Liban – Discours de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, au collège des Sœurs des Saints-Cœurs-Sioufi (Beyrouth, 6 mai 2021)

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Madame la Supérieure générale de la congrégation des Saints-Cœurs, chère Sœur Bernadette ;
Madame la Directrice du Collège des Saint-Cœurs, chère Sœur Hélène ;
Chère Sœur Géraldine ;
Monsieur le Président du Fonds pour les écoles d’Orient, cher Charles Personnaz ;
Mesdames et Messieurs les Professeurs ;
Chers élèves ;
Mesdames et Messieurs ;

Je suis très heureux d’être avec vous ce matin, dans cet établissement qui est, à mes yeux, un très beau symbole de tout ce qui fait la force du Liban : le symbole d’un héritage de pluralisme, de tolérance, de diversité culturelle, d’ouverture, de dialogue et d’intelligence ; le symbole d’une jeunesse bien déterminée à construire son avenir, avec un courage qui – je vous le dis – force le respect ; et enfin le symbole d’un pays qui résiste, alors que les crises – malheureusement – s’ajoutent les unes aux autres.

Tout cela, grâce à vous ! Grâce à toute l’équipe d’encadrement, parce que vous faites vivre cet établissement au quotidien. Grâce à toute l’équipe pédagogique, parce que vous accompagnez vos élèves sur un chemin qui est non seulement un chemin de réussite scolaire, mais aussi un chemin de liberté intellectuelle et de citoyenneté. Mais aussi et surtout grâce à vous qui êtes élèves ici, parce que l’énergie dont vous faites preuve, en cette période très dure, nous apprend à ne pas renoncer.

Au fond, le message que je veux vous adresser aujourd’hui tient en un mot : solidarité.

Depuis le début de la crise pandémique il y a un an, nous avons toujours eu à cœur de soutenir le secteur éducatif libanais. En juillet dernier, j’étais à l’école du Carmel Saint-Joseph, devant vos camarades et sa directrice Sœur Mariam, pour annoncer un plan d’aide directe et immédiate de la France. Au début du mois d’août, après le terrible drame qui a frappé cette ville, le Président de la République, Emmanuel Macron, est venu ici, à Beyrouth, – j’étais avec lui –, et il a eu cette phrase très forte : « La France ne lâchera jamais le Liban ». Et je suis de retour aujourd’hui, pour vous assurer que notre détermination à vous aider reste pleine et entière.

Au total, nous avons mobilisé près de 36M€ pour soutenir l’éducation, les familles et les établissements libanais : 15M€ en faveur du secteur public et privé local, en particulier grâce à l’engagement de l’AFD ; et 21M€ pour le réseau d’établissements d’enseignement français. Ces 21M€ représentent 20% du total de l’aide aux établissements d’enseignement français à l’étranger : c’est dire à quel point comptent, pour la France, vos 60 000 élèves, dont 90 % - je le rappelle – sont libanais. Grâce à ces 21M€, nous avons pu apporter une aide directe à près de 10.000 de ces élèves libanais, en prenant en charge tout ou partie de leurs frais de scolarité, et porter assistance à 51 établissements homologués qui se trouvaient dans une situation économique difficile. Ces 21M€ ont également contribué à la réhabilitation des 23 établissements touchés par les explosions du 4 août.

Le Collège des Saint-Cœurs – vous le savez – a bénéficié de plus de 760 000 euros, au titre de l’aide à la reconstruction, de l’aide aux familles et du financement des projets éducatifs et pédagogiques que vous portez.

Et nous continuons, encore cette année, à soutenir directement les familles et les établissements scolaires qui rencontrent des difficultés.

Il s’agit d’efforts conséquents. Mais, pour nous, ils répondent à des priorités évidentes. Nous voulons que les élèves qui en ont fait le choix aient accès à l’enseignement français au Liban. Nous voulons que leurs professeurs, dont je connais l’engagement et les très grandes qualités, aient les moyens de continuer à leur prodiguer un enseignement d’excellence. Et nous voulons préserver ce réseau unique qui – chaque jour, même dans l’adversité – donne au Liban des raisons de continuer à croire en son propre avenir. Au-delà du réseau de l’enseignement français, nous voulons aussi faire plus pour les 400 établissements francophones chrétiens du Liban et de toute la région et leurs 400 000 élèves.

C’est le sens du Fonds de soutien aux écoles d’Orient que nous avons mis en place, aux côtés de l’Œuvre d’Orient, sous l’égide de Charles Personnaz, dont je veux, ici, saluer l’engagement.

Il y avait urgence, et pas seulement au Liban. A la rentrée dernière, de nombreuses écoles chrétiennes francophones du Moyen-Orient risquaient en effet de fermer. Cela aurait été, pour nous, un véritable déchirement, et une perte immense pour les sociétés de la région, en termes de diversité et de richesse éducative et culturelle. Nous ne pouvions pas nous y résoudre !

Nous avons donc mobilisé 2,2M€, cofinancés à part égale avec l’Œuvre d’Orient. Au Liban, où le besoin en aides à la scolarité était le plus important, nous avons aidé 58.000 élèves de toutes confessions et 115 établissements francophones de toutes les régions du pays, avec une attention particulière pour les régions du Akkar et de la Bekaa. Je pense, par exemple, à un établissement de votre congrégation, l’Institut technique Monseigneur Cortbawi, dont la Directrice est présente, qui a bénéficié du fonds à hauteur de 20 000 €. Ou encore à l’école Saint-Joseph de Miniara, l’école Notre-Dame du bon service, à Jabboulé. En Egypte, nous avons soutenu la formation des enseignants de français, en prenant en charge leur parcours de professionnalisation. Cette enveloppe nous a également permis d’investir pour la réussite des élèves : en Jordanie, nous avons accompagné par exemple la modernisation d’établissements qui disposent désormais de nouveau tableaux blancs numériques.

Si nous sommes sensibles aux difficultés rencontrées par les écoles chrétiennes francophones de toute la région, nous ne perdons bien sûr pas de vue la singularité de la situation dans laquelle se trouve le Liban aujourd’hui et les interrogations des familles libanaises. A situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle : nous avons décidé de faire une exception pour 2021, en ouvrant la possibilité d’aides à la scolarité pour les élèves de ces établissements.

J’ai également décidé que notre futur centre régional de formation destiné au réseau homologué serait ouvert aux écoles aidées par le Fonds et aux établissements publics.

Vous le voyez – mes chers amis –, la France prend ses responsabilités. Mais – et je veux insister – ce réseau éducatif français et francophone au Liban, c’est notre bien commun, et nous avons aussi besoin de votre engagement pour réussir.

Je vous invite donc à continuer à travailler avec notre Ambassadrice, Anne Grillo, et sa Conseillère de coopération et d’action culturelle, Marie Buscail, à la définition de ce que seront nos établissements à l’horizon 2030. Il y va, bien sûr, de l’avenir des nouvelles générations de Libanaises et de Libanais, et donc de l’avenir de ce pays, dans toute la diversité qui le caractérise. Mais aussi du devenir des exigences éducatives que nous portons ensemble et des valeurs humanistes qui nous rassemblent, dans un monde où ces exigences et ces valeurs ne vont plus de soi.

Je compte donc sur vous, et – n’en doutez jamais – vous pouvez continuer à compter sur nous !
Je vous remercie.