La supraconductivité à plus haute température

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Allemagne | Science de la matière : matériaux, physique, chimie, optique
28 août 2015

Des chercheurs de l’Institut Max Planck de Chimie (MPIC) et de l’Université Johannes Gutenberg de Mayence (Rhénanie-Palatinat) ont observé que le sulfure d’hydrogène (H2S) devenait supraconducteur à une température de -70°C sous une pression de 1,5 Mbar. C’est pour l’instant le premier matériau identifié qui annule sa résistance électrique à une température aussi élevée.

La supraconductivité est la propriété d’un matériau à conduire le courant à résistance nulle, c’est-à-dire sans perte par effet Joule. Pour l’obtenir, il faut atteindre des températures très basses, pour les matériaux les plus connus. Par exemple, la céramique de cuivre possède une température de transition, (température au-dessous de laquelle elle perd sa résistance) de -140°C à pression atmosphérique, et de -109°C à haute pression. Les autres supraconducteurs ont en moyenne une température de transition de -240°C.

Pour transformer le sulfure d’hydrogène, qui est un gaz sous pression atmosphérique et à température ambiante, en solide, les scientifiques l’ont soumis à une pression de 1,5 Mbar, ce qui correspond à la moitié de la pression qui règne dans le noyau de la Terre. Le dispositif expérimental se compose d’une cellule d’un volume inférieur à 1 cm3. Le sulfure d’hydrogène est introduit dans la cellule ; deux pointes en diamant agissent comme des enclumes sur l’échantillon et la pression augmente graduellement. La température est aussi modifiée à chaque pallier de pression. Des contacts électriques sur la cellule servent à mesurer la résistance électrique du matériau. Par ailleurs, les propriétés magnétiques sont mesurées, puisque celles-ci se modifient à la température de transition.

Les mesures ont permis d’observer la supraconductivité du sulfure d’hydrogène pour des températures inférieures ou égales à -70°C. Ils considèrent que les atomes d’hydrogène sont responsables de la chute de la résistance dans ces conditions de température plus élevées que la moyenne. En effet, dans le réseau d’atomes constituant le matériau, les atomes d’hydrogène oscillent à une fréquence plus élevée que les autres éléments, en raison de leur plus faible masse. Or, plus la fréquence des oscillations est élevée, plus la température de transition augmente.

Les scientifiques se consacrent maintenant à identifier des matériaux ayant une température de transition supérieure. Il a déjà été observé, théoriquement et expérimentalement, qu’une augmentation de la pression au-dessus de 1,5 Mbar n’améliore pas les résultats avec le sulfure d’hydrogène. En effet, en appliquant une plus haute pression à la cellule, la structure électronique est modifiée, et la température de transition diminue. L’hydrogène seul a déjà été étudié, mais la réalisation de l’expérience est techniquement contraignante, car des pressions de 3 voire 4 Mbar seraient requises.

L’objectif à plus long terme est d’être capable de convertir le caractère isolant de matériaux comme le sulfure d’hydrogène en caractère conducteur comme les métaux, à température ambiante. Les matériaux polymères riches en hydrogène sont de bons candidats. Les applications pourraient couvrir de nombreux champs comme les réseaux de transport d’électricité ou les appareils électroniques.

Plus d’informations :

  • Publication scientifique : A. P. Drozdov, M. I. Eremets, I. A. Troyan, V. Ksenofontov & S. I. Shylin, “Conventional superconductivity at 203 kelvin at high pressures in the sulfur hydride system”, Nature, 2015. DOI : 10.1038/nature14964

Source : “Supraleitung : Widerstandslos bei Rekordtemperaturen”, Communiqué de presse de l’Institut Max Planck de Chimie, 17/08/2015 - http://www.mpic.de/aktuelles/pressemeldungen/news/supraleitung-widerstandslos-bei-rekordtemperaturen.html

Rédacteur : Aurélien Gaufrès, aurelien.gaufres[at]diplomatie.gouv.fr – www.science-allemagne.fr