Journée internationale des droits des femmes - Remise du prix Simone Veil et présentation des portraits des 27 femmes européennes inspirantes - Propos liminaires de Jean-Yves Le Drian (Paris, 8 mars 2022)

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Madame la ministre,

Monsieur le secrétaire d’État,

Mesdames et Messieurs les députés,

Madame la présidente du jury du prix Simone Veil de l’égalité femmes-hommes de la République française,

Mesdames les ambassadrices,

Messieurs les ambassadeurs,

Mesdames et Messieurs,

En ce 8 mars 2022, je veux d’abord saluer le courage des femmes ukrainiennes face à la guerre que Vladimir Poutine a fait le choix de lancer contre leur pays ; le courage de celles qui résistent, parfois les armes à la main ; le courage de celles qui vivent sous les bombardements et qui tiennent toujours ; le courage de celles qui, souvent avec leurs enfants, ont dû prendre les routes de l’exil, qui sont longues, qui sont dangereuses et qui sont difficiles.

Ces femmes ukrainiennes, nous sommes à leurs côtés. Le soutien de la France, le soutien de l’Europe, le soutien de nos alliés est total. Vous le savez, nous fournissons des équipements de défense à l’Ukraine. Nous avons adopté des sanctions massives et drastiques pour rendre le coût de la guerre insupportable en Russie. Et nous sommes au rendez-vous de la solidarité humanitaire et de l’accueil des réfugiés.

En Ukraine, comme sur bien d’autres pays, les femmes sont trop souvent en première ligne, face aux crises et aux bouleversements d’un monde en voie de brutalisation et dont les soubresauts font peser des menaces spécifiques sur leur vie, sur leur intégrité physique et sur leurs droits.

Ces droits font d’ailleurs également l’objet d’attaques directes et de plus en plus décomplexées par des forces conservatrices, réactionnaires, qui, sur tous les continents, n’hésitent pas à s’en prendre au principe même d’égalité entre les femmes et les hommes, aux droits et à la santé sexuels et reproductifs des femmes, ou encore aux instruments juridiques qui protègent les femmes des violences sexistes. Le fait qu’un Etat ait pu décider de se retirer de la Convention d’Istanbul est à cet égard extrêmement significatif et, pour tout dire, extrêmement alarmant.

Nous le savons, désormais, toutes et tous, même au XXIème siècle, les pires régressions sont possibles. Et les acquis des combats menés par les femmes pour obtenir le respect de leurs droits sont des acquis fragiles. Chacune de leurs conquêtes peut s’effacer en quelques jours. On l’a vu en Afghanistan, je le dis avec un pincement au cœur, en pensant aux décennies de luttes pour les droits des femmes d’Habiba Sarabi, à qui je remettais le prix Simone Veil, il y a tout juste un an, quelques mois seulement avant la chute de Kaboul et le retour des Talibans au pouvoir. Et nous pensons tous, je pense, à elle, aujourd’hui.

Cette année, Madame la député, chère Marie-Pierre Rixain, le jury que vous présidez a choisi de décerner le prix Simone Veil 2022 à une jeune militante dont l’engagement exemplaire montre quel rôle peuvent jouer les femmes dans la protection de nos biens communs, à commencer par le premier d’entre tous : notre planète.

Chère Komal Narayan, car c’est vous qui êtes notre lauréate, cette année, permettez-moi d’abord de vous féliciter. Votre engagement est un exemple pour toute une génération de jeunes femmes qui, comme vous et avec vous, se battent contre les dérèglements climatiques et leurs effets.

Chez vous, chère Komal, aux Fidji, ce combat est un combat pour la survie, car l’urgence climatique est d’ores et déjà une réalité très concrète. C’est la réalité des cyclones qui emportent des vies humaines, qui arrachent les maisons, ou des inondations qui détruisent les récoltes. C’est la réalité de la montée du niveau de la mer qui oblige des villages entiers à se relocaliser. C’est la réalité des épidémies qui se multiplient. C’est la réalité du réchauffement des eaux et de sa conséquence, le blanchissement des coraux, qui fragilise les écosystèmes. Et dans ces terribles réalités, vous ne vous résignez pas. Et c’est cela, votre détermination, que nous saluons aujourd’hui par ce prix Simone Veil qui porte le nom d’une autre femme qui, elle non plus, ne s’est pas résignée.

C’est votre détermination à agir sur le terrain en particulier auprès des femmes et des filles dont les vies sont bouleversées par les premiers effets du changement climatique. Et c’est votre détermination aussi à porter leurs voix sur la scène internationale, comme vous l’avez fait en 2017 à la COP23 de Bonn, mais aussi en 2019 au sommet des jeunes sur le climat au siège des Nations unies, et aussi à la COP25 de Madrid. Marie-Pierre Rixain va y revenir dans un instant.

Et avant de lui passer la parole, je tiens à redire aussi, aujourd’hui, devant vous, en ce jour, que la diplomatie féministe continue à occuper une place centrale au coeur de notre diplomatie. Nous le montrons en soutenant les associations féministes à travers un fonds doté, depuis 2019, de 120 millions d’euros, et en appuyant l’initiative AFAWA pour favoriser l’entreprenariat des femmes en Afrique. Nous le montrons aussi par le renforcement du fonds mondial pour les survivants de violences sexuelles du Dr Mukwege et de Nadia Murad que nous soutenons activement. Nous l’avons montré, l’été dernier, en organisant à Paris, avec le Mexique et sous l’égide d’ONU Femmes, le premier Forum Génération Égalité ; nous y avons annoncé un engagement de la France à 400 millions d’euros sur la santé des femmes et les droits et santé sexuels et reproductifs. Et nous le montrerons, Monsieur le secrétaire d’État, tout au long de notre présidence du Conseil de l’Union européenne jusqu’à la fin du mois de juin, en nous battant pour faire aboutir les discussions législatives sur la transparence salariale et sur la représentation des femmes dans les conseils d’administration des grandes sociétés européennes ; en nous battant pour inscrire le droit à l’avortement dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, car c’est en effet un droit fondamental et il est grand temps que notre Europe le reconnaisse. Nous nous battons aussi pour faire en sorte que la ratification de la Convention d’Istanbul devienne une ratification universelle.

Enfin, Mesdames et Messieurs, cet engagement pour la diplomatie féministe, nous le montrons aussi au quotidien, au sein de notre ministère. Cet engagement, je l’ai pris dès mon arrivée en 2017 et l’objectif a toujours été clair pour moi, au cours de ces cinq années : faire progresser la parité jusqu’à tous les postes de responsabilité, et défendre résolument l’impératif d’égalité professionnelle. Il nous appartiendra, le moment venu, d’en faire le bilan, mais je crois pouvoir vous dire qu’il y a eu de fortes progressions dans tous les domaines, et je m’y suis impliqué personnellement. Je continuerai à le faire jusqu’au bout.

Voilà, chers amis, ce que je voulais vous dire pour ouvrir cette rencontre. Merci d’être avec nous, aujourd’hui, chère Komal Narayan, et surtout bravo pour votre engagement.