Quelles sont les missions juridiques du ministère ?
Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE) représente la France devant les juridictions internationales et européennes, conseille sur les questions juridiques de droit international ou européen, accompagne les négociations et gère la procédure de ratification et d’entrée en vigueur des accords et traités engageant la France.
Ces missions de la diplomatie française, peu connues du grand public, permettent d’assurer la cohérence et la coordination de la politique étrangère de la France, et en particulier de sa politique juridique extérieure auprès de nombreuses instances juridiques internationales.
La fonction de conseil juridique
Assurer une expertise juridique en droit international et européen
Le ministère assume une fonction de conseil juridique de l’action interne ou internationale du gouvernement, notamment en répondant à toutes questions émanant des autres ministères.
L’expertise juridique du ministère est sollicitée sur de nombreux sujets en lien avec l’actualité.
En matière de maintien de la paix et de sécurité internationales, il peut s’agir, par exemple, dans le cadre de l’emploi de la force armée, du respect du droit international humanitaire.
C’est également le cas, à la suite du Brexit, des questions d’interprétation et de mise en œuvre de l’accord de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne et de l’accord de commerce et de coopération entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.
Compte tenu de l’importance stratégique, environnementale et économique des océans, son expertise juridique est également de plus en plus recherchée sur des questions touchant à l’application et l’interprétation de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, dite convention de Montego Bay, signée en Jamaïque le 10 décembre 1982.
En outre, le ministère suit et fournit une expertise juridique sur les questions relatives aux affaires civiles et pénales internationales ainsi qu’à la justice pénale internationale. Cette expertise concerne, en particulier, les principales juridictions et instances internationales dédiées à la lutte contre l’impunité des auteurs de crimes de droit international (génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre), au premier rang desquelles la Cour pénale internationale (CPI). En tant que point de contact institutionnel et opérationnel, la direction des affaires juridiques du MEAE traite les demandes de coopération avec les juridictions pénales internationales.
Enfin, le MEAE se mobilise, en lien avec le ministère de la Justice, sur le thème de l’influence par le droit, en cohérence avec la feuille de route de l’influence de la diplomatie française. Cette action permet notamment de défendre la place du modèle juridique français – dit de droit continental ou « romano-germanique » – dans un contexte de concurrence croissante avec d’autres modèles juridiques dans les relations internationales. En effet, le droit continental se caractérise notamment par une primauté de la norme écrite, garantissant l’accessibilité, la sécurité et la prévisibilité de la règle applicable. Par la stabilité juridique qu’il génère, le droit continental se révèle propice à la protection des citoyens en garantissant l’État de droit. Il favorise aussi le développement des activités économiques.
La fonction de négociation
Conduire les délégations françaises dans certaines institutions internationales
Sur certains sujets qui demandent une expertise juridique particulière, la direction des affaires juridiques est responsable de la conduite de la délégation française dans les institutions internationales compétentes.
La direction représente ainsi la France :
- dans les comités sur les questions de droit international public aux Nations unies ,unies,
- au Conseil de l’Europe et dans les comités du Conseil de l’Europe dans le domaine des droits de l’homme,
- au sein de l’Union européenne dans les groupes de travail du Conseil.
Le ministère préside également la délégation française auprès du Groupe d’États contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe au sein duquel il assure la défense de la France dans le cadre des procédures d’évaluation, écrites et orales, dont elle fait régulièrement l’objet.
De la même manière, en lien étroit avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés, il conduit la délégation française au sein du comité de suivi de la convention sur la protection des données à caractère personnel (Convention 108).
Le Droit de la mer et le droit maritime et fluvial
Le MEAE est particulièrement impliqué dans les enceintes traitant de questions relatives au droit de la mer et au droit maritime. Il suit ainsi les travaux de l’Organisation maritime internationale (OMI) et représente en particulier la France au sein du comité juridique. Il conduit la délégation au sein de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) ainsi que les négociations, sous l’égide des Nations unies, pour l’élaboration d’un accord juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (accord dit « BBNJ »), et dont la conclusion est espérée en 2022.
Cette action intègre la conduite de outre la délégation de la France au sein de la Commission centrale pour la navigation sur le Rhin, qui est la plus ancienne organisation internationale.
Enfin, le MEAE est compétent à l’égard de toutes questions relatives aux pôles. Il conduit ainsi la délégation française dans le cadre des réunions consultatives du traité sur l’Antarctique (RCTA), dont la France a organisé la 43e édition en 2021 à Paris, ou à la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR). Il suit aussi les travaux du Conseil arctique où la France a un statut d’observateur.
En savoir plus sur la France en Antarctique.
Le suivi des accords et traités
Le ministère assure l’analyse des projets d’accord et traités bilatéraux. Ces textes concrétisent la politique étrangère de la France et portent sur des domaines très variés comme la coopération en matière de sécurité et de défense, judiciaire, fiscale, éducative, culturelle ou encore sur la protection de l’environnement ou le développement économique.
Il instruit également les demandes de pouvoirs pour habiliter des représentants du gouvernement à signer des accords et traités, ou siéger, négocier et voter lors de réunions ou conférences internationales. Il porte les projets de lois autorisant le gouvernement à ratifier ou approuver les accords et traités, en lien avec les autres ministères concernés, et à chaque étape de la procédure (Conseil d’État, Conseil des ministres et Parlement). Il est également chargé de la publication des accords et traités dès leur entrée en vigueur et assure un suivi particulier des traités multilatéraux dont la France est dépositaire.
Pour en savoir plus sur le suivi des accords et traités, voir notre page dédiée à ce sujet.
La fonction contentieuse
Le ministère, via sa direction des affaires juridiques, est chargé de la représentation de la France devant toutes les juridictions internationales, européennes et arbitrales.
Représenter la France devant les juridictions internationales et arbitrales
Le ministère représente la France devant les juridictions internationales, comme la Cour internationale de Justice (CIJ). Par exemple, dans l’affaire Guinée équatoriale c. France portant sur le droit diplomatique, la CIJ a rendu un arrêt le 11 décembre 2020 donnant raison à la France.
En savoir plus sur la Cour Internationale de Justice.
Représenter la France devant les juridictions de l’Union européenne
À travers cette action, la France s’attache à être présente et active devant la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) et le Tribunal de l’Union européenne.
Au sein de ces instances, le gouvernement français mène une stratégie globale de promotion de l’interprétation du droit la plus conforme à sa vision pour l’Europe. C’est la raison pour laquelle la France intervient dans de nombreux contentieux qui concernent d’autres États membres, mais qui soulèvent des questions de droit intéressant la construction européenne dans son ensemble.
Plus d’informations sur la France et la Cour de Justice de l’Union européenne.
Représenter la France devant la Cour européenne des droits de l’Homme et d’autres comités conventionnels
Le ministère assure la défense de la France devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).
En savoir plus sur La France et la Cour européenne des droits de l’Homme.
Il représente la France devant d’autres organismes intergouvernementaux, tels que le Comité des droits de l’Homme ou le Comité des droits de l’enfant. Ces comités réceptionnent des plaintes individuelles et, pour certains, des visites de terrain pour contrôler l’application par la France des conventions de protection des droit de l’Homme.
La direction des affaires juridiques
Au sein du MEAE, ces missions sont portées par la direction des affaires juridiques qui est composée de diplomates juristes, de magistrats administratifs et judiciaires et d’experts juridiques. Elle s’articule autour de quatre dimensions principales, traitées chacune par une sous-direction :
- droit international public,
- droit de l’Union européenne et droit international économique,
- droits de l’Homme,
- et droit de la mer, droit fluvial et des pôles.
La mission des accords et traités assure en outre le suivi des procédures relatives aux accords et traités signés par la France.
En outre, deux magistrats chargés de mission, traitent des questions de justice pénale internationale, de corruption, et de coopération civile et pénale.
Par ailleurs, un soutien juridique en droit interne au ministère et à ses agents est assuré par la sous-direction des affaires juridiques internes (service distinct de la direction des affaires juridiques).
Publication : juillet 2022