Financements de la recherche australienne pour 2021

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Australie | Politiques de recherche, technologiques et universitaires
7 avril 2021

L’ARC, ou Australian Research Council, est l’agence de financement de la recherche australienne. En novembre et décembre 2020, les sélections des programmes annuels de l’agence ont été annoncées.

Le programme de financement des projets de découverte (Discovery projects)

Ce programme a vocation à soutenir une recherche d’excellence menée par un chercheur ou une équipe de recherche. Avec un budget de 260 millions de dollars, 603 projets ont été sélectionnés.

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Avec 41 millions de dollars australiens soit 16% du budget total du programme, les sciences sociales et humaines (comprenant culture, sociologie, psychologie, droit, politique et économie) occupent la première place du programme. De nombreux projets lauréats étudient la culture aborigène, australienne, d’Asie-Pacifique, ou du monde (art, langue, littérature, musique, photographies, télévision, théâtre ou histoire, mais aussi évolution des mœurs, chocs interculturels et racisme). Les projets traitant de psychologie s’intéressent aux réactions émotionnelles et à leur régulation, mais aussi aux addictions, et aux troubles de la santé mentale (anxiété, suicide). Une dizaine de projets se penchent sur le problème de la violence (physique, sexuelle ou émotionnelle), et sur la sexualité et le sexisme. Les projets en sociologie étudient les liens tissés dans nos sociétés (liens familiaux, média sociaux, exclusions et manifestations sociales, engagement individuel et collectif…), et dans les milieux professionnels et de l’enseignement (diversité des personnes et des activités, bien-être, exclusion, travail d’équipe, ou leviers de l’efficacité ou de la motivation). Des projets transversaux étudient les tendances économiques de la société (inégalités, évolution et impact du marché du travail, rôle des acteurs sociaux, mutation des PME…), celles de la législation (cour criminelle, déportations, pratiques en cas d’apatridie…) ainsi que celles de la politique (résilience des démocraties et menaces, négociation et cartographie de la paix, confiance dans les politiques et campagnes, despotisme…). Enfin, quelques projets mènent des recherches sur les crises, l’environnement, ou l’urbanisme.

Les projets en sciences médicales et de santé représentent un budget de 39 millions de dollars (15% du budget). De nombreuses recherches explorent les processus moléculaires qui agissent sur le comportement ou la fonction des cellules (régulation du système immunitaire, rôle des protéines ou des lipides dans le métabolisme…). Le système nerveux fait également l’objet de nombreuses recherches (mécanismes cognitifs régissant le sommeil, l’appétit, le désir, les addictions, les prises de décision, l’apprentissage ou la mémoire, mécanismes de régénération cérébrale…). Dans le domaine de la santé publique, les maladies infectieuses, la flore intestinale et les maladies mentales seront explorées. Les recherches concernant l’impact sur la santé des facteurs extérieurs tels qu’environnement ou situation sociale sont également financées (aérosols, changements environnementaux et sociétaux, résistance aux antibiotiques, stress…). Enfin, dans le domaine de l’ingénierie médicale, les recherches portent sur de nouvelles technologies de l’imagerie (imagerie hyper spectrale, IRM assistée par intelligence artificielle, imagerie fantôme (ghost-imaging)), ainsi que sur les technologies pharmaceutiques ou d’implants médicaux par impression de biomatériaux.

La biologie occupe une part importante des projets, avec 35 millions de dollars (13% du budget). Une vingtaine de projets s’intéressent à la génétique et aux biotechnologies, (fonction et manipulation des protéines, compréhension et régulation de l’expression génétique, hétéroplasmie, édition génétique pour la production de molécules bioactives…). Des projets de biologie cellulaire explorent les processus de communication, transport, ou mort cellulaires. Les liens avec l’environnement sont également étudiés, ainsi que les mécanismes d’évolution (influence des changements environnementaux sur le génome ou l’évolution cellulaire, mécanismes de diversification, mécanismes d’évolution génétique…). Enfin, l’étude des communautés microbiennes et la lutte contre la contamination par biofilms, et enfin la neuroscience et la biologie cognitive viennent compléter les recherches dans le domaine de la biologie.

Les projets reliés à l’environnement et la science de la Terre représentent un budget de 29 millions de dollars (11%). Ces projets étudient les grands phénomènes atmosphériques ou marins, modélisent la dynamique des écosystèmes ou des flux de carbone, définissent des stratégies de gestion des espaces, de lutte contre la pollution ou de préservation des espèces, ou encore s’intéressent à l’histoire et à l’évolution des espèces et de la biodiversité. L’impact du changement climatique et les stratégies pour l’atténuer seront particulièrement étudiés (feux de forêts, acidification des océans, vagues de chaleur, montée des eaux, puits de carbone, séquestration du carbone…).

De nombreux projets transversaux développent des systèmes techniques dans le domaine de l’ingénierie. Ces projets représentent 23 millions de dollars (9% du budget) et s’intéressent principalement aux nouveaux matériaux (fabrication additive, catalyseurs chimiques, couches de protection anticorrosives ou anti-bactériologiques, matériaux souples pour l’électronique et la robotique, matériaux nanostructurés…), à l’industrie de fabrication (résistance et géométries des constructions, technologies de découpe, de refroidissement, d’évaluation non destructive de l’état d’une structure…), et aux senseurs à l’échelle micro- ou nanoscopique pour des applications en physique ou en biologie. On note également quelques projets sur l’impression 3D de microstructures, l’ingénierie de télécommunication, et l’aéronautique (études des turbulences, des interactions flux-matériaux…).

Les projets visant à faire progresser les technologies numériques représentent un budget de 22 millions de dollars (8%). Parmi eux l’effort se porte principalement sur les algorithmes de traitement de données, et l’amélioration des moteurs de recherche (stockage, classification, contrôle, extraction, analyse, et dynamique de données). L’intelligence artificielle et la robotique occupent également une part importante des recherches (vision, perception de l’espace, ou prise de décision artificielles, mais aussi senseurs, réseaux cyber-physiques, collaboration homme-machine…). Quelques projets s’intéressent à la cyber-sécurité et la protection des données privées, ainsi qu’à la relation homme-plateformes numériques.

Les projets de recherche pour l’innovation agricole représentent 15 millions de dollars australiens (6%) et sont très largement tournés vers l’étude du génome en vue de comprendre et contrôler les propriétés et la productivité des cultures (signaux de croissance, de stress, mécanismes d’évolution et d’adaptation, de bio-diversification, d’absorption d’eau, de sucres, et de carbone, ou processus de synthèse de composés chimiques intéressants tels que biocarburants, huiles, bio-insecticides…). D’autres recherches concernent la lutte contre les infections du bétail ou contre les insectes invasifs des cultures, ou le cycle du carbone passant par les plantes et les sols.

Financées à hauteur de 11 millions de dollars (4% du budget), les projets sur l’énergie sont tournés vers la recherche de solutions pratiques aux enjeux énergétiques. Ils explorent de nouveaux matériaux pour en améliorer les propriétés selon la demande des technologies de l’énergie (catalyseurs, réseaux électroniques de puissance ou réseaux intelligents, dispositifs photovoltaïques organiques, photo-condensateurs…). Le stockage de l’énergie représente une part importante des recherches, avec de nombreux projets sur les batteries. Les technologies de l’hydrogène sont également explorées, avec des projets sur la production d’hydrogène (à partir d’énergies renouvelables ou de lignite), mais aussi le stockage et le transport de l’hydrogène. Plus rares sont les projets qui étudient de nouvelles sources d’énergie telles que la conversion thermoélectrique ou la photosynthèse.

Enfin, les domaines de la physique (physique théorique, nucléaire, physique des particules et des matériaux…), des mathématiques, de la chimie, de l’économie, de l’astronomie (cosmologie, astrophysique, étoiles) et des technologies quantiques, sont financées chacun à environ 2% du budget total du programme.

La majorité de ces projets devraient initier des collaborations internationales, dont 24% avec les Etats-Unis, 12% avec le Royaume Uni, 9% avec l’Allemagne, 5% avec le Canada, 4.5% avec la Chine, et presque 4% avec la France.

Le programme de financement des projets de découverte jeunes chercheurs (Discovery Early Career Researcher Award)

Ce programme a vocation à soutenir les travaux de jeunes chercheurs ou chercheuses dans des domaines prioritaires. Avec un budget de 84 millions de dollars, 200 projets ont été sélectionnés en 2020.

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Là encore, les sciences sociales et humaines occupent la première place du programme avec un financement de 24 millions de dollars (29% du budget). Les études s’intéressent aux mécanismes sociaux au niveau mondial (accords multilatéraux, islamophobie, patrimoine commun de l’humanité), ou lors d’événements spécifiques (déplacements prolongés de populations, catastrophes naturelles), ou encore au sein des communautés et des individus (intégration de la diversité, différences hommes-femmes, solitude, mécanismes cognitifs). Les changements sociétaux sont également étudiés (impact des média sociaux sur l’image des femmes ou l’éducation, influence étrangère en particulier de la Chine, réformes structurelles des gouvernements, consommation éthique…). L’éducation et le système éducatif sont des objets d’études très importants du domaine (violence scolaire, discipline, utilisation d’outils intelligents, philanthropie, développement des STEM…). Enfin, des recherches transdisciplinaires associeront les sciences sociales et humaines avec les sciences de l’environnement, du numérique de l’économie ou de la santé.

L’ingénierie sera financée à hauteur de 11 millions de dollars (13% du budget), principalement pour des recherches sur les matériaux (matériaux de protection, alliages métalliques, catalyseurs, matériaux micro ou nano structurés…) et sur les senseurs (imagerie médicale, laser, sondes de structure ou d’état de matériaux ou de constructions). Le reste des recherches s’intéressera aux constellations d’objets connectés, ou au contrôle des propriétés lumineuses pour les systèmes optiques.

La recherche environnementale représente 10 millions de dollars (12% du budget) et est principalement tournée vers l’étude et l’atténuation des effets du changement climatique (études des carottes glaciaires antarctiques ou himalayennes, simulations de l’impact des changements sur les forêts, l’antarctique, les flux de nutriments marins, évolution des régimes de feux, mais aussi étude de la séquestration du carbone atmosphérique par réactions lumineuses, par matériaux manufacturés, ou par des organismes naturels…). Le reste des projets se consacrera aux moyens de préservation des écosystèmes (pollution de l’eau et de l’air, gestion des récifs coralliens, pêche…), et à la gestion de l’eau douce dans un contexte incertain.

Les projets en sciences médicales et de santé représentent un financement de 7 millions de dollars (9%). Ils concernent en particulier la santé publique (alimentation, longévité, programmes de santé), les maladies infectieuses (immunologie, fonctionnement du système immunitaire, modélisation génétique des maladies infectieuses), et la neuroscience (infection rabique, vieillissement, système sensoriel et cognitif, interfaces système nerveux-machine).

L’énergie reste un sujet de recherche important avec un financement de 4.6 millions de dollars (5%). On remarque un certain nombre de projets visant à exploiter la lumière solaire (pour produire de l’hydrogène, en particulier), ou visant à améliorer les systèmes de stockage (batteries), ou de conversion et de distribution de l’énergie.

Financés avec 4.4 millions de dollars (5%), les projets pour l’innovation agricole sont très orientés vers les biotechnologies, comme dans le programme des projets de découverte. Les recherches concernent les mécanismes de nutrition, d’adaptation (à la sécheresse en particulier), de signalisation du stress, de reproduction, ou de résistance aux maladies, afin d’améliorer l’adaptation et la productivité des cultures.

Les technologies numériques sont financées à presque 4 millions de dollars (4%) par le programme. Les recherches sont principalement tournées vers le traitement de données numériques, la communication, et la sécurité.

Enfin, les sciences fondamentales (physique, astronomie, biologie, chimie, et mathématiques) sont financées à hauteur de 13.5 millions de dollars, soit 16% du budget total du programme. En astronomie, les recherches s’orientent vers l’étude des exo planètes et de la matière noire. En biologie, les études du génome, de son expression, sa transmission et son évolution bénéficient d’un soutien important. Les recherches en mathématiques ont souvent un intérêt pour les algorithmes numériques. Enfin, on notera 4 projets concernant les technologies quantiques, financés à hauteur de 1.5 millions de dollars.

La France fait partie des partenaires de l’Australie sur ces projets de recherche dans 4% des collaborations qui impliquent des partenaires à l’étranger, derrière les Etats-Unis, le Royaume Unis, l’Allemagne, la Chine, la Hollande et la Canada.

Le programme de financement des infrastructures et équipement de recherche, (LIEF - Linkage Infrastructure, Equipment and Facilities)

Avec un budget total de 38,8 millions de dollars australiens, ce programme a retenu 47 projets.

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Un grand nombre de projets (43% des projets, correspondant à un financement de 14,5 millions de dollars) devraient renforcer les capacités australiennes en matière de mesure et d’analyse de structures microscopiques ou nanoscopiques. L’Australie va ainsi développer ses équipements de Cryo-microscopie électronique pour la caractérisation de matériaux à l’échelle atomique, ou de structures moléculaires et macromoléculaires ; ses plateformes de cristallographie et de spectrométrie de masse pour les études de chimie, de nouveaux matériaux, ou les analyses environnementales ; ou encore ses outils de spectroscopie, avec en particulier un programme de modernisation et d’amélioration des infrastructures de spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (spectroscopie RMN). Des équipements de mesure et d’analyse de l’état magnétique des matériaux à l’échelle nanoscopique devraient être développés pour permettre des avancées dans les domaines des matériaux et dispositifs de pointe et des technologies quantiques. Enfin, des équipements d’analyse de processus dynamiques, par microscopie à fluorescence, microscopie à trois photons ou échanges hydrogène-deutérium, devraient permettre d’explorer la communication intercellulaires, ou encore la structure et la dynamique des protéines.

L’Australie développe également le domaine de la fabrication de matériaux de pointe, (19% des projets correspondant à un financement de 5,3 millions de dollars) avec un microscope à faisceaux, une imprimante 3D à deux photons, le développement d’une plateforme de photolithographie, des technologies de synthèse par combustion, ainsi que les technologies permettant le dépôt de quantités de matière de l’échelle du femto-litre ou d’éléments de circuits nanoscopiques pour la réalisation de matériaux et de dispositifs multifonction aux structures nanométriques (circuits supraconducteurs, biomatériaux, électro-catalyseurs, dispositifs optoélectroniques, systèmes micro-électroniques…).

Les infrastructures pour l’astrophysique sont également financées dans ce programme (10% des projets correspondant à un financement de 8,2 millions de dollars). Le partenariat international LIGO bénéficiera de 3 millions de dollars australiens pour développer la sensibilité de la détection des ondes gravitationnelles. D’autres infrastructures de mesures telles que celle des sursauts radio rapides, de la datation par gaz nobles, ou le réseau de télescopes Cherenkov sont également financés. Enfin, l’Australie renouvelle son adhésion au programme de physique des accélérateurs (presque 2 millions de dollars australiens).

Le domaine de l’environnement remporte également 10% des projets et un financement de 6,2 millions de dollars, avec l’instauration d’un réseau d’observatoires pour étudier les processus environnementaux, le développement d’une banque de données pour répertorier les spécimens australiens, et des équipements d’imagerie pour explorer la structure sous-terraine proche de la surface de la terre. Enfin, l’Australie renouvelle sa participation au programme international de découverte des Océans (International Ocean Discovery Program) à 3 millions de dollars pour 18 mois.

Quelques projets de sciences sociales et humaines seront également financés par le programme, pour un montant total de 2,1 millions de dollars, principalement pour l’établissement de banques de données visant à faciliter l’étude des arts vivants, de la culture, des langues aborigènes et des lois.

Un seul projet concerne l’industrie spatiale, le spacecraft innovation laboratory qui devrait aider à la conception et au test des mini-satellites australiens. Enfin, un projet se penche sur la robotique pour l’automatisation de tâches d’assemblage ou de construction.

Certains de ces projets préfigurent des collaborations avec des partenaires internationaux. Parmi ces collaborateurs, 15% sont aux USA, 12% en Allemagne, 11% en Angleterre, 9% en Chine… La France est présente avec 2% des collaborateurs sur ces projets d’infrastructure de recherche.