Cancer : facteurs d’échec des traitements anti-angiogéniques

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Canada | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie
29 avril 2016

Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université de Toronto a mis en évidence que les tumeurs pouvaient contourner l’effet des inhibiteurs de l’angiogenèse en s’appropriant des vaisseaux sanguins de tissus sains environnants.
Les résultats, publiés dans le Journal of the National Cancer Institute, pourraient expliquer pourquoi certaines tumeurs cessent de répondre au traitement.

« Pour qu’un cancer se développe au-delà de la taille d’une tête d’épingle, il a besoin de produire plus de vaisseaux sanguins », explique l’auteur principal Robert Kerbel, professeur au département de biophysique médicale de la Faculté de médecine de l’université de Toronto.

Les vaisseaux sanguins fournissent l’oxygène et les nutriments nécessaires aux tumeurs. En empêchant la formation de nouveaux vaisseaux sanguins (processus connu sous le nom d’angiogénèse), les traitements médicamenteux peuvent prévenir le développement du cancer et sa propagation à d’autres parties du corps. Mais les tumeurs développent presque toujours une résistance aux traitements.

Pour en comprendre les raisons, le Pr. Kerbel et l’une de ses étudiantes, Elizabeth Kuczynski, ont axé leur recherches sur le carcinome hépatocellulaire (CHC), un type de cancer du foie pour lequel il n’y a qu’une seule thérapie autorisée : le Sorafenib, un médicament anti-angiogénique. Alors que 35 à 43% des tumeurs CHC peuvent être initialement contrôlées par le médicament, elles développent inévitablement une résistance au traitement. « Le sorafénib est un médicament très toxique. Lorsque les tumeurs répondent, les patients en retirent un bénéfice indéniable, mais il existe des effets secondaires importants et les tumeurs finissent toujours par devenir résistantes » explique le Pr. Kerbel, qui est aussi chercheur principal à l’Institut de Recherche Sunnybrook.

En collaboration avec d’autres chercheurs à Toronto et en Grande-Bretagne, le Pr. Kerbel a montré que les tumeurs CHC résistantes au Sorafenib comptaient sur les vaisseaux sanguins existants dans le tissu hépatique sain voisin du foie au lieu de former de nouveaux vaisseaux sanguins pour soutenir sa croissance.
« Ces cellules tumorales sont très intelligentes, elles usurpent le réseau de vaisseaux sanguins normal qui est présent dans cet organe. » En revanche, les tumeurs CHC qui sont tenues en échec par le Sorafenib comptent uniquement sur de nouveaux vaisseaux sanguins générés par l’angiogenèse.

En « volant » des vaisseaux sanguins existant, processus appelé cooptation de vaisseaux, les tumeurs n’ont pas besoin de développer leur propre réseau, ce qui rend les thérapies anti-angiogéniques inefficaces.

Les chercheurs ont également constaté que les tumeurs CHC résistantes au Sorafenib ont subi un changement génétique qui permet aux cellules tumorales de devenir plus mobiles et infiltrer les tissus adjacents. Leurs résultats fournissent des informations importantes sur la façon dont les tumeurs deviennent résistantes aux traitements et identifient deux nouvelles cibles potentielles pour des nouveaux traitements : le passage de l’angiogenèse à la cooptation de vaisseaux et les vaisseaux sanguins cooptés eux-mêmes.

« Peut-être que l’on pourrait faire quelque chose pour retarder ce changement, de sorte qu’au lieu de se produire au bout de trois mois, il arriverait au bout de trois ans », d’après le Pr. Kerbel. « Cela aurait un effet sur la prolongation de la survie des patients. »

Pour en savoir plus :
Journal of the National Cancer Institute  : “Co-option of Liver Vessels and Not Sprouting Angiogenesis Drives Acquired Sorafenib Resistance in Hepatocellular Carcinoma
Journal of the National Cancer Institute , 2016, Vol. 108, No. 8 doi : 10.1093/jnci/djw030
http://jnci.oxfordjournals.org/content/108/8/djw030

Source :
Nouvelles de la Faculté de Médecine de l’Université de Toronto- 19 avril 2016
http://medicine.utoronto.ca/news/why-anti-angiogenesis-treatment-fails

Rédacteur :
Sophie DECAMPS – Chargée de Mission pour la Science et la Technologie à Toronto – sophie.decamps[a]diplomatie.gouv.fr