30e anniversaire du Triangle de Weimar - Déclaration conjointe des ministres des Affaires étrangères de la France, de l’Allemagne et de la Pologne (Weimar, 10 septembre 2021)

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À l’occasion du 30e anniversaire de la fondation du Triangle de Weimar, nous, ministres des Affaires étrangères de la France, de l’Allemagne et de la Pologne, réaffirmons que nous sommes prêts à unir nos efforts et à assumer nos responsabilités pour renforcer de l’Union européenne dans sa capacité à agir et à promouvoir la paix, la sécurité, la démocratie et les droits de l’Homme tout en protégeant ses propres intérêts et ses valeurs fondatrices.

Nous pouvons nous prévaloir de trente années de coopération réussie à la suite de l’adoption le 29 août 1991 à Weimar par Roland Dumas, Hans-Dietrich Genscher et Krzysztof Skubiszewski de la déclaration commune qui fixait comme objectifs de transcender les frontières, de renforcer les liens entre les peuples et les pays dans tous les aspects de leur vie et de promouvoir des structures européennes communes durables. L’adhésion de la Pologne et de ses voisins à l’OTAN et à l’Union européenne ont constitué des étapes importantes dans ce parcours.

Aujourd’hui, la France, l’Allemagne et la Pologne sont des Alliés au sein de l’OTAN et des partenaires au sein d’une Union européenne qui compte 27 États membres. L’Union européenne est confrontée à des problématiques sans précédent, notamment la pandémie de COVID-19, les changements climatiques et plusieurs crises et conflits graves dans notre voisinage et au-delà. Nous sommes convaincus que le Triangle de Weimar peut plus que jamais jouer un rôle déterminant pour permettre à l’Europe de mieux faire face aux problématiques présentes et futures, en renforçant la compréhension mutuelle, en coordonnant les positions et en lançant des initiatives conjointes. Nous mettrons à profit notre étroite collaboration dans le cadre du Triangle de Weimar dans la perspective prochaine de la présidence française du Conseil de l’Union européenne et de la présidence polonaise de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

A la suite d’échanges de vues approfondis sur les questions qui revêtent une importance particulière pour nos trois pays en tant que partenaires de l’Union européenne, nous déclarons ce qui suit :
Nous nous efforçons de poursuivre notre soutien à la population afghane, notamment en apportant une aide pour faire face à l’urgence humanitaire actuelle. Nous appuierons une approche commune de l’Union européenne sur un possible dialogue avec les Talibans, tenant compte de l’évaluation du respect des critères établis. Nous sommes également prêts à soutenir les efforts de l’Union européenne pour renforcer la coopération avec les pays voisins de l’Afghanistan, et entre ces pays, afin de prévenir les risques de déstabilisation régionale. À cette fin, nous appuierons la mise à profit de la connaissance de la région et du savoir-faire thématique de l’OSCE.

Nous sommes gravement préoccupés par la persistance du non-respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales de la population de Biélorussie par les autorités de ce pays, dont la dernière illustration en date est le verdict totalement injustifié prononcé contre Maria Kolesnikova et Maxim Znak. Nous demandons à la Biélorussie de libérer tous les prisonniers politiques, notamment les personnes appartenant à la minorité polonaise.

Nous condamnons l’instrumentalisation à des fins politiques des réfugiés et des migrants vulnérables par le régime biélorusse et nous nous engageons à y faire face de façon unie. Nous exprimons notre entière solidarité avec les États membres de l’UE (Pologne, Lituanie, Lettonie) directement concernés par les agissements de la Biélorussie à ses frontières et nous leur témoignons tout notre soutien.

En ce qui concerne nos relations avec la Russie, nous sommes vivement préoccupés par le non-respect par ce pays de ses obligations et engagements internationaux et de l’ordre international fondé sur des règles de droit. Les agissements de la Russie continuent de nuire à la sécurité euro-atlantique. Nous demeurons vivement préoccupés face à la détérioration continue de la situation en matière de droits de l’Homme et la répression systématique de l’opposition. Nous demeurons attachés à soutenir la société civile en Russie et à poursuivre nos échanges avec elle. Nous continuons d’appeler à un dialogue sélectif et à une coopération dans les domaines d’intérêt commun avec ce pays.

Nous demeurons attachés à l’intégrité territoriale et à la sécurité des pays du partenariat oriental et affirmons notre attachement à un règlement pacifique de l’ensemble des conflits anciens non encore résolus sur leurs territoires, conformément aux principes et aux engagements de l’OSCE. Nous serons heureux de pouvoir coopérer de manière étroite avec la présidence polonaise de l’OSCE en 2022 dans ce domaine. Il n’existe pas selon nous d’alternative à la mise en œuvre des accords de Minsk pour résoudre le conflit dans l’Est de l’Ukraine et dans la région. Aussi sommes-nous prêts à continuer à soutenir le format Normandie ainsi que les négociations sous l’égide du Groupe de contact trilatéral de l’OSCE. Nous soutenons la Mission spéciale d’observation de l’OSCE dans la mise en œuvre de ses attributions. Nous appuyons la mise en place de la plateforme internationale pour la Crimée, conformément à la déclaration conjointe adoptée lors du sommet de cette plateforme le 23 août dernier. Nous continuerons de soutenir le processus de réformes en Ukraine, qui a déjà produit d’importants résultats. Il sera toutefois nécessaire de poursuivre les efforts dans ce sens.

Nous exprimons notre soutien constant à la politique de voisinage, dont nous confirmons l’importance au plan stratégique. À ce sujet, nous nous réjouissons que notre coopération puisse contribuer prochainement au succès du sommet du Partenariat oriental qui se tiendra en décembre.

S’agissant de notre relation avec la République populaire de Chine, il faut que l’Union européenne demeure forte et unie. Nous défendrons nos intérêts et nos valeurs conformément à la Communication conjointe de la Commission européenne et du Service européen pour l’action extérieure « UE-Chine : une vision stratégique », telle que réaffirmée dans les conclusions du Conseil européen des 1er et 2 octobre 2020. Nous continuerons de promouvoir une solide unité de l’UE et de nous montrer solidaires vis-à-vis des États membres subissant des pressions de la part de la Chine. Pour développer nos relations avec l’ensemble de la région, nous nous efforçons de parvenir à une approche solidaire, en donnant un rôle central à la Stratégie européenne pour l’Indopacifique et à une mise en œuvre ambitieuse de la stratégie de l’UE en matière de connectivité.

L’Europe a des intérêts essentiels dans la région indopacifique, tels que des marchés ouverts, des voies maritimes sûres et performantes, mais aussi la protection du climat et de l’environnement. Une stratégie indopacifique ambitieuse doit permettre à l’Union européenne de renforcer son rôle en tant que partenaire actif et garant de la sécurité dans la région et contribuer à affermir et à protéger le multilatéralisme et les principes fondés sur les règles de droit.
L’OTAN joue un rôle essentiel pour assurer la défense collective des Alliés de la zone euro-atlantique. En tant que membres engagés de l’Union européenne comme de l’OTAN, nous nous efforçons de renforcer de manière ambitieuse la coopération entre ces deux organisations. Les menaces et les nouvelles problématiques communes en matière de sécurité auxquelles font face tant les membres de l’Union européenne que de l’OTAN, rendent d’autant plus indispensable une coopération plus étroite, en toute complémentarité. Enfin, le fort engagement de nos pays en faveur de la stabilité du Sahel, à travers des opérations, y compris dans le cadre de l’UE, et les efforts qu’ils mènent au sein de la Coalition pour le Sahel afin de rétablir l’autorité de l’État et l’accès aux services publics dans l’ensemble de la région, témoignent de la constance et de la solidité de notre attachement à la stabilité du Sahel.
Forts de notre attachement commun aux valeurs fondamentales qui forment le socle de nos démocraties et de nos sociétés et le fondement de la liberté, de la sécurité et de la prospérité de l’Europe, nous souhaitons donner un nouvel élan à notre coopération trilatérale :

Pour renforcer la cohésion en Europe, nous estimons qu’il est important de permettre un débat large, transparent et ouvert sur l’avenir de l’Europe visant à garantir le pluralisme, au plan national comme régional et avec la participation de la société civile. Nous soutenons la Conférence sur l’avenir de l’Europe qui offre la possibilité d’approfondir le développement de l’Europe et nous y prendrons part dans le but de favoriser des résultats concrets.
Nous promouvrons la mise en œuvre des nouvelles priorités fixées par le Cadre financier pluriannuel en cours ainsi que par l’Instrument de l’Union européenne pour la relance pour favoriser la relance suite à la pandémie, renforcer la résilience et la souveraineté de l’Europe, promouvoir une croissance durable et assumer le rôle moteur de l’Union européenne dans le domaine du climat. Nous saluons également les propositions ambitieuses de la Commission européenne dans le cadre du paquet « ajustement à l’objectif 55 » pour progresser dans la mise en œuvre du pacte vert pour l’Europe et nous appelons à négocier ce paquet de manière rapide et ciblée afin de permettre une transition véritablement équitable de nos économies.

Nous contribuerons à promouvoir des mesures concrètes visant à renforcer la capacité de l’Union européenne à agir en matière de politique étrangère, de sécurité et de défense, de politique commerciale ou encore de politique numérique afin de renforcer la souveraineté de l’Union européenne et d’accroître son attractivité en tant que partenaire mondial attaché à l’ordre international multilatéral fondé sur des règles de droit.

Trente ans après la création du Triangle de Weimar, la France, l’Allemagne et la Pologne demeurent aussi attachées à renforcer les échanges et la coopération entre leurs sociétés civiles, notamment entre les jeunes, ainsi que les échanges scientifiques et la mobilité étudiante, avec pour objectif d’accroître la connaissance et la compréhension mutuelles au service d’une Europe unie dans la diversité.

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