Kiss & Tell, une innovation en matière de prévention du diabète de type II et d’auto-surveillance glycémique. (30/09/2015)

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Hong Kong

Rapport
Hong Kong | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
15 octobre 2015

Article publié le 30/09/2015

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le diabète touchait 9 % de la population mondiale en 2014 . Le diabète de type II représentait à lui seul 90 % des cas recensés [1]. Ce type de diabète est également la forme la plus fréquente de la maladie à Hong Kong. En 2013, le gouvernement de Hong Kong estimait, en effet, qu’environ une personne sur 10 était atteinte de diabète de type II, ce qui représentait 700 000 personnes malades. De plus, le gouvernement émettait l’hypothèse d’un nombre plus important et croissant de patients atteints de diabète, estimant qu’une grande partie de la population touchée n’est pas encore diagnostiquée [2].

Le diabète est une maladie chronique qui apparaît lorsque le pancréas ne produit pas suffisamment d’insuline ou que l’organisme n’utilise pas correctement l’insuline qu’il produit. Cette hormone joue un rôle dans la régulation de la concentration de sucre dans le sang [1].
Le diabète de type II, qui est la forme la plus fréquente de la maladie à Hong Kong [2], correspond au deuxième cas de figure. Il est lié à une baisse de la sensibilité des cellules à l’insuline entraînant une élévation chronique de la concentration de glucose dans le sang [1,3].
Ce type de diabète est en grande partie le résultat d’une surcharge pondérale et d’un mode de vie sédentaire [1,3]. Une étude réalisée par des chercheurs américains du Saint Luke Mid America Heart Institute à Kansas city et du Albert Einstein College à New-York démontre qu’il résulterait également d’une consommation excessive de fructose ajouté. Ce composé est contenu dans les aliments transformés sous forme essentiellement de sirop de maïs [4].

Les conséquences néfastes du diabète de type I ou II sont nombreuses [1,3] :

  • La maladie augmente ainsi le risque de cardiopathie et d’accident vasculaire cérébral. D’après l’OMS, 50 % des personnes atteintes mourraient d’une maladie cardio-vasculaire.
  • Elle augmente la probabilité d’apparition d’ulcères des pieds, d’infections et, dans le pire des cas, d’amputation des membres.
  • Le diabète peut être une cause de cécité (rétinopathie), liée à des lésions des petits vaisseaux sanguins de la rétine s’accumulant avec le temps.
  • La maladie peut être à l’origine d’insuffisance rénale.

Lorsque le diabète est diagnostiqué, la prise en charge est alors essentielle afin de lutter contre la maladie et ses complications. Le premier élément de la prise en charge du diabète est la modification des habitudes alimentaires et la pratique régulière d’une activité physique. Il est également nécessaire d’effectuer une surveillance glycémique (mesure de la concentration de glucose sanguin), prescrite par le médecin en fonction du type de diabète et de traitement. La glycémie se surveille actuellement de deux façons [5] :

  • Tous les 3 mois, en laboratoire d’analyse, on mesure l’hémoglobine glyquée (HbA1c).
  • Par lecteur de glycémie, le patient peut contrôler plusieurs fois par jour sa glycémie vasculaire capillaire (à partir d’une goutte de sang) à des moments précis. C’est ce qu’on appelle l’auto-surveillance glycémique.

Dans le cas du diabète de type II, on distingue le diabète non insulino-dependant et le diabète insulino-dépendant (DID). Dans le deuxième cas, le malade reçoit comme traitement des injections d’insuline (insulinothérapie) ; on parle alors de diabète insulino-traité.. Ce traitement est mis en place lorsque les traitements médicamenteux oraux et non insuliniques ne permettent pas d’atteindre l’objectif glycémique. Il intervient donc après une certaine évolution de la maladie [6,7].

Dans ce cas, comme dans tous les cas de diabète de type I, l’auto-surveillance glycémique est indispensable ; elle peut être également nécessaire pour les diabétiques de type 2 non insulino-traités. Elle sert avant tout à contrôler et prévenir les déséquilibres de la glycémie du malade (Tableau 1) et à adapter son traitement. Mais elle permet aussi de voir l’effet d’un aliment ou d’une activité physique sur la glycémie [5].

Tableau 1 : Différents états de la glycémie sanguine.


Kiss and Tell, un nouveau test permettant de contrôler sa glycémie.

Actuellement, pour contrôler la glycémie, des lecteurs de glycémie sont utilisés. L’utilisateur doit opérer au préalable un nettoyage consciencieux de ses mains. Ensuite, il utilise un stylo “auto-piqueur” permettant le prélèvement d’une goutte de sang qui sera déposée sur une bandelette. Enfin, le lecteur de glycémie indique le résultat. Les lancettes (aiguilles fines) utilisées, ainsi que les bandelettes doivent être jetées après chaque utilisation [5]. Cette procédure nécessite donc de disposer de tout le matériel nécessaire et de prendre des précautions en matière d’hygiène.

Pour simplifier l’auto-surveillance glycémique, l’entreprise « eNano Health », fondée par deux hongkongais, Mme Winnie Lun, actuelle PDG de l’entreprise, et Dr Patrick Leung, a mis en place un nouveau test de glycémie, nécessitant de prélever uniquement un échantillon de salive, plus simple d’utilisation, moins coûteux et moins invasif [8,9].
En effet, bien que la quantité de glucose présent dans la salive est plus faible que celle dans le sang, il existe une forte corrélation entre les concentrations de glucose salivaire et sanguin. Cela est particulièrement vrai lorsque le niveau de glucose est supérieur à la normale.

Le principe de “Kiss and Tell” est simple : l’utilisateur doit déposer, deux heures après le repas, un échantillon de salive sur une bandelette d’analyse se trouvant dans un petit appareil en plastique, produit à Hong Kong. La bandelette, qui est composée d’un biocapteur, change alors de couleur selon le niveau de concentration de glucose dans l’échantillon. Si ce niveau de concentration est supérieur au taux normal, la bandelette devient rose. La couleur peut alors varier du rose pâle (taux légèrement supérieur à la normale) au rose foncé (taux vraiment supérieur à la normale). Grâce au code QR placé sur l’appareil, il est ensuite possible avec un téléphone d’obtenir le résultat chiffré du test.
“Kiss and Tell” ne mesure pas les niveaux de concentration de glucose inférieurs à la normale. Il s’adresse donc, en priorite, aux diabétiques de type II non insulino-traités qui doivent contrôler leur glycémie, mais aussi aux personnes qui présentent un risque de développer la maladie. En effet, à Hong Kong, 50 % des personnes à risque ne savent pas que leur glycémie est si élevée [9]. Cet objet a donc été conçu pour que ces personnes puissent surveiller leur état de santé elles-mêmes.

“Kiss and Tell” répond donc également à un objectif de prévention et de traitement du diabète quand il est encore à un stage précoce. Winnie Lun, co-fondatrice d’« eNano Health », rappelle en effet que, si la maladie est détectée suffisamment tôt, elle peut être traitée sans intervention médicale, en adoptant un mode de vie sain [9].

L’appareil, qui semble constituer une importante innovation en matière de prévention et de prise en charge du diabète de type II, est déjà proposé sur le site internet de « Happy retired », une entreprise de Hong Kong qui propose aux retraités des activités et des informations relatives à la santé.

« eNano Health » est aussi en discussion pour une commercialisation de son produit dans des chaînes de pharmacies aux Etats-Unis et au Royaume-Uni] et travaille à l’amélioration du produit afin que celui-ci devienne entièrement électronique et qu’il ne soit plus nécessaire d’utiliser des bandelettes [8].

“Kiss and Tell” semble pouvoir révolutionner le quotidien des malades. Cependant, il est important de noter qu’il ne peut être utilisé par les personnes atteintes de diabète insulino-dépendant de type I ou II alors que c’est précisément pour ce type de diabète que l’autosurveillance glycémique est indispensable. Ce produit pourrait donc être amélioré en vue d’une extension de la gamme de dosage des concentrations en glucose salivaire et de son usage à toutes les personnes diabétiques.

Sources :

[1] Organisation Mondiale de la Santé : Diabète, Aide-mémoire N°312, Janvier 2015
http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs312/fr/
[2] Primary care office, Hong Kong Department of health, Hong Kong Reference Framework for Diabetes Care for Adults in Primary Care Settings, 2013, Chapter 1-Epidemiology
http://www.pco.gov.hk/english/resource/files/RF_DM_full.pdf
[3] Haute Autorité de Santé, Octobre 2014, http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2015-02/7v_referentiel_2clics_diabete_060215.pdf
[4] Le Monde, 30/01/2015, http://www.lemonde.fr/sante/article/2015/01/30/le-fructose-est-le-principal-moteur-du-diabete_4566577_1651302.html
[5] Site de la Fédération Française des Diabétiques,
http://www.afd.asso.fr/diabetique/glycemie/mesurer
[6] Haute Autorité de Santé, Janvier 2013, http://www.afd.asso.fr/sites/default/files/synth_diabete_type_2_objectif_glycemique_HAS.pdf
[7] Site de la Fédération Française des Diabétiques, http://www.afd.asso.fr/node/69
[8] HKTDC, Hong Kong means business, http://hkmb.hktdc.com/en/1X0A2ZMH/venture-hong-kong/Kiss-and-Tell/
[9] SCMP, 08/06/2015, http://www.scmp.com/news/hong-kong/article/1818171/kiss-and-tell-inventors-device-painless-way-catch-diabetes-early ¬¬

Rédacteur :

Julie DUGAS, Stagiaire de mission scientifique - Hong Kong