Arabie saoudite - Conférence ministérielle de la Coalition internationale contre Daech - Intervention en session plénière de Catherine Colonna (Riyad, 8 juin 2023)

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=Seul le prononcé fait foi=

Monsieur le Ministre [prince Faisal bin Farhan Al Saud],

Monsieur le Secrétaire d’Etat [Antony Blinken],

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Excellences, chers collègues.

Je tiens tout d’abord à remercier l’Arabie saoudite et les États-Unis pour l’organisation de cette conférence. Dans les temps difficiles que nous vivons, nous avons tendance à nous focaliser sur les grands bouleversements géopolitiques qui dominent l’actualité : le retour de la guerre sur le continent européen, la violation par certains États des principes fondamentaux du droit international ou encore la remise en cause de notre système multilatéral. Mais ces développements, aussi graves soient-ils, ne sauraient nous conduire à oublier que les défis du terrorisme demeurent immenses et nous imposent de poursuivre nos efforts collectifs, aussi bien militaires que civils.

Je souhaite insister sur quatre messages :

Le Levant reste la région la plus impactée par la menace de Daech, et doit demeurer au coeur de l’action que nous menons dans le cadre de cette Coalition, aux côtés du gouvernement irakien, du Gouvernement régional du Kurdistan d’Irak et des Forces démocratiques syriennes. Il est impératif de prévenir tout risque de déstabilisation dans la région, qui serait immanquablement exploité par Daech, en particulier dans le Nord-Est syrien. Je le dis avec gravité, en tant que ministre d’un pays qui a, dans un passé récent, souffert de la menace terroriste : nous ne pouvons risquer de mettre en danger les acquis si durement gagnés de la lutte que nous menons depuis 2014 contre le terrorisme djihadiste au Levant. Ni le régime de Damas, ni la Russie, ni l’Iran ne mèneront ce combat à notre place.

Nous devons renforcer nos efforts en matière de stabilisation pour éviter que les zones libérées ne soient à nouveau réinvesties par Daech. La France allouera donc, en 2023, 86,5 millions d’euros pour des actions humanitaires et de stabilisation en Irak et en Syrie. Il s’agit d’un effort important, qui vient en complément des montants déjà mobilisés depuis 2017 : 132 millions d’euros pour le Nord-Est syrien et 166 millions pour l’Irak. Le soutien à la stabilisation doit également s’accompagner d’un effort spécifique concernant les camps du Nord-Est syrien où la situation est aussi intenable d’un point de vue humanitaire qu’elle est dangereuse d’un point de vue sécuritaire. C’est dans cette logique que la France a procédé, au cours des 18 derniers mois, au rapatriement de 144 mineurs accompagnés de 47 mères, tout en mettant en place des procédures robustes de prise en charge et de judiciarisation.

L’extension du champ d’action de notre Coalition au continent africain est nécessaire compte tenu de l’évolution de la menace qu’y porte Daech, comme Al-Qaïda d’ailleurs. Le fait que le Togo nous rejoigne aujourd’hui comme 86ème membre est le signe que cette évolution, réalisée dans une démarche partenariale avec les pays africains et complémentaire avec les structures existantes, comme la Coalition pour le Sahel, porte ses fruits. Il confirme également la pertinence d’une stratégie centrée sur la sécurité des populations, la bonne gouvernance et le respect des droits humains. Car lorsque ces principes fondamentaux ne sont pas respectés, ce sont systématiquement les groupes terroristes qui en bénéficient. On le voit aujourd’hui avec le groupe Wagner qui a érigé les exactions de masse en principe cardinal de son action au Mali et en République centrafricaine.

Enfin, nous devons porter une attention renouvelée au théâtre afghan où la menace portée par l’État Islamique au Khorasan prend de l’ampleur et aider nos partenaires centre-asiatiques, dont plusieurs sont présents aujourd’hui, à y répondre. L’Afghanistan redevient un sanctuaire du terrorisme sous un régime Taliban qui n’a pas rompu ses liens avec le djihad global et multiplie les violations des droits fondamentaux ainsi que de ses engagements internationaux. Je tenais ici à souligner un écueil que nous devons éviter : croire que nous pouvons travailler à la lutte contre le terrorisme en Afghanistan sans nous soucier du sort des femmes. La politique de ségrégation menée par les talibans ruine le pays et le plonge dans l’obscurantisme. Ce faisant, il fait le lit des terrorismes et des extrémismes. Nous devons donc nous mobiliser sur l’ensemble des fronts.

Je vous remercie./.

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