La maladie d’Alzheimer serait la combinaison de plusieurs désordres qui devraient être traitées séparément

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Brève
Israël | Biologie : médecine, santé, pharmacie, biotechnologie | Silver économie : l’innovation pour la longévité
5 février 2016

Le professeur Ehud Cohen de la faculté de Médecine de l’Institut de Recherche Moléculaire et de Biochimie de l’Université Hébraïque de Jérusalem et son équipe travaillent sur le lien entre les processus du vieillissement aboutissant à des désordres biologiques. Ils investiguent donc (i) l’action du vieillissent sur les cellules aux niveaux biologique et génétique, (ii) le repliement des protéines et leur agrégation au sein des cellules et (iii) le contrôle du vieillissement pour lutter contre les maladies neurodégénératives.

La maladie d’Alzheimer à travers le monde

Dans les pays développés, la maladie d’Alzheimer représente un véritable problème de santé publique mondial. En 2005, elle touchait environ 26 millions de personnes dans le monde et devrait en toucher quatre fois plus en 2050 compte tenu du vieillissement prévisible de la population des pays industrialisés. Elle est parmi les 10 principales causes de mort dans le monde. Aux Etats-Unis, environ 5.3 millions de personnes sont touchées et chaque minute, une nouvelle personne développe la pathologie selon « Alzheimer ’s Association ». Il s’agit d’une pathologie actuellement incurable, très couteuse pour la société, tant pour la famille et l’entourage proche que pour l’ensemble des structures intervenant à chaque étape de la prise en charge. Il convient, en effet, de prendre en compte l’ensemble des dépenses de santé relatives aux soins à prodiguer aux patients (thérapeutique, ergothérapie, kinésithérapie, coût engendré par l’aggravation des pathologies associées, soins à domicile ou en institution…) mais aussi le coût social du patient lié à la dépendance (aide ménagère, auxiliaire de vie, prestations spécifiques…). A ces dépenses, il conviendrait d’ajouter les coûts connexes et difficilement quantifiables liés, par exemple, aux arrêts de travail de l’entourage, au soutien psychologique, voire médical, dont le patient peut avoir besoin. Il existe donc de nombreux budgets alloués aux équipes de recherche pour trouver un traitement efficace et curatif.

La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative, c’est-à-dire, une perte de neurones dans le tissu cérébral. Elle entraine la perte progressive et irréversible des fonctions mentales et de la mémoire. Les premiers symptômes sont la perte de souvenir à court terme. L’évolution de la maladie entraine ensuite des troubles cognitifs plus sévères comme des confusions, l’irritabilité, l’agressivité, des troubles de l’humeur, des émotions et des fonctions exécutives du langage ; la perte de mémoire à long terme. Le stade sévère de la maladie entraine la perte des fonctions autonomes et la mort. La vitesse d’évolution de la maladie est fonction des individus, et l’espérance de vie varie entre 3 et 8 ans. Les traitements de la maladie ne stoppent pas sa progression et sont d’ordre palliatif limitant les symptômes. Pour limiter le développement de la maladie, il est recommandé aux personnes âgées une stimulation cognitive quotidienne, de l’exercice physique et un régime alimentaire équilibré.

Dans cette maladie, il existe deux types de lésions cérébrales à savoir les plaques séniles et les dégénérescences neurofibrillaires. Bien que les facteurs entrainant ces lésions n’ont pour l’instant pas été mis en exergue, il a été montré que des facteurs génétiques et environnementaux contribuent à son apparition et à son développement. Par ailleurs, certaines anomalies génétiques, les problèmes cardio-vasculaires ou encore l’intoxication à certains métaux lourds sont des facteurs à risque de la maladie. Les principales pistes de recherche pour développer un traitement visent à s’attaquer aux plaques amyloïdes qui se forment entre les neurones au cours de la maladie et aux agrégats de protéines tau formant les dégénérescences neurofibrillaires à l’intérieur des neurones. De nombreux chercheurs essayent également de mieux comprendre les mécanismes de la maladie et de l’analyser sous un nouvel angle. C’est le cas du Professeur Cohen et de son équipe de la faculté de Médecine de l’Institut de Recherche Moléculaire et de Biochimie de l’Université Hébraïque de Jérusalem.

Le secret des protéines responsables de la pathologie

Afin de mieux comprendre la physiopathologie, certains liens doivent être établis. Le principal est : Pourquoi les personnes développent cette maladie au moment du vieillisement ? Les troubles de dégénérescence proviennent d’un mauvais repliement des protéines. Les protéines sont des macromolécules tridimensionnelles, qui possèdent une forme particulière très précise, qui leur confère leur activité. Cette forme est obtenue au cours de la synthèse des protéines par le biais de mécanismes complexes qui font intervenir des protéines associées. La diminution de l’activité des protéines associées peut avoir plusieurs origines, à savoir des mutations génétiques ou des causes infectieuses, qui aboutissent à la même maladie. Ainsi pour soigner cette pathologie, il serait essentiel de mieux cibler les mécanismes sous-jacents et de les traiter de manière individuelle.

Modèle d’étude du vieillissement cellulaire

Le modèle d’étude principal des phénomènes de vieillissement cellulaire est le Caenorhabditis elegans. Il s’agit d’un petit ver de quelques millimètres menant une vie non parasitaire. Son embryogenèse ne dure que 16 heures et peut être facilement observée in vitro. Ce nématode se reproduit environ tous les trois jours, et sa durée de vie est d’environ trois semaines. Il peut être observé encore vivant au microscope bi photonique. Les mécanismes de vieillissement retrouvés chez le ver peuvent être extrapolés aux mammifères. De plus, il est possible de créer des vers transgéniques pour transférer différentes souches de cellules. Les dosages de protéines sont basés sur des techniques de biochimie classiques. Ces vers sont transparents, il est donc facile d’utiliser des protéines fluorescentes utilisées en immuno-histochimie. Il est également possible de moduler les gènes de cet organisme en utilisant des SiARN.
Grace à ce système, le Pr. Ehud Cohen et le Dr. Tziona Ben-Gedalya ont montré une malformation de la protéine « cyclophiline B » qui aide les protéines naissantes à atteindre leur conformation. Elle serait donc impliquée dans le développement de la maladie d’Alzheimer engendrant à terme la dégénérescence et la mort neuronale. avec le concours d’autres mécanismes. Pour le Pr Cohen, il est essentiel de qualifier tous ces mécanismes qui aboutissent à la pathologie. En effet, tous les patients pourraient présenter des symptômes identiques (une dégénérescence des neurones) mais avec des causes distinctes (stress oxydant, …). Les traitements actuels sont des inhibiteurs à la destruction du neuromédiateur appelé acetylcholine, ou des antiglutamates (antagonistes des récepteurs NMDA du glutamate). D’après les résultats du Pr Cohen, les nouveaux traitements pourraient également être basés sur les mécanismes de détoxification pour éliminer ces protéines présentant une mauvaise conformation.

Sources : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=Alzheimer%27s+Disease-Causing+Proline+Substitutions+Lead+to+Presenilin+1+Aggregation+and+Malfunction
https://medicine.ekmd.huji.ac.il/en/publications/researchersPages/pages/ehudc.aspx#Top

Auteur : Angèle Cortial, Volontaire internationale chercheuse à l’Institut de Recherche des Médicaments – Ecole de Pharmacie, Faculté de Médecine, Université Hébraïque de Jérusalem.