Déclaration de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, au Sénat (Paris, 12 mai 2021)

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Merci Madame la Présidente,

Il se trouve, Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs, que je ne pouvais être présent aux questions d’actualité qui viennent de se terminer puisque je participais à une réunion entre le Président de la République Emmanuel Macron et le Président de la République argentine. Je sais qu’au cours de ces questions, le président Laurent a interrogé le Gouvernement sur la situation au Proche-Orient. Je sais que le secrétaire d’État Jean-Baptiste Lemoyne y a répondu mais je voudrais vous dire assez fortement combien je suis très préoccupé de la gravité de la situation au Proche-Orient. Cette situation, chacun le sait, est le résultat d’une absence de perspective politique à une situation qui n’a que trop duré, et qui ne pourra que continuer à produire des souffrances et de la violence si la volonté n’est pas là pour avancer résolument vers l’établissement de deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité, avec Jérusalem pour capitale.

Depuis plusieurs jours, encore en ce moment, particulièrement cette nuit, mais cela se poursuit, les affrontements s’intensifient et le bilan est déjà très lourd, parmi les civils palestiniens et israéliens. Le cycle des violences en cours à Gaza, à Jérusalem, mais aussi en Cisjordanie et dans plusieurs villes d’Israël, risque de conduire à une escalade majeure. En moins de quinze ans, la bande de Gaza a connu trois conflits meurtriers. Tout doit être fait pour en éviter un quatrième. Il est donc absolument indispensable que tous les acteurs, sans exception, fassent preuve de la plus grande retenue et s’abstiennent de toute provocation et de toute incitation à la haine, pour mettre un terme à des violences dont les premières victimes sont les populations civiles, palestinienne et israélienne. Pour ces populations comme pour toute la région, la seule priorité, à cette heure, doit être l’apaisement des tensions. Je m’entretiendrai très prochainement avec mes homologues israélien et palestinien, pour leur faire passer l’ensemble de ces messages et pour contribuer à la désescalade. Je vais aussi m’entretenir dans quelques heures avec mon collègue égyptien, pour coordonner nos démarches avec les efforts de l’Égypte, que je salue, et qui travaille en ce moment-même à un retour au cessez-le-feu à Gaza.

Je voudrais vous dire aussi que la France condamne dans les termes les plus fermes les tirs de roquettes et de missiles qui se sont intensifiés depuis la bande de Gaza et qui ont visé Jérusalem et plusieurs zones habitées du territoire israélien, y compris Tel-Aviv. Ces tirs risquent désormais de provoquer un nouveau cycle d’affrontements. Et ces tirs, effectués en violation du droit international et revendiqués par le Hamas, ne sont pas acceptables.

Mais nous sommes aussi gravement préoccupés par la situation à Jérusalem. La stricte préservation du statu quo historique sur l’Esplanade des Mosquées est indispensable. J’ai abordé cette question avec mon homologue jordanien, compte tenu du rôle spécifique reconnu à la Jordanie sur les Lieux saints de Jérusalem.

Je rappelle également notre totale condamnation de la colonisation, qui est contraire au droit international : les menaces d’évictions forcées visant des résidents palestiniens de Jérusalem-Est à proximité de la Vieille Ville, notamment à Sheikh Jarrah, participent à l’entreprise de colonisation et alimentent les tensions. Enfin, le droit à manifester pacifiquement doit être garanti.

Je voudrais vous dire, Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs, que je suis évidemment, avec le Président de la République, pleinement mobilisé, singulièrement avec nos collègues européens - allemand en particulier -, égyptien et jordanien, pour contribuer à une baisse des tensions. Nous n’avons tous les quatre qu’un seul objectif : l’objectif d’une reprise du dialogue entre les parties en vue d’une résolution juste et durable du conflit, dans le cadre du droit international, dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité et dans le cadre des paramètres internationalement agréés.

Merci de m’avoir donné la parole, Madame la Présidente.