Q&R - Point de presse live (23 novembre 2023)

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Q - L’intensité des combats à la frontière entre le Liban et Israël est en train de s’accroître. Le ministre israélien de la Défense a menacé de raser des routes en disant, et je cite, « ce que nous pouvons faire à Gaza, nous pouvons le faire à Beyrouth ». Quelle est votre réaction ?

R - Nous appelons tous les acteurs à éviter l’escalade. Ces messages sont passés, comme je l’indiquais, aux autorités israéliennes, aux autorités libanaises, ainsi que par le biais de messages au Hezbollah et aux acteurs régionaux. Ce message est particulièrement important et doit être entendu de tous les acteurs impliqués.

Q - Vous avez évoqué tout à l’heure la visite du groupe de contact à l’Élysée. Est-ce que, parmi les conclusions qui ont pu être retirées, il y a celle d’une pression plus forte envers Tel-Aviv, pour qu’il y ait un cessez-le-feu ou au moins une trêve humanitaire, le plus vite possible ?

R - Comme je l’indiquais, il y a plusieurs sujets qui ont été évoqué avec le groupe de contact : à la fois la nécessité d’une libération immédiate et sans condition des otages, la nécessité de répondre effectivement à l’urgence humanitaire, pour laquelle nous estimons aujourd’hui que l’aide apportée n’est pas suffisante ; la nécessité de lutter contre le terrorisme tout en respectant le droit international et en assurant la protection des populations civiles ; et enfin, la nécessité d’avancer de façon décisive, comme le Président de la République l’a rappelé à maintes reprises, vers un horizon politique de paix et de sécurité, qui est le seul moyen viable de sortir de cette crise.

S’agissant de la trêve, vous savez quelle est la position de la France, nous appelons à une trêve. Nous avons salué l’accord qui est intervenu, nous appelons maintenant à ce qu’il soit mis en œuvre sans délai sur le terrain. Nous estimons que cette trêve droit être immédiate, soutenue, durable, et qu’elle doit pouvoir mener, en effet, à un cessez-le-feu, comme l’a rappelé encore la Ministre hier.

Tous ces points ont été évoqués avec les membres du groupe arabe et du groupe de suivi de Gaza. Vous savez que nous avons par ailleurs travaillé avec eux dans un certain nombre d’enceintes internationales, à commencer par le Conseil de sécurité des Nations unies, où siègent les Émirats arabes unis, ainsi qu’à l’Assemblée générale des Nations unies, ce qui nous a amené à voter un certain nombre de résolutions en commun. Ce travail se poursuit avec eux.

Q - Toujours sur le Proche-Orient, est-ce qu’on peut en savoir un peu plus sur les otages ? Selon nos informations, il y aurait potentiellement quatre Français parmi les otages qui pourraient être libérés. Est-ce que vous êtes en mesure de confirmer ? Et j’aimerais poser une deuxième question sur la présence virtuelle de Vladimir Poutine au G20 hier. Est-ce que cela veut dire que le président de la Fédération de Russie n’est plus au ban de la diplomatie internationale, qu’il y a un retour progressif à la normale ?

R - Sur la première question, malheureusement, comme vous l’imaginez bien, je ne peux pas rentrer dans davantage de détails, par respect pour les familles et pour protéger la confidentialité des discussions qui se tiennent aujourd’hui, et œuvrer dans un sens positif à leur aboutissement. Donc pas de confirmation.

Vous savez qu’il y a huit personnes françaises aujourd’hui disparues, dont nous savons avec certitude qu’un certain nombre d’entre eux sont otages aux mains du Hamas. Nous travaillons avec la plus grande énergie à obtenir leur libération. Comme la Ministre l’a indiqué hier, nous espérons qu’ils soient compris dans l’accord qui a été salué hier et signé hier. Nous espérons que cet accord vienne à être appliqué dans son intégralité, sans plus de délai.

S’agissant de la Russie, comme vous le savez, la Russie aujourd’hui a tout fait pour se mettre au ban de la communauté internationale. Nous avons pu le constater à maintes reprises et à l’occasion de maintes résolutions au Conseil de sécurité ou à l’Assemblée générale des Nations unies, où la Russie s’est trouvée, du fait de son agression illégale au regard du droit international, isolée sur ses positions, avec un tout petit nombre d’États. Cette situation ne change pas aujourd’hui.

Q - Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots sur les sujets qui vont être abordés par Mme la Ministre à Pékin, dont éventuellement une visite officielle du président chinois à Paris dans les mois qui viennent ?

R - En effet, la Ministre effectue deux jours de déplacement à Pékin. Il s’agit pour elle de s’inscrire dans le cadre de la visite d’État du Président de la République en Chine en avril. Vous savez qu’il y a trois types de dialogues qui étaient prévus dans le cadre de nos discussions bilatérales : le premier, un dialogue stratégique, qui s’est tenu au niveau des conseillers auprès des chefs d’État ; un dialogue économique, et Bruno le Maire s’est rendu récemment à Pékin pour le mener ; enfin, un échange qui portait sur tous les échanges humains entre nos deux pays, et quand je parle d’échanges humains, j’inclus la question des visas. Il s’agit de pouvoir reprendre des mobilités après la pandémie du Covid, qui avait très largement suspendu les échanges entre nos deux pays, mais également de pouvoir travailler à développer des échanges culturels, humains, universitaires, et de le faire de façon équilibrée et dans l’intérêt des deux pays.

Ce sera l’occasion pour la Ministre d’aborder d’autres questions et notamment le travail que nous menons avec la Chine comme avec d’autres partenaires sur les crises internationales. La Ministre évoquera toutes les crises que nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer, notamment celle au Proche-Orient. Enfin, nous évoquerons à cette occasion les futures échéances bilatérales, puisque vous savez que l’an prochain, nous célébrons les 60 ans de l’établissement des relations diplomatiques avec la Chine, et cela occasionnera toute une série d’événements, notamment culturels, en France et en Chine.

Et enfin, dernier point, puisque la COP28 est devant nous, il s’agira évidemment, avec les autorités chinoises et notamment avec le Premier ministre, puisque la Ministre rencontrera le Premier ministre chinois, d’évoquer le rôle de la Chine sur les questions d’enjeux globaux. Nous savons qu’il y a eu récemment un accord entre la Chine et les États-Unis sur les questions climatiques, qui est un signe encourageant, pour la COP28. Nous attendons des engagements ambitieux de ces deux partenaires, et notamment de la Chine, deux pays qui, comme vous le savez, sont les plus gros émetteurs de CO2 sur la planète. Vous savez que la Chine a été à la manœuvre sur les questions de biodiversité avec l’accord de Kunming, qui a été une avancée sur les questions de biodiversité. Nous travaillons sur tous ces aspects, ainsi que sur la capacité de la Chine à participer au financement de la transition écologique et au soutien des pays les plus vulnérables, dans le cadre du Nouveau pacte financier. Vous vous souviendrez qu’en juin, la Chine avait levé un certain nombre de créances sur un certain nombre de pays africains, qui y étaient particulièrement vulnérables.

Q - J’ai deux questions, totalement séparées. La première, c’est : est-ce qu’il y a des nouveaux éléments dans l’enquête judiciaire concernant les tags d’étoiles de David, qui pourraient indiquer une responsabilité d’un commanditaire étranger, notamment russe ? Et y a-t-il de nouveaux cas de ce type, ou le risque ?
Et l’autre, c’est concernant la France et Chammal : est-ce que Chammal est mobilisée, d’une quelconque manière, pour par exemple bloquer les tirs houthis sur Eilat, ou autre opération un peu dans le style de ce que font les forces américaines ?

R - Je crains que ces deux questions ne visent des ministères qui ne sont pas le mien. S’agissant des étoiles de David, vous savez qu’il y a une enquête judiciaire en cours et que par conséquent il ne me revient pas de commenter cette procédure judiciaire. Vous vous souviendrez que nous avions, avec l’agence Viginum en charge des ingérences numériques étrangères, indiqué qu’il y avait dans le relevé de détection sur les questions d’information, nous avions pu indiquer qu’il y avait une participation du réseau Recent Reliable News (RRN) qui est un réseau lié à des acteurs russes, et nous avions pu constater que ce réseau d’origine russe avait à la fois permis la primo-diffusion, c’est-à-dire que la première image de ces tags sur les murs du Xème arrondissement de Paris avait été pour origine ce réseau, et qu’ensuite ce réseau avait mis en place toute une série de bots, de robots, sur les réseaux sociaux, pour accélérer la dissémination de ces images. Nous avons condamné cette action, qui est tout à fait inacceptable. Nous avons exposé avec Viginum les éléments de preuves dont nous disposions. Vous savez que nous avons tout un travail en cours pour à la fois signaler aux plateformes ces agissements qui relèvent de volonté de déstabilisation et de générer des tensions dans nos sociétés. Nous avons aussi pris toute une série de mesures contre ce réseau, puisque nous avons déjà eu l’occasion de pouvoir attester d’actions déstabilisatrices contre un certain nombre de sites, à la fois gouvernementaux et de médias, en juin dernier, par le même réseau.

S’agissant de Chammal, je vous renvoie vers le ministère des Armées, puisqu’ils pourront vous répondre sur cette opération du ministère des Armées. Pour ce qui est du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, je vous renvoie à la déclaration que nous avons faite à cet égard, qui est très claire. Nous avons condamné de la façon la plus ferme les actes déstabilisateurs des Houthis. Rien ne doit venir empêcher la liberté de circulation. Vous savez que c’est notre position constante en la matière, et plus généralement, dans le cadre de la crise à laquelle nous faisons face au Proche-Orient, il s’agit d’éviter qu’aucun groupe ne cherche à tirer profit des tensions actuelles et à accélérer la logique d’escalade sur le terrain.

Q - Quelle est la réaction de la France aux résultats des élections législatives aux Pays-Bas, sachant que nous sommes à un peu plus de six mois des élections européennes ?

R - Nous avons pris note des résultats provisoires des élections législatives aux Pays-Bas. Nous attendons la formation du gouvernement de coalition. Vous savez que les Pays-Bas sont un partenaire essentiel de la France en Europe, sur toutes les questions qui sont les nôtres. Nous verrons avec quel gouvernement de coalition nous pourrons travailler à l’avenir.

Q - Retour au Liban, si vous le permettez. On parle d’un prochain voyage de M. Jean-Yves Le Drian, qui aurait déclaré « la guerre est aux portes du Liban ». Est-ce qu’on peut savoir s’il s’agit d’une visite pour faire face ou pour être présent du fait de la tension à la frontière, ou s’agit-il de la poursuite des efforts de M. Le Drian pour remédier au problème de la vacance présidentielle ?

R - Je n’ai, à ce stade, pas davantage de précisions à vous donner sur les dates des futurs déplacements de M. Jean-Yves Le Drian, représentant personnel du Président de la République pour le Liban. Comme vous le savez, de prochains déplacements sont en effet envisagés. Je pense que nous pourrons vous les préciser dans les jours à venir. Il est évident que la vacance présidentielle qui dure depuis trop longtemps au Liban fragilise encore plus le pays, dans un contexte de tensions extrêmement fortes, eu que nous ne pouvons qu’encourager encore plus vivement les acteurs libanais à faire preuve de responsabilité et à trouver un accord sur cette question. C’était le message passé par le représentant personnel du Président, M. Le Drian, hier, sur les médias français. Ce message est évidemment le nôtre aujourd’hui. Il y a urgence pour, en effet, éviter que le Liban ne pâtisse de cette situation de tensions régionales extrêmes.

Q - J’ai une question concernant l’Iran. Il y a une réunion du Conseil des gouverneurs, cette semaine. Il y a eu une exclusion d’inspecteurs, dont des Français, de ce que l’on comprend. Il y a toujours des caméras débranchées, mais pour l’instant on ne voit pas de réaction particulière du côté occidental. Dans quelle mesure le conflit au Proche-Orient pèse sur les négociations, sur l’accord nucléaire avec l’Iran ? Est-ce qu’il n’y a pas une réaction un peu tiède des Occidentaux, de peur que l’Iran allume un autre feu, notamment côté libanais ?

R - Je crois qu’il faut distinguer les sujets. Nous avons comme vous le savez, des discussions avec tous nos partenaires sur les questions nucléaires iraniennes. À cet égard nous avons pu rappeler, lors de dernières échéances, quelles étaient les exigences de notre part envers l’Iran. Nous sommes particulièrement préoccupés par l’escalade nucléaire absolument injustifiée et injustifiable de l’Iran dans le cadre de son programme nucléaire. Il s’agit pour l’Iran de revenir à ses obligations internationales. Et s’agissant des mesures que vous évoquez, ce sont des mesures punitives à l’encontre des inspecteurs, mesures totalement extrêmes et injustifiées, et qui nuisent à la capacité de l’Agence d’exercer son mandat de vérification en Iran. Il s’agit pour l’Iran de revenir sur ces mesures et de revenir à une pleine coopération avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Nous appelons à cet égard à cette pleine coopération. C’est le message passé par tous nos partenaires et nous soutenons son directeur général, M. Rafael Grossi, dans les efforts qui sont les siens à cet égard.

Nous traitons les crises de manière séparée. Le dossier nucléaire est effectivement traité dans ce cadre. Depuis le début, nous savons qu’il est important, par ailleurs, de traiter des actions des activités déstabilisatrices de l’Iran dans la région. Cela a toujours été la position de la France. Nous continuons à travailler en ce sens, notamment dans le cadre des actions que j’ai déjà évoquées, pour éviter un embrasement régional.