Communauté urbaine de Dunkerque et ville de Grande-Synthe – ville d’Annaba (Algérie) – ville de Bizerte (Tunisie) : échanger sur le rôle des territoires dans la lutte contre le dérèglement climatique

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La température moyenne du globe augmente en raison de l’activité humaine (industrie, transport, déforestation, habitat…), et de l’utilisation d’énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, charbon…). La hausse de la température a des conséquences sur le climat : montée des eaux, sécheresses, cyclones… et sur le vivant : disparition d’espèces, réduction des rendements agricoles… On considère qu’une augmentation de 2°C aurait des conséquences limitées.

Dans ce contexte, les collectivités territoriales luttent à leur niveau, par exemple, en encourageant les transports en commun, en aidant à l’efficacité énergétique des bâtiments, en promouvant les énergies renouvelables…La communauté urbaine de Dunkerque (CUD), les villes de Grande-Synthe, d’Annaba et de Bizerte, qui sont toutes les trois des agglomérations littorales, portuaires et industrielles, ont décidé de s’associer autour du projet CLIMED pour appréhender ensemble les conséquences du dérèglement climatique et rechercher des solutions.

Nous avons rencontré Mohamed Riadh Lazzem, le maire de Bizerte et co-porteur du projet CLIMED, lors de la table ronde "Les collectivités locales s’engagent pour le climat" organisée le 5 décembre dans le cadre de la COP21, au Bourget.

Contexte et enjeux du projet CLIMED

En Europe, le rôle des territoires dans la lutte contre le dérèglement climatique est un sujet bien intégré, il doit encore progresser en Afrique du Nord. La loi française oblige en effet les grandes collectivités à se doter de plans climat visant à réduire leur consommation énergétique ainsi que leurs émissions de gaz à effet de serre et à mobiliser et soutenir les acteurs de terrain. Ce type d’outils pourrait être diffusé au Maghreb. Par contre, une certaine culture de la récupération et de la réparation est encore en cours au Maghreb. Bénéfique pour le climat, elle n’est pas forcément identifiée en tant que telle. Le projet souhaite mieux identifier les pratiques, les valoriser et les transférer sur les territoires partenaires au Nord. L’impact des actions est réel, aussi bien au sein des populations du Sud que de celles du Nord, c’est là une caractéristique essentielle des projets de coopération décentralisée : la réciprocité entre territoires.

La CUD et Grande-Synthe disposent d’une bonne expertise dans la lutte contre le dérèglement climatique. En effet, le premier Plan Climat Énergie Territorial (PCET) de la CUD a été mis en œuvre sur la période 2009-2014 avec une notation à 76.5 % par le label Cit’ergie Gold porté par l’ADEME. Le premier "learning-center" sur la ville durable, qui vient d’ouvrir à Dunkerque, offre 1200m² d’espace à de nombreux évènements relatifs à cette question. Quant à Grande-Synthe, capitale française de la bio-diversité en 2010, elle vient d’atteindre 100 % d’électricité verte dans ses bâtiments communaux et vise les 45 % de réduction d’émission de CO2 pour 2020.

C’est en 2004 que le premier partenariat de coopération décentralisée est signé. Depuis, de nombreux projets d’appui au développement urbain intégré ont été menés ainsi qu’un plus large engagement de la société civile en étendant les axes de coopération à la culture et l’économie. Aujourd’hui, les partenaires souhaitent renforcer leurs relations dans le cadre d’un projet opérationnel. La question climatique étant par nature transnationale, elle se prête à une coopération entre territoires particulièrement dans des contextes industriels tels que ceux de Dunkerque dans la sidérurgie, Annaba et Bizerte avec l’acier.

Les bénéficiaires de cette coopération sont estimés à 930 000 (habitants de l’agglomération d’Annaba, de la CUD, de Grande-Synthe et de Bizerte).

Les entreprises participent au projet CLIMED :

Depuis 2011, Dunkerque et Annaba mettent en œuvre une coopération économique. Plusieurs entreprises sont "acclimatées" à la relation entre les territoires. Dans le cadre de CLIMED, les entreprises sont invitées à intervenir dans les rencontres institutionnelles pour exposer leurs pratiques favorables à la lutte contre le dérèglement climatique. De plus, le projet permet, dans le cadre de la rénovation du bâtiment de l’institut français d’Annaba, de mettre en valeur les produits et savoir-faire des entreprises dunkerquoises en la matière.

5 décembre 2015 au Bourget, Mohamed Riadh Lazzem, maire de Bizerte, répond à nos questions en direct de la COP21, où le projet vient d’être évoqué lors de la table ronde "les collectivités locales s’engagent pour le climat"

MAEDI : Pourriez-vous nous rappeler brièvement les objectifs du projet CLIMED ?

Mohamed Riadh Lazzem : Il s’agit de mettre en place trois plateformes : institutionnelle, technique et citoyenne sur le thème du dérèglement climatique. Elles permettent l’échange entre les élus, mais aussi de poser les bases techniques de diagnostic énergétique/bilan carbone dans le cadre de relations entre les services. Elles favorisent la recherche de solutions et pistes d’amélioration et permettent la rencontre entre associations et autres acteurs de la société civile.

Pouvez-vous nous donner un exemple d’aboutissement concret qui pourrait être réalisé à l’issue de ce dialogue ?

A Bizerte, nous disposons de 15 000 points lumineux, principalement à l’éclairage sodium. En Tunisie, quasiment toute l’électricité est produite à partir d’énergies fossiles. Nous étudions donc dans le cadre du projet CLIMED la possibilité de passer en éclairage LED ce qui permettrait de faire de fortes économies (l’éclairage public représente 15% du budget de la commune) et de réduire de façon significative nos émissions de CO2.

Concrètement, le projet CLIMED permet d’accompagner la ville de Bizerte dans les choix techniques sur les bilans énergétiques de ses bâtiments vers un éclairage public moins énergivore et plus efficace.

Pourquoi avoir décidé d’associer d’autres acteurs tels que les associations ?

Les deux collectivités ont mobilisé les associations dont l’objet est la protection de l’environnement pour dynamiser le partenariat existant. La communauté urbaine de Dunkerque vient de lancer un appel à projet proposant un accompagnement financier aux associations menant des actions conjointes avec des associations tunisiennes ou algériennes.

Après un premier travail de défrichage nous avons identifié plusieurs projets : un projet de partage de données sur l’observation d’oiseaux migrateurs ou encore un service de partage d’outils pédagogiques entre établissements scolaires tunisiens et français.

En quoi ce projet diffère de ceux issus du partenariat initié en 2004 ?

Ce projet est une montée en puissance des relations fortes qui existent entre nos collectivités. La création et la mise en œuvre de la plateforme d’échange qui existe ne pouvait émerger dès le début de nos échanges. C’est en apprenant à connaître nos interlocuteurs et les différents acteurs issus d’horizons variés gravitant autour d’eux que nous pouvons nous faire confiance. C’est donc avec enthousiasme que nous avons initié ce projet car nous connaissons désormais la chaleur de cœur des gens du Nord de la France.

Quels sont les suites et les perspectives d’ouverture du projet CLIMED ?

Effectivement, nous pensons déjà à la suite du projet. La prochaine étape serait d’associer nos universités et laboratoires de recherche afin de faire une étude commune sur la qualité de l’air sur le littoral français, algérien et tunisien.

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Mohamed Riadh Lazzem, le maire de Bizerte (2ème en partant de la gauche) - table ronde "Les collectivités locales s’engagent pour le climat" - 05.12.15 dans le cadre de la COP21. Photo : Ann-Claire Gaudru

Les acteurs impliqués dans le projet CLIMED

  • Communauté urbaine de Dunkerque : maître d’ouvrage
  • Ville de Grande-Synthe : partenaire et maître d’œuvre de certaines actions
  • Ville d’Annaba
  • Ville de Bizerte
  • Maison de l’environnement de Dunkerque : coordinateur du volet société civile, échanges citoyens
  • Centre ressource du développement durable (CERDD) : structure ressource. Mobilisation de contenu, d’expertise et co-organisation de visites de terrain
  • Atelier université populaire de la ville de Grande-Synthe : identification et suivi d’échanges citoyens
  • Institut Français d’Annaba : identification et suivi d’échanges citoyens

Ce projet a été sélectionné dans le cadre de l’appel à projets Climat 2015, lancé par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international (MAEDI), en partenariat avec le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (MEDDE) et le ministère de l’Agriculture, de l’Agro-alimentaire et de la Forêt (MAAF) ainsi qu’avec la Fondation Schneider Electric, sous l’égide de la Fondation de France.

Plus d’informations dans la rubrique Action extérieure des collectivités territoriales sur France Diplomatie