherty Institute for Infection and Immunity à Melbourne (une joint-venture entre l’université de Melbourne et le Royal Melbourne Hospital), l’Australian Institute for Bioengineering and Nanotechnology de l’Université du Queensland, et le laboratoire australien de haute-sécurité de santé animale (AAHL) du CSIRO à Geelong.

Les sciences médicales représentent en 2019 un quart des co-publications entre la France et l’Australie avec près de 827 articles publiés. C’est aussi un domaine pour lequel l’Australie se démarque par le nombre et la qualité de ses publications.

1. Compréhension du virus

  • Le 29 janvier, le Peter Doherty Institute for Infection and Immunity à Melbourne a été le premier institut de recherche à parvenir à reproduire le virus en laboratoire (culture cellulaire) hors de Chine. Puis le 10 février, l’université de Sydney et le ministère de la santé de Nouvelle Galles du Sud (NSW Health) ont annoncé la culture du virus depuis des échantillons de patients australiens infectés. Leurs résultats partagés avec l’OMS, faciliteront le développement d’outils de diagnostic du virus.
  • Le CSIRO a établi avec succès un modèle biologique en février 2020, le premier au monde à confirmer que les furets réagissent au SRAS-CoV-2 (le virus qui cause le COVID-19). Les chercheurs ont rapidement progressé dans l’étude de l’évolution de l’infection chez les animaux - une étape cruciale pour comprendre si un vaccin fonctionnera.
  • Le 16 mars, La professeur Katherine Kedzierska du Pete Doherty Institute (Melbourne) a annoncé des progrès importants sur l’étude des mécanismes immunitaires face au SARS-CoV2. Elle a découvert que le système immunitaire des malades réagissait au coronavirus de la même manière que lorsqu’il combat la grippe. Les résultats de son étude ont été publiés dans la revue Nature.
  • On peut relever aussi les 4 publications dans Cell et Nature du professeur Edward Holmes, virologue évolutionniste au Charles Perkins Center de l’Université de Sydney. Ces travaux furent parmi les premiers à décrire le code génétique du SARS-Cov2 et de l’origine possible du virus chez le pangolin.

2. Elaboration d’un vaccin

  • Les équipes de l’université du Queensland ont débuté leurs travaux dès le 11 janvier, sitôt la séquence du génome mise à disposition en ligne sur internet par les scientifiques chinois.
  • Le 24 janvier, l’Université du Queensland intègre l’un des trois seuls programmes au monde, et le seul en Australie, initié par la Coalition for Epidemic Preparedness Innovations (CEPI), qui utilise des plateformes de "réponse rapide" en réponse à l’épidémie de coronavirus. 14.7m$ ont été investi initialement dans le projet. On estime entre 20 et 30m$ les fonds nécessaires pour lancer la production de vaccins.
  • Le 14 mars, après avoir expérimenté 250 formulations différentes, Dr. Keith Chappell, Dr. Daniel Watterson et les professeurs Paul Young et Trent Munro de l’Australian Institute for Bioengineering and Nanotechnology de l’Université du Queensland (St Lucia campus) ont déterminé un vaccin potentiel, le S-Spike. Ils ont utilisé pour cela la technique de clampage moléculaire, une technique mise au point à l’université du Queensland par le Dr. Chappell et le Dr. Watterson (voir encadré pour plus d’information).
Le clampage moléculaire
Le clampage moléculaire : Un virus est composé d’une enveloppe – lipidique - renfermant de l’ADN ou de l’ARN qui lui sert à se répliquer et donc survivre. Le virus, pour se répliquer, a besoin d’infecter les cellules d’un organisme et de détourner le mécanisme de réplication de l’ADN/ARN de son hôte en y insérant son propre ARN ou ADN. La surface du virus COVID-19 est hérissée de protéines dites "piques", enroulées comme des ressorts jusqu’à ce qu’elles se lient à une cellule hôte et s’y insèrent. La technique de clampage moléculaire, utilise une molécule créée en laboratoire (polypeptide) qui va venir se fixer sur la protéine « pique » pour la maintenir en position enroulée. Les protéines « piques » ne peuvent donc plus se lier à une cellule hôte pour l’infecter, le virus est ainsi rendu inoffensif, laissant le système immunitaire le soin de la cibler. Un adjuvant, est ensuite ajouté au vaccin pour stimuler la réponse immunitaire.
  • Les instances universitaires de l’Université du Queensland ont validé l’approche à double voie des chercheurs : dans l’attente des résultats sur l’homme qui confirmeraient l’efficacité du vaccin sur le virus, les chercheurs sont en négociation avec les agences de régulation européennes et américaines, pour approuver la production de vaccins à grande échelle. L’efficacité du vaccin produit a été démontré face au virus à l’origine du Syndrome Respiratoire mortel du Moyen-Orient (MERS-Cov). Une équipe de l’Institut Doherty travaille à son tour à confirmer l’efficacité du vaccin in vitro, dans le cadre du partenariat entre l’Université de Melbourne, l’Université du Queensland et le CSIRO.
  • L’usine de vaccins du CSIRO à Clayton ouvre la voie à une production à grande échelle, tandis que des sociétés pharmaceutiques, dont l’Australienne CSL-Seqirus et la multinationale britannique GlaxoSmithKline ont proposé leurs adjuvants (substance administrée avec le vaccin qui stimule et/ou renforce le système immunitaire).
  • Le 2 avril, Le CSIRO a débuté la phase I de tests pour deux vaccins potentiels au sein du laboratoire de haute-sécurité de santé animale (AAHL) à Geelong. Les deux candidats au vaccin sont issus de l’Université d’Oxford (Royaume-Uni) et de Inovio Pharmaceuticals Inc. (US). Les tests devraient prendre 3 mois.
  • Le 3 avril, une équipe de recherche de Flinders University (Adelaïde) en collaboration avec la société australienne Vaxine a débuté les tests pour un nouveau vaccin contre le SRAS-COV2. L’équipe du Prof. Nikolai Petrovsky, qui est également le directeur scientifique de Vaxine, utilise la technologie fournie par la société Oracle pour analyser l’interaction entre la protéine « pointe » et le récepteur humain permettant au virus d’infecter le patient.

3. Traitements médicaux

  • Le 16 mars, le professeur David Paterson, directeur du Centre de recherche clinique de l’Université du Queensland, a annoncé qu’ils étaient parvenu à éliminer le virus in vitro en combinant deux médicaments : la Chloroquine et le Lopinavir, qui sont actuellement utilisés pour traiter respectivement la malaria et le VIH. Des essais pharmaceutiques à plus grande échelle sur l’homme devraient débuter d’ici la fin du mois.
  • Le 27 mars, Le Murdoch Children’s Research Institute (Melbourne), débute les tests d’un vaccin anti-tuberculose (développé il y a plus de 100 ans) sur près de 4000 employés des hôpitaux afin de déterminer précisément s’il permet d’atténuer la gravité des symptômes du COVID-19. Administré à plus de 130 millions de nouveau nés chaque année, le BCG renforce également l’immunité de "première ligne" des humains, en les entraînant à répondre aux intrusions microbiennes avec une plus grande intensité.
  • Le 30 mars, DetectED-X, spin off de l’université de Sydney, spécialisé dans l’analyse d’image pour la détection du cancer du sein réoriente son activité et met à disposition en ligne et gratuitement des outils d’aide au diagnostic du COVID-19. DetectED-X est une plateforme d’analyse d’image (CT scan), qui permet d’aider les cliniciens à détecter les cas de COVID-19 beaucoup plus rapidement. Donnant ses résultats en 1 à 2h, cette plateforme peut être indispensable dans les hôpitaux où le nombre de radiologistes est insuffisant face au nombre de patients.

Plus d’informations sur les recherches du CSIRO

Plus d’informations sur les recherches du Murdoch Institute

Plus d’informations sur les recherches de l’Université de Sydney

Plus d’informations sur les recherches du Walter and Elisa Hall Institute

Plus d’informations sur les recherches de l’Université de Melbourne

Plus d’informations sur les recherches de l’Université du Queensland