Israël/Territoires palestiniens - Entretien de Christophe Lemoine, porte-parole du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, avec "France Info" (23 mai 2025)

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Q - Bonjour Christophe Lemoine, porte-parole du ministère des affaires étrangères. La France se retrouve pointée du doigt par les autorités israéliennes, parfois à demi-mot, parfois très clairement, comme ici. Ecoutez les mots de l’ambassadeur d’Israël à Washington hier.

(…)

Voilà des mots violents, Christophe Lemoine. Est-ce que la France a une part de responsabilité dans la montée de l’antisémitisme ?

R - Ce sont des mots très violents, mais ce sont surtout des mots outranciers. S’agissant de la lutte contre l’antisémitisme, je pense qu’il a toujours été clair de la part des autorités françaises qu’il y avait une condamnation sans appel et ferme. Condamnation des actes antisémites en France, condamnation des actes antisémites à l’étranger. La France a condamné très fermement l’assassinat hier de deux diplomates israéliens. La France avait condamné de manière très ferme les massacres qui ont eu lieu le 7 octobre.

Q - Mais vous voyez la musique qui monte de la part d’Israël sur… La France est très en pointe dans la critique, la France menace de sanctions, la France - et c’est ce qui semble cristalliser le mécontentement - oeuvre pour une possible reconnaissance d’un Etat de Palestine. D’ailleurs, est-ce que cette initiative, vous envisagez de la mettre en pause ?

R - Mais la France n’est pas critique ; la France est constructive sur ce sujet. La France essaye depuis le début de pousser pour une solution diplomatique, pour la résolution du conflit. Il n’y a pas de voie par une réponse sécuritaire. La voie pour trouver une solution au problème…

Q - La reconnaissance de l’Etat de Palestine ne serait pas justement une réponse, selon Israël ?

R - C’est une réponse politique. La réponse à la question est une solution politique. Donc il n’y a pas de critique dans les propos français ; il y a simplement une attitude constructive. La France s’est toujours montrée ouverte pour aider à trouver une solution, et cette solution doit être de toute façon politique.

Q - Mais quand même le ton de la France semble avoir changé, notamment depuis le début du mois de mars, le moment où Israël a arrêté, a empêché, a commencé à empêcher l’arrivée d’aide humanitaire à Gaza. Vous nous confirmez quand même que la France a haussé un petit peu le ton ?

R - La situation sur le terrain est caractérisée par deux choses. Il y a une escalade de la part de l’armée israélienne des opérations à Gaza. Et ça, ça a été vu très clairement. Et deuxièmement, il y a un sujet qui est absolument clair, c’est l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza. Il faut absolument que l’aide humanitaire puisse rentrer. La situation des populations civiles est abominable et il faut qu’Israël laisse entrer l’aide humanitaire. Donc ces deux points ont effectivement justifié les dernières déclarations, notamment du Président de la République.

Q - Sur ce sujet, quelques dizaines de camions qui ont pu arriver quand même ces derniers jours, 68 camions déchargés hier, avec notamment de la farine. Est-ce que c’est… Vous dites : "la France dit c’est bien, mais c’est insuffisant" ?

R - Mais c’est insuffisant. L’aide humanitaire à Gaza… Il faut que l’accès soit libre et massif, encore une fois. Il y a une situation humanitaire qui est absolument dramatique. Il faut que les camions puissent entrer dans la bande de Gaza.

Q - Il y a quand même ce qu’il y a autour de Gaza, évidemment, de la reconnaissance d’un Etat palestinien, les mots qui sont échangés. On est dans une situation… Enfin, la France est dans une situation de crise diplomatique vis-à-vis d’Israël ou ce sont simplement des tensions passagères ?

R - La situation, comme vous le décrivez, est assez complexe et tendue sur le terrain. Encore une fois, la France s’est toujours montrée disposée à aider, à être constructive sur cette question et je pense qu’elle continuera à l’être.

Q - Vous évoquez, la France évoque la possibilité de sanctions. De quelle nature seraient ces sanctions contre Israël ? Il y a déjà eu des sanctions contre les colons, on le sait.

R - Oui, le Président de la République a dit en début de semaine qu’il y aurait des mesures qui pourraient être prises. Ce sont des mesures qui sont à l’étude. Il y a différentes mesures, d’ailleurs, qui peuvent être prises. Il y a les sanctions évidemment. Mais il y a aussi d’autres mesures diplomatiques, du type de celles qu’a annoncé Kaja Kallas, la Haute Représentante, mardi à Bruxelles de révision de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël. C’est aussi une autre possibilité.

Q - Est-ce que la France redoute, à l’inverse, des sanctions venues d’Israël ? Des sanctions de la part d’Israël ?

R - On n’a pas d’informations sur ce sujet.

Q - Certains parlent par exemple de la fermeture du consulat de France à Jérusalem, ou alors de reprendre une des possessions françaises à Jérusalem.

R - Sur ce dernier point, nous, on n’a pas d’informations officielles.

Q - On parle du Tombeau des Rois.

R - On n’a pas d’informations officielles. Je note aussi que l’ambassadeur d’Israël en France hier a démenti cette information en disant que c’était une fake news. La situation des possessions françaises en Israël est assez claire. Mais on n’a pas d’informations sur le sujet.

Q - Donc la France ne redoute pas de sanctions de la part d’Israël ?

R - Encore une fois, je pense que dans la situation, il faut être constructifs et se montrer constructifs. C’est ce que nous allons faire avec une conférence qui va être organisée en juin sur la solution à deux Etats, que nous coprésidons avec l’Arabie saoudite à l’ONU à New York. Encore une fois, il s’agit d’être constructifs et d’essayer de trouver une issue à cette situation qui est absolument impossible sur le terrain.

Q - Merci à vous Christophe Lemoine, porte-parole du ministère des affaires étrangères, d’avoir été avec nous ce matin sur "France Info".