Q&R - Point de presse live (22.05.25)

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Q - Bonjour, j’ai une question sur le Tombeau des Rois à Jérusalem, parce qu’il y a un communiqué de presse du ministre israélien Gideon Saar, du ministre des Affaires étrangères, qui dit que ce site qui est contrôlé par la France, je pense, depuis longtemps, qui fait partie du domaine national français en Terre sainte, devrait repasser sous contrôle israélien, et ce serait pour Jerusalem Day, qui est dans quelques jours. Donc je me demandais s’il y avait une réaction à ça.

R - Nous n’avons pas connaissance d’une démarche officielle israélienne en ce sens. Je vous rappelle que les domaines nationaux relèvent de la propriété de l’État français, et cette propriété est reconnue tant par Israël que par l’Autorité palestinienne par le biais d’accords internationaux. À Jérusalem, la France possède depuis le XIXe siècle - s’agissant du site que vous citez depuis 1886 - quatre domaines nationaux, des sites religieux, chrétiens et juifs, dont la propriété a été reconnue par l’État d’Israël à sa création en 1948.

Q - « Il existe un lien direct entre l’incitation à la haine antisémite et anti-israélienne et ce meurtre, le meurtre de Washington. Cette incitation est également le fait de dirigeants et de responsables de nombreux pays et organisations internationales, particulièrement en Europe. » C’est la déclaration du ministre israélien des Affaires étrangères aujourd’hui. Quelle est votre réaction ?

R - D’abord, je rappelle que nous avons toujours condamné tout acte antisémite ou toute action ou volonté de mise en danger de l’État d’Israël. Je vous rappellerai aussi que nous avons toujours de manière constante, et je l’ai refait il y a quelques minutes, condamné les actes odieux du 7 octobre 2023. Et nous sommes, dans ce cadre, aux côtés du peuple israélien qui a fait face à un acte terroriste d’une barbarie inédite. Mais les propos que vous rappelez sont des propos parfaitement outranciers et parfaitement injustifiés. La France a condamné, la France condamne et la France continuera à condamner toujours et sans ambiguïté tout acte antisémite. C’est ce que nous avons fait et c’est ce que je viens de faire à la lecture de cette déclaration. Il n’y a aucune ambiguïté sur le sujet. Le ministre de l’Intérieur a d’ailleurs donné instruction ce jour aux préfets de renforcer la sécurité des lieux liés à la communauté juive de France. Voilà ce que je peux vous dire de ces propos.

Q - Les accusations de la part de plusieurs représentants de la Russie concernant des ingérences de la France dans les élections présidentielles en Roumanie ont continué les derniers jours, même si les résultats ont été reconnus officiellement. Avez-vous une réaction à ces propos ?

R - Nous avons dénoncé ces allégations, qui sont totalement infondées. Et je le répète ici, les allégations qui circulent sur une prétendue ingérence de la France dans le scrutin présidentiel roumain sont totalement infondées. La France rejette catégoriquement ces allégations et elle appelle chacun à ses responsabilités, mais surtout au respect de la démocratie roumaine.

Q - J’ai plusieurs questions. La première concerne l’Iran. Un nouveau cycle de discussion va se tenir entre l’Iran et les États-Unis, ce vendredi à Rome. Je voulais savoir si ça serait précédé par une réunion avec les Européens. Est-ce qu’on peut avoir des éléments sur la réunion précédente entre les Européens et l’Iran ?

S’agissant de la conférence des deux États à New York en juin, Je voulais avoir la confirmation qu’il y aurait une réunion à Paris qui précéderait cette conférence, et qui y réunirait plutôt des personnes de la société civile palestinienne et israélienne, si vous pouvez nous en dire plus.

Et toujours sur cette conférence, est-ce que vous pouvez nous confirmer qu’Israël n’a pas été officiellement invitée à New York ?

R - Sur l’Iran, effectivement, ce sont des cycles de négociations qui sont en cours. Il y a eu des réunions entre les trois Européens, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, avec l’Iran il y a quelques jours. Il y aura des cycles de discussion avec les Américains dans les jours à venir. C’est pour nous une bonne chose, puisque nous avons toujours prôné la voie diplomatique à la résolution de la crise de prolifération avec l’Iran. Nous avons toujours indiqué que la seule solution viable serait une solution négociée, alors que l’escalade nucléaire se poursuit. Nous avons un dialogue régulier, depuis septembre dernier, avec les Iraniens et les trois pays européens. Les Américains ont ouvert un dialogue de leur côté. Nous nous coordonnons avec eux. Nous espérons pouvoir obtenir un accord rapidement puisque, comme vous le savez, le calendrier se resserre et que la date butoir d’octobre, qui est une date définie par la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies, doit être la date à laquelle nous avons trouvé un nouvel accord.

Q - Mes questions étaient assez précises : je voulais savoir si la réunion de vendredi allait être précédée par une nouvelle réunion avec les Européens, et si on pouvait avoir du contenu de la réunion qui s’est déroulée entre les Européens et l’Iran la semaine dernière.

R - Je vous ai répondu sur le calendrier, c’est ce que je disais, il y a eu une réunion avec les Européens vendredi dernier, il y a eu une réunion avec les Américains vendredi.

Q - (inaudible).

R - Non, puisque la dernière date de vendredi. C’est un cycle de négociations qui continue. Il y a une réunion avec les Européens vendredi, la prochaine réunion est une réunion avec les Américains vendredi.

Et sur le contenu, je ne peux pas vous faire d’autres déclarations.
Sur vos autres questions, nous reviendrons vers vous avec plus de détails sur la conférence qui doit être organisée au mois de juin, qui est une conférence qui, je vous le rappelle, est issue d’un vote à l’Assemblée générale des Nations unies en novembre dernier, conférence qui va être coprésidée par la France et par l’Arabie saoudite. C’est une conférence où on travaillera sur quatre priorités. Encore une fois, un plan politique pour arriver à une solution à deux États, ce qui suppose effectivement un grand travail diplomatique pour envisager un avenir de stabilité à la bande de Gaza, avec des sous-questions que je pourrai détailler si vous le souhaitez. Tous les détails de cette conférence ne sont pas encore connus, et notamment les détails logistiques, tout particulièrement sur la question que vous me posez sur une éventuelle réunion de la société civile en amont. On sait que notre ambassadeur en Israël et notre Consul général étaient, il y a quelques jours, présents à une réunion de la société civile en faveur de la paix qui s’est tenue il y a quelques jours à Jérusalem, et c’est un point que nous avons salué. La société civile est un élément important de la solution, mais je ne peux pas vous confirmer encore la tenue ou non d’une éventuelle réunion spécifique.
Sur Israël, je vous rappelle que, comme je vous le disais, c’est une conférence qui est organisée dans le cadre onusien sur la base d’une résolution des Nations unies. Donc tous les États membres des Nations unies et membres de l’Assemblée générale des Nations unies pourront se joindre à cette conférence.

Q - La France avait dit qu’elle prendrait des mesures concrètes si Israël ne lève pas les restrictions concernant l’aide humanitaire à Gaza. Et 14.000 bébés pourraient mourir si l’aide humanitaire ne rentre pas à Gaza d’ici quelques heures. Face à ce risque, est-ce que la France va prendre ces mesures concrètes qu’elle a évoquées ? Et en quoi consistent ces mesures ? Est-ce que la France a pu rééchanger avec ses alliés concernant ces mesures ?

R - Effectivement, les modalités de distribution de l’aide humanitaire à Gaza telles qu’elles sont actuellement présentées par le gouvernement israélien ne sont pas satisfaisantes et nous y sommes totalement opposés. Elles contreviennent au droit international humanitaire, en prévoyant notamment des mesures de criblage des organisations qui peuvent délivrer, et des mesures de criblage sur les bénéficiaires. Encore une fois, l’aide humanitaire à Gaza doit pouvoir entrer librement, immédiatement et massivement afin de répondre aux besoins de la population Gazaouie. Comme l’a dit le Président de la République dans sa déclaration tripartite avec ses homologues britannique et canadien, il y a beaucoup de possibilités qui sont sur la table et qui sont en cours d’études. Il y a déjà des choses qui ont été faites. Encore une fois, je vous rappelle la décision qui a été prise au niveau des 27 de lancer une revue de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël. C’est un point important, puisque l’accord d’association, c’est l’accord-cadre des relations entre Israël et l’Union européenne, qui traite de dialogue politique, de coopération, mais aussi des sujets d’ordre commercial. Donc la revue qui va être lancée est extrêmement importante. Je vous rappelle que l’Union européenne est le premier marché d’Israël . Par ailleurs, il y a des options auxquelles nous avons déjà eu recours. Il y a les sanctions. La France a déjà pris des trains nationaux de sanctions. C’était, je ne sais pas si vous vous en souvenez, contre des colons violents en Cisjordanie. Ces mêmes trains de sanctions ont été dupliqués à Bruxelles. Il y a différentes choses qui sont à l’étude. Ce qui est certain, c’est que nous avons salué la déclaration de Mme [Kaja] Callas sur l’accord Union européenne-Israël, et nous participerons à ces discussions. Et nous sommes prêts, s’agissant des sanctions, à aller plus loin. Mais comme vous le savez, les sanctions se discutent au niveau européen. Il y a eu un Conseil des ministres des affaires étrangères européens mardi et évidemment, c’est un sujet qui a été évoqué. Donc nous considérons différentes options, mais il est certain, comme le disait le Président de la République, que des actions seront prises.

Q - J’ai deux questions. Sur les actions, la révision de l’accord d’association va prendre du temps. Malheureusement, comme vient de le mentionner ma collègue, il n’y a plus de temps. Cela fait un an et demi et les pertes sont énormes. Donc la question qui se pose : qu’attend aujourd’hui la France pour prendre ces actions ? Est-ce qu’il y a, je ne sais pas, un événement précis, vous attendez une ligne rouge qui soit franchie ? Parce que je pense que toutes les lignes rouges ont été franchies. Donc la question qui se pose, pourquoi ce ralenti dans la réponse à l’échelle européenne ?

Et la deuxième question, je reviens à la conférence de juin. Est-ce que la France s’attend à ce que le Liban et la Syrie reconnaissent l’état d’Israël pendant cette conférence ou dans les mois qui suivent ? Est-ce que c’est un objectif, surtout pour ces deux pays arabes qui ne reconnaissent toujours pas l’État d’Israël et qui ont été dans un état de guerre ?

R - La question de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, ainsi que la question des sanctions, sont des choses que nous devons discuter en format européen, puisque ce sont des décisions qui sont prises à 27. Je vous parlais d’une discussion qui a eu lieu mardi, elle continuera lors du prochain Conseil européen, mais nous sommes liés par le fait que nous sommes 27 et qu’il faut obtenir un accord à 27. Après, encore une fois, rien n’est exclu, on a déjà pris des sanctions à titre national, qui étaient des sanctions individuelles. Pour le moment, les choses sont à l’étude.

Sur votre point de la conférence de juin, c’était tout l’objet des propos du Président de la République, à savoir de considérer qu’avoir une solution à deux États, ça suppose d’avoir une reconnaissance de l’État de Palestine d’un côté et de l’État d’Israël de l’autre. Donc, bien évidemment, sur l’État de Palestine, vous connaissez sa position. Il a toujours dit qu’il n’y avait pas de tabou sur la reconnaissance de l’État de la Palestine et que cela devrait être fait au moment opportun, s’il y avait une fenêtre qui s’ouvrait. Dans l’autre sens, évidemment, il y a une question de reconnaissance réciproque, puisqu’il y a évidemment certains États, et notamment des États de la région, qui n’ont pas reconnu Israël, et là, je pense que le dialogue s’est ouvert aussi pour trouver un chemin de normalisation des relations avec Israël. Mais ce qui est certain, c’est que pour pouvoir envisager une solution à deux États, la question de la reconnaissance des États par les uns et par les autres est absolument cruciale. Vous citez deux pays, le Liban et la Syrie : ce sont des pays qui sont évidemment importants, puisque ce sont des pays frontaliers d’Israël. Mais cette logique de de normalisation des rapports entre ces pays et Israël vaut aussi pour d’autres pays de la région.

Q - Avez-vous des éléments sur la visite du ministre saoudien des Affaires étrangères à Paris demain ? Confirmez-vous déjà cette visite ? Et dans l’affirmative, est-ce qu’il y aura une conférence de presse à l’issue de l’entretien entre les deux ministres ?

R - Non, je ne peux pas vous confirmer la visite du ministre saoudien, demain à Paris. Et donc, de fait, je ne peux pas vous confirmer l’existence d’une séquence de presse.

Q - J’ai une question sur la guerre en Ukraine, suite à cet appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine et les commentaires qui sont sortis derrière. Où est-ce que vous voyez la situation et est-ce que vous considérez que c’était encore un exemple de Vladimir Poutine qui joue la montre, ou est-ce que vous voyez un certain mouvement, quelque chose qui pourrait débloquer la situation ?
R - On y voit plusieurs choses. Déjà, de la part des Russes, on y voit un langage assez hypocrite, au fond, puisque la Russie dit qu’elle veut une solution, mais fait tout et montre qu’elle ne veut pas la paix, Elle cherche à gagner du temps en poursuivant la guerre. Donc ça, c’est peut-être la première chose qu’on retient du comportement de Vladimir Poutine. Vous vous souvenez qu’il y a eu cette séquence à Istanbul où le président Zelensky avait invité le président Poutine à venir discuter directement. Il avait superbement ignoré l’invitation en envoyant une délégation de bas niveau. Donc encore une fois, tout ça s’inscrit un peu dans la même logique.

Nous retenons quand même que côté américain, il y a une volonté à pouvoir obtenir un cessez-le-feu rapidement, à voir la situation se régler de manière rapide. C’est un point sur lequel les Européens sont en accord, les Ukrainiens aussi, à savoir qu’il faut faire cesser cette guerre et il faut arriver dans une phase où nous puissions rentrer d’abord dans une phase de cessez-le-feu, et puis ensuite de discussion vers la négociation d’une paix avec des garanties stables et durables.

Avec nos partenaires européens, nous continuons à nous investir aux côtés de l’Ukraine pour la paix, mais nous continuons aussi à nous investir pour que nous puissions d’abord obtenir un cessez-le-feu et qu’ensuite nous puissions tenir des discussions qui permettent d’établir un plan de paix stable et durable, des discussions qui doivent avoir lieu avec les Ukrainiens, avec les Européens, puisque bien évidemment c’est une question qui concerne la sécurité de l’Europe.
Pour le moment, et c’est ce que disait le Ministre, il y a trois pièges dans lesquels il ne faut pas tomber pour le moment. Déjà, il ne faut pas négocier sous les bombes, nous avons un séquençage qui est très clair : nous devons d’abord obtenir un cessez-le-feu. Et ça, ça a été dit très clairement également par le président des États-Unis, et nous avons bien évidemment dit que nous étions tout à fait d’accord avec ça. Il ne peut pas y avoir de démilitarisation de l’Ukraine, donc c’est pour cette raison qu’il faut que nous soyons toujours en soutien de l’Ukraine. Et surtout, puisque ça a l’air d’être des conditions que semble poser Vladimir Poutine :il n’y aura pas de levée des sanctions pour ce qui nous concerne dès le début de la négociation. Nous nous tenons prêts, avec nos partenaires européens, soit à entrer dans une logique vertueuse de discussion sur un plan de paix ; soit, si cette logique vertueuse n’existe pas, à renforcer notre pression via le biais de sanctions massives si la Russie continue à esquiver les négociations comme elle le montre.

Q - Je voudrais revenir sur la conférence à New York sur les deux États. Cette semaine, Jean-Noël Barrot a dit que la France était déterminée à reconnaître un État de Palestine, mais vous avez rappelé que le président Macron met cette reconnaissance en balance avec la reconnaissance et la normalisation des relations d’Israël avec un certain nombre de pays voisins et de la région. Est-ce à dire que la décision de la France est prise pour reconnaître, quoi qu’il arrive, un État de Palestine, quand bien même il n’y aurait pas d’avancée et de reconnaissance officielle qui interviendrait de la part d’un certain nombre de pays de la région pour reconnaître Israël ?

R - Je ne sais pas s’il y a une logique de donnant-donnant en l’espèce. Je pense que qu’il doit y avoir une logique de mouvement. Il doit y avoir une dynamique en amont de cette conférence du mois de juin. Si on veut pouvoir parler de solution à deux États, il faut que ceux des États qui n’ont pas reconnu la Palestine reconnaissent, et ceux des États qui n’ont pas reconnu Israël enclenchent un mouvement de normalisation. Donc c’est dans ce contexte-là qu’il faut comprendre ce que je vous disais, en disant que la reconnaissance de la Palestine devait être utile et amener à des progrès concrets. Là, on a, lors de la conférence du mois de juin, un rassemblement d’États qui doit permettre de dégager une solution, c’est certainement une bonne occasion.