L’édition génomique CRIPSR/Cas9 ouvre de nouvelles pistes de traitement du VIH

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Chine

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Chine | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
1er mai 2016

Deux études réalisées en Chine montrent que la technique innovante d’édition génomique CRISPR/Cas9 ouvre de nouvelles voies de traitement, notamment contre le VIH, mais relance le débat sur la manipulation génétique.

CRISPR/Cas9, connu sous le nom de « couteau suisse moléculaire », est un outil du génie génétique pour induire des ruptures double brin dans l’ADN. Cette technique a été développée par plusieurs chercheurs parmi lesquels la chercheuse française Emmanuelle Charpentier, candidate potentielle au prix Nobel de chimie 2016.

Une première étude, publiée dans le journal américain Cell Reports et réalisée par une équipe de chercheurs canadiens et chinois, montre que la CRIPSR/Cas9 devra faire l’objet de recherches supplémentaires avant de constituer un outil antiviral efficace. Après l’infection d’une cellule par un virus, le génome du virus contenu dans l’ARN (acide ribonucléique) est libéré. Puis l’ARN pénètre dans le noyau de la cellule où il est transcrit en ADN par transcriptase inverse et c’est ainsi que la CRISPR/Cas9 est programmée pour cibler la séquence d’ADN infectée et la couper. S’ensuit alors la phase de réparation de l’ADN par le mécanisme de Jonction d’Extrémités Non Homologues (NHEJ) donnant lieu à des indels [1]. L’étude montre que ces indels pourraient être létaux pour le VIH-1 (type de VIH étudié ici), mais pourraient dans certains cas engendrer la mutation de ce dernier qui deviendrait résistant à la CRISPR/Cas9. En effet, une substitution minuscule d’un seul nucléotide modifie la séquence d’ADN de sorte que la CRISPR/Cas9 ne la reconnaît plus. Cette observation montre par conséquent deux résultats opposés de l’efficacité de la CRISPR/Cas9, à savoir l’inactivation du VIH-1 et une accélération du mécanisme de l’échappement viral.

Dans le cadre d’une deuxième étude, une équipe de chercheurs chinois de la Guangzhou Medical University a révélé avoir modifié à l’aide de l’outil CRISPR/Cas9 des gènes d’embryons humains afin de les rendre résistants au VIH. Le professeur FAN Yong, premier auteur de la publication, a déclaré que les 26 embryons utilisés n’étaient pas viables et incapables de se développer, que la recherche avait été approuvée par le comité d’éthique du Third Affiliated Hospital of Guangzhou Medical University et que tous les embryons ont été détruits trois jours après l’expérimentation. Les résultats ont montré que seulement quatre des embryons ont pu être modifiés avec succès et que les autres ont présenté des mutations imprévues. La publication a déclenché de nombreuses réactions au sein de la communauté scientifique qui craint une mauvaise utilisation de cette technique qui glisserait peu à peu vers une nouvelle forme d’eugénisme.

La CRISPR/Cas9 donne un nouvel espoir d’élaboration de traitements, non seulement pour le VIH mais aussi pour beaucoup d’autres virus ou autres formes de maladies telles des maladies héréditaires ou des cancers. Cependant cette technique peut être contestée pour des raisons éthiques et est aujourd’hui encore trop immature pour des essais cliniques.

[1] Indel : insertion ou délétion dans une séquence biologique par rapport à une séquence de référence et étant souvent à l’origine de l’altération de la fonction de l’ADN

En savoir plus

http://www.nature.com/news/second-chinese-team-reports-gene-editing-in-human-embryos-1.19718

Sources

http://www.ecns.cn/2016/04-08/205993.shtml
http://www.ecns.cn/2016/04-13/206429.shtml

Rédacteur

Christophe LAUGÉ : christophe.lauge[a]diplomatie.gouv.fr