Entretien bilatéral avec Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères du Canada (19 janvier 2022)
Je suis très heureux de recevoir ma nouvelle collègue canadienne, Mélanie Joly, pour des échanges que nous aurons ce soir sur notre relation bilatérale ainsi que sur les principaux dossiers de politique étrangère d’intérêt commun.
Le Canada est pour la France un partenaire de grande confiance, un allié au sein de l’OTAN, nous avons avec le Canada une relation que nous voulons renforcer, nous voulons renforcer notre dialogue politique et nous voulons renforcer notre dialogue stratégique. Nous entretenons une relation fondée sur des liens historiques forts, et sur des valeurs partagées et une langue commune. Nous sommes fondamentalement attachés au multilatéralisme et nous sommes convaincus que les défis de notre temps appellent des réponses globales et concertées.
La question des tensions actuelles avec la Russie sera évidemment au cœur de nos échanges ce soir, surtout que Mélanie vient de faire un déplacement en Ukraine. Ce sujet, vous le savez, a été au cœur des échanges très substantiels que j’ai eus en fin de semaine dernière avec l’ensemble de mes collègues de l’Union européenne à Brest. Je veux rappeler ce soir trois priorités que nous poursuivons et qui ont formé l’approche d’une très grande convergence des Européens lors de ces échanges.
Premièrement, nous sommes prêts et déterminés à imposer des conséquences massives et un coût sévère en cas de nouvelle agression militaire contre l’Ukraine. Je le redis ce soir, personne ne doit se méprendre sur la crédibilité de cette position exprimée de manière unie par les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne en décembre dernier. Nous aurons l’occasion lundi prochain, lors de la réunion des ministres des affaires étrangères de l’Union européenne à Bruxelles, à la suite de la réunion de Brest, de discuter en détail de ce sujet.
Tout doit être fait, deuxièmement, pour éviter de devoir en arriver là. Et donc notre deuxième priorité est de poursuivre un dialogue exigeant avec la Russie, sur la base des réunions intervenues dans différents formats la semaine dernière. Nous savons les quatre sujets qui doivent être sur la table :
- la réaffirmation des grands principes de la sécurité européenne issus d’Helsinki et de la Charte de Paris en 1990 ;
- la question de la maîtrise des armements, qu’ils soient nucléaires ou conventionnels, et notamment des forces nucléaires intermédiaires ;
- la question de la prévisibilité et de la transparence des activités militaires ;
- la mise en œuvre des accords de Minsk discutée en format Normandie.
Nous restons prêts à ce dialogue – nous souhaitons que la Russie le soit aussi. Les échanges qui auront lieu vendredi à Genève entre mon collègue américain et M. Lavrov seront utiles et importants de ce point de vue. Nous avons pour notre part partagé avec nos alliés et partenaires sur chacun de ces quatre grands sujets nos propres priorités, reflétant les intérêts de sécurité des Européens, afin de nourrir ce dialogue collectif, mais ce dialogue exigeant avec Moscou.
Enfin, dans ce contexte de tension grave et significative, il est indispensable que nous maintenions une coordination extrêmement étroite avec nos alliés et partenaires. Ce sera aussi l’objet de notre échange de ce soir, mais aussi de la réunion très importante à laquelle je participerai demain matin à Berlin dans le cadre du Quad avant les échanges russo-américains de vendredi. Nous en reparlerons également lundi au Conseil des ministres des Affaires étrangères à Bruxelles. Cette coordination reste indispensable. Elle est nécessaire car rien qui concerne la sécurité européenne ne peut se discuter et se décider sans la pleine implication des Européens.
Nos discussions d’aujourd’hui porteront aussi sur le Sahel où le Canada soutient le dispositif Barkhane dans le cadre de son opération Fréquence. Nous allons également évoquer d’autres sujets stratégiques pour nous comme l’Indopacifique.
Nous évoquerons aussi une autre crise régionale, la situation en Haïti, sur laquelle nous partageons la volonté de proposer des solutions. La France, comme le Canada et d’autres pays de la région, soutiennent les efforts des autorités haïtiennes visant à favoriser l’émergence d’un consensus politique en vue d’une sortie de crise. Mais Haïti compte aussi sur ses alliés. À ce titre, je salue l’organisation de la conférence ministérielle organisée le 21 janvier, vendredi, sous la présidence du Canada, à laquelle je participerai.
Enfin, nous évoquerons évidemment, Mélanie et moi, les relations bilatérales, qui sont denses, qui sont confiantes, un peu perturbées par la pandémie, mais il n’empêche que nous devons les poursuivre et la signature ce jour d’un accord relatif au déploiement des agents de sûreté en vol témoigne de la qualité de notre coopération en matière de lutte contre le terrorisme.
Chère Mélanie, je suis ravie de vous recevoir à Paris, je vous souhaite la bienvenue et je me réjouis des échanges importants que nous aurons ce soir.
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