Qatar - Conférence de presse conjointe de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, et de Cheikh Mohamed ben Abderrahmane Al Thani, ministre des affaires étrangères du Qatar - Propos de Jean-Yves Le Drian - Q&R (Doha, 13 septembre 2021)

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Merci beaucoup, Mesdames et Messieurs, je voudrais d’abord vous dire que j’accorde la plus grande importance à mon déplacement à Doha aujourd’hui dans le cadre de la crise afghane, évidemment, mais aussi pour poursuivre notre partenariat très ancien et très riche sur de nombreux sujets.

Je voudrais aussi, dans ce propos, remercier son Altesse l’Emir du Qatar pour l’accueil qu’il a bien voulu me réserver, ce matin, et remercier, évidemment, chaleureusement mon collègue, Cheikh Mohamed, pour la qualité de notre relation, et pour les échanges toujours francs, toujours amicaux et toujours constructifs que nous avons ensemble, à la fois sur le partenariat bilatéral et aussi sur les dossiers régionaux.

Nous avons, entre le Qatar et la France des liens forts, anciens, que je suis venu réaffirmer. Le Qatar est un pays ami, c’est un pays solide, un partenaire avec lequel nous maintenons un dialogue étroit, avec pour unique préoccupation la sécurité et la stabilité régionales. La présence il y a quinze jours de son altesse l’Emir du Qatar accompagné du ministre des affaires étrangères, Cheikh Mohamed, à la conférence de Bagdad que nous avions initiée, le Premier ministre irakien et le Président Macron, a permis des échanges extrêmement fructueux à cette occasion.

Aujourd’hui, notre partenariat permet une coordination étroite sur la crise afghane. Je dois dire que depuis le début de cette crise, les autorités qatariennes font preuve d’une mobilisation exceptionnelle, et je voudrais remercier chaleureusement les autorités du Qatar pour le travail accompli lors des évacuations des ressortissants français et afghans. Cette mobilisation, j’ai pu m’en rendre compte, tout à l’heure, parce que j’ai moi-même assisté au départ de 47 Français pour la France, après qu’ils ont pu être évacués, grâce aux initiatives du Qatar.

Je voudrais dire aussi que nous aurons des échanges dans la journée, à la fois avec la ministre chargée des opérations d’évacuation et avec le président de Qatar Airways.

Nous souhaitons poursuivre cette coopération, pour achever les opérations d’évacuation, depuis Kaboul, des Français et de leur famille et pour mettre en protection les Afghans menacés en raison des valeurs qui sont les leurs. Je suis très heureux de pouvoir avoir, au cours de mon entretien, le retour d’expérience du déplacement du ministre, Cheikh Mohamed, hier à Kaboul.

Par ailleurs, mon déplacement, ici, traduit à volonté commune d’approfondir notre coopération dans différents domaines, dans le domaine sécuritaire, dans le domaine économique, dans le domaine culturel et évidemment, dans le domaine sportif. Et le dialogue stratégique qui se tient annuellement entre nos deux pays, qui n’a pas pu se tenir en 2020 en raison de la pandémie, est le cadre approprié pour approfondir nos échanges. Et nous avons convenu d’avoir une nouvelle réunion du dialogue stratégique franco-qatarien, avant la fin de l’année, pour évaluer ensemble l’état de notre partenariat et trouver les voies et moyens de le renforcer dans tous les domaines.

Je voulais vous renouveler, cher ami, mes remerciements, ainsi que ceux du Président de la République pour l’appui apporté par le Qatar dans le contexte de la crise afghane.

Q : Je voudrais savoir si un mois après la prise de Kaboul, est-ce toujours une priorité, pour vous le Qatar et pour vous la France, d’aider les femmes ? Est-ce que vous pouvez peser concrètement sur ce gouvernement taliban, qui jusqu’à présent n’a pas vraiment annoncé de mesures rassurantes pour les femmes ?

R : Merci de cette question. Nous sommes très heureux de vous retrouver à Doha. Je crois que nous avons posé très clairement les exigences de la communauté internationale ; soit par le biais de la résolution 2593 des Nations unies, soit par les réunions diverses qui se sont organisées, ne serait-ce que la réunion des ministres des affaires étrangères de l’Union européenne en fin de semaine dernière, nous avons posé les exigences que nous attendons de la part des nouvelles autorités talibanes : d’abord, et mon collègue Cheikh Mohamed vient d’en parler, le libre accès, la libre circulation et la libre possibilité de sortir sans entrave, de voyager sans entrave. Ensuite, mais il n’y a pas d’ordre prioritaire, le respect des droits fondamentaux, à commencer par le droit des femmes et le droit des filles. Ensuite, le fait qu’il y ait une vraie rupture avec toute forme de terrorisme. Ensuite le fait que l’aide humanitaire puisse être acheminée sans difficulté, n’importe où, sous l’autorité de ceux qui fournissent l’aide humanitaire, en particulier les organisations internationales. Et enfin que soit constitué un gouvernement de transition représentatif.

Voilà les points majeurs. Donc évidemment la place, et le rôle des femmes, est central. J’observe d’ailleurs - je pense que vous le savez - que nous avons, la France, grâce à nos coopérations, pu permettre l’exfiltration de 2800 personnes, au cours de la fin du mois d’août, dont 2600 Afghanes et Afghans et quasiment pour la moitié des femmes. Dans l’état actuel des choses, les réponses que nous avons des autorités qui se sont constituées à Kaboul ne répondent en rien à ces exigences.

Nous pensions qu’un des actes aurait pu être un gouvernement élargi, ce n’est pas le cas. Il y a eu des déclarations, il n’y a pas encore eu d’actes. Et donc, nous attendons les actes que les autorités se sont engagées à prendre. Et nous continuons la pression à tous les niveaux pour qu’elles soient aux rendez-vous qu’elles se sont elles-mêmes fixés. Pour l’instant, ces rendez-vous ne sont pas honorés.

Q : Combien de ressortissants français restent en Afghanistan ?

(…)

R : Je partage la clarté des propos de Cheikh Mohamed sur la demande d’actes, au-delà des propos. J’indique aussi, mais vous le savez, que se tiendra la semaine prochaine l’Assemblée générale des Nations unies et la question afghane sera obligatoirement présente dans différentes rencontres qui auront lieu à cette occasion.

Sur la question précise des Français en Afghanistan, je voudrais d’abord dire que nos priorités d’évacuation et d’exfiltration depuis plusieurs semaines, mais singulièrement depuis le 15 août, ont toujours été de faire en sorte que nos ressortissants puissent revenir, que ceux qui ont aidé la France, soit par leur présence auprès des armées françaises, il fut un temps, soit par leur participation aux institutions françaises en Afghanistan, puissent rejoindre s’ils le souhaitent le territoire français. Et ensuite, apporter notre soutien et notre accueil aux Afghanes et aux Afghans qui par leur engagement, leur démarche, leurs valeurs, se sentaient en difficulté. Ce sont les critères qui ont permis les évacuations que j’ai indiquées, il y a un instant. Grace à la collaboration avec les autorités du Qatar, nous avons pu, ce matin, permettre le retour de 47 ressortissants français supplémentaires. Il nous reste encore un petit peu de Français en Afghanistan, mais très peu. Ce sont quelques dizaines maximum./.

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