Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières : conférence internationale organisée par la France (23.03.2021)

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Afin de débattre des questions soulevées par la conception et la mise en œuvre d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique et Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, organisaient une conférence internationale le mardi 23 mars 2021.
Celle-ci réunira virtuellement des universitaires, des représentants des institutions de l’Union Européenne, des experts, ainsi que des représentants d’organisations internationales et des acteurs de la société civile de pays tiers.

Revoir l’intervention de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères

Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières : de quoi parle-t-on ?

Alors que la maîtrise des dérèglements climatiques et l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris nécessitent un renforcement massif de l’action climatique à l’échelle mondiale, l’Union européenne s’est fixée pour objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 et a décidé de réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55% d’ici à 2030 par rapport à 1990. Ces objectifs ambitieux se traduisent par des politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre imposant des efforts d’adaptation aux entreprises et aux citoyens européens.

Les États tiers à l’Union européenne ne partagent cependant pas tous ce niveau d’ambition climatique. Cette divergence réglementaire amplifie le risque que les politiques climatiques européennes se traduisent par une délocalisation de la production de biens fortement émetteurs de gaz à effet de serre hors de l’Union européenne, et par la réimportation de ces biens au sein du marché intérieur européen. On parle alors de « fuites de carbone ».
Or, du fait de l’augmentation des émissions hors de l’Union européenne dont elles s’accompagnent, les « fuites de carbone » réduisent l’efficacité des mesures de réduction d’émissions de carbone en Europe, ainsi que leur acceptabilité politique et sociale. C’est tout particulièrement le cas dans des secteurs d’activité aujourd’hui fortement émetteurs de gaz à effet de serre et exposés à la concurrence internationale, comme la production d’acier. La réduction des fuites de carbone est donc une priorité de l’Union Européenne, car ce phénomène nuit à l’action climatique internationale.

Le MACF vise à lutter contre les fuites de carbone afin de faciliter l’atteinte des objectifs climatiques de l’Union européenne. L’objectif est que les biens importés dans l’Union européenne soient couverts par une tarification du carbone équivalente à celle s’appliquant à la production de ces mêmes biens sur le territoire de l’Union européenne, dans le cadre du système d’échange de quotas d’émissions (voir encadré). Le mécanisme contribuera ainsi à renforcer la cohérence de la politique climatique de l’Union européenne.
Le MACF permettra de lutter plus efficacement contre les fuites de carbone que les dispositifs existants (allocations gratuites de quotas, Emissions Trading Schemes (ETS)), auxquels il se substituera progressivement. En l’absence de mise en place d’un MACF, le relèvement de l’ambition climatique européenne risquerait en effet de conduire à une augmentation importante des fuites de carbone.

Qu’est-ce que le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’Europe et pourquoi la France le soutient-elle ?

Quelles sont les prochaines étapes ?

À la suite de sa communication de décembre 2019 sur le Pacte vert pour l’Europe, la Commission européenne formulera en juin 2021 des propositions qui permettront de mettre en place un MACF de l’Union européenne d’ici 2023. Avec l’objectif d’être juste et légitime, avec une visée strictement environnementale, ce mécanisme sera conçu pour être pleinement conforme aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et en cohérence avec le cadre multilatéral climatique et les enjeux de développement mondiaux. Il s’agira d’un dossier d’intérêt prioritaire de la présidence française du Conseil de l’UE en 2022.

En savoir plus sur les marchés carbone
Les marchés carbone, également nommés systèmes d’échange de quotas d’émissions ou système de permis d’émissions négociables (Emissions Trading Schemes ou ETS), sont des outils réglementaires facilitant l’atteinte pour tout ou partie des objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES) déterminés politiquement. L’Union européenne a mis en place depuis 2005 un marché du carbone pour mesurer, contrôler et réduire les émissions de son industrie et de ses producteurs d’électricité. Le marché carbone est la pierre angulaire de la politique énergie-climat européenne.
Source : Ministère de la Transition écologique

Quelles sont les propositions françaises ?

La France soutient de longue date la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. En réponse à une consultation de la Commission européenne, elle a soumis en avril 2020 des propositions pour la mise en œuvre de ce mécanisme de manière non-discriminatoire et pleinement compatible avec les règles de l’OMC :

  • demander aux importateurs extra-UE d’acquérir des quotas carbone spécifiques, sur un marché miroir au marché carbone européen (EU ETS) ;
  • remplacer progressivement le système d’allocations gratuites de quotas ETS au terme d’une phase transitoire qui se poursuivrait jusqu’à 2030 ;
  • retenir dans un premier temps un nombre limité de secteurs pilotes, notamment les activités les plus émettrices de gaz à effet de serre et les plus exposées au risque de fuites de carbone comme l’acier et le ciment ;
  • prendre en compte les politiques climatiques des États tiers et leur niveau de développement dans la conception du mécanisme ;
  • apporter une solution, sous la forme de compensations, à la problématique des secteurs exportateurs, afin de limiter les fuites de carbone sur les marchés tiers.