La France en Antarctique

Partager

La France fait partie des nations pionnières en Antarctique. Dès le XVIIIe siècle, des navigateurs et explorateurs français ont pris part à la formidable épopée de la découverte des mers australes puis de l’Antarctique.

Des scientifiques français poursuivent aujourd’hui cette longue histoire qui a fait de la France une nation polaire active tant sur le plan scientifique - des-scientifiques français sont présents en permanence sur le grand continent blanc pour y mener à bien des recherches scientifiques - que sur les plans politique et diplomatique avec un engagement constant pour préserver les grands principes du Traité sur l’Antarctique et renforcer la protection de l’environnement et des écosystèmes antarctiques.

Les principaux acteurs français en Antarctique

Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères veille à la préservation et au renforcement du Système du Traité antarctique. Les délégations françaises à la RCTA et à la CCAMLR sont conduites par le MEAE avec la participation de représentants du MTE, des TAAF et du MAA pour la CCAMLR. Les délégations scientifiques sont conduites par l’IPEV pour la RCTA (comité pour la protection de l’environnement) et par le MNHN pour le comité scientifique de la CCAMLR. La France suit avec attention toute proposition ou évolution susceptible de remettre en cause la règlementation issue du Traité, du Protocole de Madrid ou de la CCAMLR. Avec ses partenaires à la RCTA, au CPE et à la CCAMLR, la France cherche en outre à renforcer les mécanismes de protection de l’environnement et des écosystèmes antarctiques.

L’Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV) joue un rôle central pour l’action de la France en Antarctique.

C’est en effet à l’IPEV que revient la responsabilité de sélectionner, coordonner, soutenir et mettre en œuvre, en qualité d’agence de moyens et de compétences, les projets scientifiques français en Antarctique, bien souvent en partenariat avec des équipes scientifiques étrangères. C’est également lui qui organise et anime les expéditions scientifiques françaises et qui assure le fonctionnement de nos stations en Antarctique :

  • la station française Dumont d’Urville (25 à 35 hivernants et jusqu’à 100 personnes en été),
  • la station franco-italienne Concordia (13 à 15 hivernants et de 50 à 70 personnes en été).

L’IPEV gère l’ensemble de la logistique nécessaire à leurs activités (c’est à ce titre lui qui coordonne l’activité polaire du patrouilleur brise-glace l’Astrolabe) et qui doit, dans l’environnement particulièrement difficile et contraignant qu’est l’Antarctique, prévoir toute difficulté et faire face à tout imprévu.

Représentant français au sein du Conseil des directeurs des programmes antarctiques nationaux (le COMNAP - Council of Managers of National Antarctic Program), l’IPEV entretient des liens étroits avec l’ensemble des institutions homologues de nos partenaires étrangers dans l’objectif, fixé par le Traité sur l’Antarctique, de promouvoir la recherche et la coopération internationale scientifique en Antarctique ainsi que la libre disponibilité du résultats de ces recherches (articles II et III du Traité).

Le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)

De nombreux instituts de recherche du CNRS sont présents en Antarctique pour couvrir la gamme de programmes scientifiques qui s’y déploient.

Les sciences physiques bien évidemment, notamment les équipes de l’Institut des géosciences de l’environnement (IGE) qui, dans les glaces millénaires de la calotte qui recouvre le continent au niveau de la station franco-italienne de Concordia, trouvent les données essentielles pour reconstruire l’histoire du climat sur plusieurs centaines de milliers d’années. Les glaciologues étudient également la dynamique des glaciers, leur fonte, les injections d’eau douce dans l’eau de mer et les conséquences de ces phénomènes sur la circulation des masses d’eau en bordure du continent.

L’Océan Austral et sa banquise sont aussi le centre de préoccupations des océanographes car, loin d’être isolé, cet océan glacé communique avec tous les autres bassins océaniques et contribue à la régulation du climat mondial. Ainsi, les chercheurs du Laboratoire d’océanographie et du climat (LOCEAN) s’intéressent-ils tout particulièrement aux bilans de masse de glace de mer, de chaleur et de sel de la couche de mélange sous la glace.

Les modifications physiques de ce fragile équilibre ont des répercussions sur tous les niveaux des chaînes alimentaires, depuis le plancton, le krill - petit crustacé qui joue un rôle vital dans le maintien des populations de prédateurs supérieurs mais aussi dans l’alimentation mondiale - jusqu’aux oiseaux et mammifères marins, icônes de ces écosystèmes glacés. Les biologistes du CNRS, comme par exemple au Centre d’études biologiques de Chizé (CEBC), utilisent d’ailleurs ces prédateurs comme sentinelles des changements survenant dans la banquise. Les données récoltées sur les animaux suivis par le CEBC mais également tout un consortium de partenaires étrangers (Australie, Royaume-Uni, Afrique du Sud) font, par exemple, des éléphants de mer de précieux auxiliaires pour obtenir des informations à la fois biologiques et physiques sur l’état de l’écosystème de la glace de mer et surtout sur les mystères qui se déroulent sous celle-ci.

L’astronomie est également présente dans le concert de la recherche Antarctique : tout comme les physiciens de l’atmosphère, les astronomes des Observatoires de Côte d’Azur ou l’Observatoire de Lyon profitent de l’air pur du continent pour réaliser des mesures qu’il serait difficile de réaliser sous d’autres latitudes.

Toutes ces études, qu’elles soient fondamentales ou appliquées, se développent dans une atmosphère de coopération internationale, une évidence en cet endroit du globe où l’humanité travaille de concert à la préservation d’un environnement unique. À ce titre, les chercheurs du CNRS sont depuis de nombreuses années fortement impliqués dans les groupes de travail et les instances dirigeantes du Scientific Committee on Antarctic Research, porte-parole de la Science internationale à la RCTA et au Comité pour la Protection de l’environnement (CPE).

Le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

Les scientifiques du MNHN travaillent depuis plusieurs décennies à l’amélioration de la connaissance des écosystèmes fragiles de l’Antarctique. Ils jouent ainsi un rôle essentiel au sein de la délégation française à la CCAMLR. Leur expertise est particulièrement précieuse : ils analysent l’évolution des écosystèmes, proposent la mise en place de bonnes pratiques (diminution de l’impact des activités anthropiques, amélioration des techniques de pêche pour réduire les prises accessoires), élaborent des recommandations pour la fixation de taux de capture des ressources halieutiques au large des ZEE françaises de Crozet et Kerguelen. Des scientifiques français du MNHN prennent part aux travaux du conseil scientifique de la CCAMLR (qui est chargé de donner des avis sur l’évolution des stocks halieutiques dans la zone de la convention). Les scientifiques du MNHN jouent en outre un rôle central de conseil de la délégation française à la CCAMLR sur les projets de création de nouvelles aires marines protégées.

Les TAAF

L’administrateur supérieur des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) est l’autorité nationale compétente pour mettre en œuvre les dispositions du Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement (le Protocole de Madrid) encadrant les activités humaines en Antarctique. À ce titre, il autorise et suit les activités relevant de sa compétence, principalement les missions scientifiques mises en œuvre par l’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV) en terre Adélie et à Concordia, et les expéditions touristiques déployées par les opérateurs français en péninsule antarctique.

Depuis 1955, les TAAF sont également chargées d’administrer la terre Adélie et des archipels sub-antarctiques (Kerguelen, Crozet). En application du Traité sur l’Antarctique, la compétence de la collectivité à cet égard vise uniquement les ressortissants français. Les indispensables missions logistiques de ravitaillement et de relève de la base française Dumont d’Urville sont assurées par le patrouilleur brise-glace L’Astrolabe, propriété des TAAF, armé par la Marine nationale, et dont l’activité polaire est coordonnée par l’IPEV.

Le navire L’Astrolabe effectue des missions logistiques au profit des TAAF et de l’IPEV, permettant principalement le ravitaillement de la station scientifique Dumont d’Urville, en Antarctique. Cette Mission de soutien logistique antarctique (MSLA) est déployée quatre à cinq fois par an, depuis le port d’Hobart en Tasmanie (Australie), situé à environ 2 700 km au nord de la station. Ce navire assurant des opérations logistiques au profit de nos stations scientifiques est armé par la Marine nationale.

En savoir plus sur l’Astrolabe

La France et l’Antarctique : chronologie

  • 1738-1739 : Jean-Baptiste Bouvet de Lozier effectue un voyage dans l’Océan austral. Il est le premier à décrire des icebergs tabulaires et découvre l’île qui porte son nom.
  • 1771-1774 : Yves-Joseph de Kerguelen de Trémarec effectue deux voyages dans l’Océan austral. Il découvre l’archipel qui porte aujourd’hui son nom.
  • 1838 : des navigateurs français commandés par Jules Dumont d’Urville partent à la recherche du Pôle Sud magnétique. Le 21 janvier 1840, ils accostent sur le continent Antarctique à un endroit que Dumont d’Urville baptise Terre Adélie, en l’honneur de son épouse.
  • 1903-1905 : Première expédition de Jean-Baptiste Charcot en Antarctique. Il découvre les sites qui portent aujourd’hui les noms de Port Lockroy et Port Charcot et effectue le premier hivernage français en Antarctique.
  • 1908-1910 : Seconde expédition antarctique de Charcot. Il découvre la Terre de Loubet, la côte Fallière, la Baie Margueritte et les îles Charcot, Pavie, Adélaïde, Rotschild et Millerand.
  • Février 1947 : Création des Expéditions polaires françaises (EPF). Paul-Emile Victor en prend la direction jusqu’en 1976.
  • 1949-1951 : Première expédition des EPF en Terre Adélie. Elles construisent la base de Port-Martin et deux hivernages y sont effectués.
  • 1950-1952 et 1951-1953 : Deuxième et troisième expéditions des EPF en Terre Adélie.
  • 23-24 janvier 1952 : La base Port-Martin est détruite par un incendie et l’équipe française s’installe sur l’île des Pétrels dans l’archipel de Pointe Géologie à 5 km du continent, sur le site actuel de la base Dumont d’Urville.
  • Janvier 1956 : création de la base Dumont d’Urville.
  • 1957 : La base Charcot est construite en 1957, pour l’année géophysique internationale, à 320 km de Dumont d’Urville.
  • 1er juillet 1957-31 décembre 1958 : participation de la France à l’Année géophysique internationale (AGI) qui aboutira à la signature du Traité de Washington sur l’Antarctique le 1er décembre 1959 dont la France est Partie signataire originaire. Le Traité entre en vigueur le 23 juin 1961
  • 1959 : Fermeture de la base Charcot.
  • Novembre 1968 : Ve Réunion consultative du Traité sur l’Antarctique (RCTA), présidée par la France et organisée à Paris.
  • 1er juin 1972 : Adoption de la Convention sur la protection des phoques de l’Antarctique, dont la France est Partie originaire.
  • 20 mai 1980 : Adoption de la Convention pour la Conservation de la Faune et de la Flore Marines de l’Antarctique (CCAMLR) dont la France est Partie originaire. Elle entre en vigueur le 7 avril 1982. Au sein de cette organisation, la France défend aujourd’hui l’adoption de règlementations environnementales protectrices des écosystèmes ainsi que la création d’un réseau d’aires marines protégées autour de l’Antarctique.
  • Octobre 1989 : XVe RCTA, présidée par la France et organisée à Paris. La France et l’Australie, sous l’impulsion de leurs Premiers ministres respectifs Michel Rocard et Bob Hawke, refusent de ratifier la Convention sur la réglementation des activités relatives aux ressources minérales de l’Antarctique, élaborée peu avant, et plaident pour un texte international protecteur de l’environnement antarctique.
  • 4 octobre 1991 : adoption du Protocole au traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement antarctique, dit « Protocole de Madrid ». Il entre en vigueur le 14 janvier 1998.
  • Janvier 1992 : fusion des EPF et de la Mission de recherche des TAAF. Création de l’Institut français pour la recherche et la technologie polaires (IFRTP).
  • 1993 : l’IFRTP et son partenaire italien ENEA (Ente per le Nuove Tecnologie, l’Energia e l’Ambiente) signent un accord visant à la construction d’une station franco-italienne sur le Dôme C. Les travaux de construction de la station Concordia débutent deux ans plus tard.
  • 1993 : ouverture des bâtiments d’été pour la réalisation du forage glaciologique EPICA.
  • 1997 : Début du forage EPICA sur le dôme C, auquel la France participe activement.
  • Janvier 2002 : L’IFRTP devient Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV).
  • 15 avril 2003 : Adoption de la loi n°2003-347 relative à la protection de l’environnement en Antarctique. Les TAAF deviennent l’autorité compétente pour réaliser les études d’impact environnemental prévues par le Protocole de Madrid.
  • 2004 : achèvement de la construction de la station d’hiver de Concordia. Le premier hivernage débute l’année suivante où, durant neuf mois, les treize premiers hivernants sont en autonomie totale.
  • 2010-2014 : Le directeur de l’IPEV Yves Frénot préside au nom de la France le Comité pour la protection de l’environnement (CPE) créé par le Protocole de Madrid.
  • 2008 : la CCAMLR décide de s’engager dans la création d’un réseau représentatif d’aires marines protégées (AMP) dans l’océan austral et adopte dans ce cadre une Mesure de conservation concernant les AMP en 2011. C’est dans ce cadre que sera adoptée, en 2016, l’AMP en mer de Ross présentée par les États-Unis et la Nouvelle-Zélande grâce à un soutien au plus haut niveau de l’exécutif américain. L’Union européenne et ses États membres ainsi que l’Australie ont élaboré un projet d’AMP en Antarctique de l’Est dont l’adoption est depuis plusieurs années refusée par deux États en dépit de sa validation par le Comité scientifique de la CCAMLR. La France est très engagée dans l’élaboration et la défense de ce projet.
  • Novembre 2019 : visite en Antarctique de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation.
  • 2020-2021 : la pandémie de la Covid-19 perturbe fortement le fonctionnement des stations scientifiques.
  • Juin 2021 : organisation de la 43e RCTA par la France (c’est la troisième RCTA organisée par la France après 1968 et 1989). La réunion prévue à Helsinki en 2020 a dû être annulée en raison de la pandémie.

Mise à jour : janvier 2021