La France dans la politique spatiale européenne

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Dans le domaine spatial, le cadre européen constitue le niveau le plus pertinent pour atteindre les objectifs de la France dans de nombreux programmes d’envergure. La France prend donc une part active dans la mise en œuvre de la Politique spatiale européenne (PSE) et de grands programmes emblématiques de l’Union européenne (Galileo et Copernicus).

Un cadre européen de coopération

Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE) participe aux travaux des instances ministérielles chargées d’élaborer la position de la France en matière de politique spatiale européenne et siège au sein des délégations françaises dans les différentes enceintes traitant ces questions, notamment dans le cadre de l’Union européenne, de l’Agence spatiale européenne (ESA) qui comprend désormais 22 États membres, du groupe de haut niveau UE-ESA pour les questions spatiales.

Au niveau ministériel, le Conseil de l’ESA arrête les décisions relatives aux programmes de l’Agence. À Berlin, lors de sa session des 5 et 6 décembre 2005, il avait notamment adopté une résolution relative à la préférence européenne en matière de lanceurs pour les missions de l’ESA. En mars 2006, la France avait alors décidé, à titre national, d’appliquer ce principe aux missions institutionnelles françaises. Le Sommet franco-italien du 30 novembre 2007 a également adopté une déclaration franco-italienne sur la préférence européenne en matière d’accès à l’espace. Le lancement du petit lanceur Vega (13 févier 2012) permet désormais à l’Europe de disposer d’une gamme complète de lanceurs (lourd avec Ariane 5, moyen avec Soyouz depuis le CSG et léger avec Vega).

Le Conseil ministériel de l’ESA de décembre 2014 au Luxembourg a permis de statuer sur les relations entre l’ESA et l’Union européenne, le rôle de l’Europe dans l’exploration scientifique de l’espace et l’avenir des lanceurs européens. Le Conseil ministériel de décembre 2016 à Lucerne (Suisse) a confirmé ces orientations, en actant notamment définitivement les programmes de lanceurs Ariane 6 et Vega C.

Historique

La signature en novembre 2003 de l’accord-cadre régissant la coopération entre l’Union européenne et l’Agence spatiale européenne et la publication par la Commission européenne du Livre blanc intitulé « Espace : une nouvelle frontière européenne pour une Union en expansion », ont jeté les bases d’une future politique spatiale européenne. Ces initiatives ont permis la création d’un secrétariat conjoint UE-ESA - en application de l’accord-cadre UE-ESA - et du groupe de haut niveau (HSPG high level policy group), installé vers la mi-2004.

L’entrée en vigueur du Le Traité de Lisbonne constitue un nouveau jalon dans l’organisation institutionnelle du secteur spatial au niveau européen. Il fait de l’espace une compétence partagée entre l’Union européenne et ses États membres (art.4). Le Traité prévoit (art. 189) que l’Union européenne peut "élaborer une politique spatiale, promouvoir des initiatives communes, soutenir la recherche et le développement technologique". Dans ce cadre, le Parlement européen et le Conseil peuvent établir les mesures nécessaires, "à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres".

Se fondant sur les dispositions de l’article 189, le Conseil européen du 16 septembre 2010 a donc modifié la liste des formations du Conseil, ajoutant le volet "espace" aux trois volets "marché intérieur, industrie, recherche" couverts par le Conseil compétitivité. En conséquence, c’est désormais au groupe "Recherche" du Conseil, créé à la suite de la décision du Conseil européen qu’il revient de préparer les travaux du Conseil espace (et non au groupe à haut niveau UE-ESA).

En octobre 2016, la Commission européenne a adopté une stratégie spatiale pour l’Europe, confirmant le rôle croissant de l’UE dans ce domaine. Le document, qui pose les bases de l’action spatiale européenne pour les prochaines décennies, identifie quatre priorités stratégiques : renforcer les bénéfices socio-économiques du spatial, soutenir la compétitivité de l’industrie spatiale européenne, garantir l’autonomie stratégique de l’Europe en matière spatiale, et faire de l’Europe un acteur diplomatique majeur de la scène spatiale mondiale.

Les avancées sous présidence française

Auparavant, le Conseil Espace, dont la première réunion remonte au 25 novembre 2004,, était adossé au Conseil compétitivité et au Conseil de l’ESA au niveau ministériel. Il constituait l’enceinte dans laquelle étaient définies les orientations de la politique spatiale européenne. Le 4ème Conseil Espace (mai 2007) avait ainsi permis d’adopter une résolution sur la "politique spatiale européenne".

Lors du 5e Conseil Espace (26 septembre 2008), tenu sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne, une résolution intitulée « faire progresser la politique spatiale européenne » avait été adoptée. Celle-ci rappelait que la politique spatiale européenne repose sur trois piliers : l’Union européenne, l’Agence spatiale européenne et leurs États membres. Elle proposait de nouvelles initiatives, notamment en matière de contribution des technologies spatiales à la lutte contre le changement climatique, à la compétitivité et à l’emploi et à la sécurité de l’Europe.

Les conclusions de la présidence du Conseil européen des 11-12 décembre 2008 ont identifié « les technologies spatiales et les services qui en découlent » parmi les technologies du futur s’inscrivant dans le cadre de la stratégie de Lisbonne au-delà de 2010 et ayant vocation à être incluses dans le « plan européen pour l’innovation ».

La Présidence française de l’Union européenne a permis de réaliser une avancée significative en matière de contribution des technologies spatiales à la défense et à la sécurité de l’Europe. La déclaration du Conseil du 8 décembre 2008 sur le renforcement des capacités de la politique européenne de sécurité et de défense a décidé de renforcer l’information et le renseignement spatial, par la mise à disposition d’imagerie des satellites Cosmo-Skymed et Hélios 2 au Centre satellitaire de l’Union européenne (CSUE), et la signature d’une lettre d’intention en ce sens pour SAR-Luppe, la préparation d’une nouvelle génération de satellites d’observation (programme MUSIS) et la prise en compte des besoins militaires dans la surveillance de l’Espace.

Par ailleurs, sur le plan politique, un premier projet de Code de conduite de l’Union européenne sur les opérations spatiales a été officiellement publié lors du Conseil affaires générales/relations extérieures du 8 décembre 2008. A l’issue d’une première phase de consultations, un nouveau projet a été adopté par le Conseil de l’UE le 27 septembre 2010.

Aspects budgétaires

Lors du Conseil ministériel de Lucerne (1er et 2 décembre 2016), le montant des contributions des États membres aux programmes de l’Agence a été porté à plus de 10,3 Mds € (dans le prolongement des 8 Mds € déjà alloués en 2014 à Luxembourg). Ces contributions sont destinées à des programmes couvrant notamment les domaines de l’accès autonome à l’Espace (développement de la filière lanceurs, financement du Centre spatial guyanais, préparation de l’avenir), de l’exploration spatiale (poursuite du programme d’exploration robotisée de Mars, participation à l’exploitation de la Station spatiale internationale), et des applications (en particulier l’observation de la Terre avec Copernicus et les télécommunications spatiales). . Le prochain Conseil ministériel de l’ESA se tiendra à à Madrid (Espagne) en 2019.

L’exploration spatiale
Les missions d’exploration spatiale ne peuvent se concevoir que dans le cadre d’une coopération au niveau mondial. La première conférence sur l’exploration spatiale, dont le principe avait été décidé lors du 5ème Conseil espace (26 septembre 2008), s’est tenue les 22-23 octobre 2009 à Prague. Lors de la 2ème conférence sur l’exploration (21 octobre 2010), tenue, sous présidence belge de l’Union européenne, a été décidée la création du forum politique qui sera chargé de définir les grandes lignes d’un programme mondial d’exploration, d’identifier les objectifs scientifiques et d’établir une cartographie des compétences. L’Italie a accueilli la première réunion de ce forum à Lucques les 9-10 novembre 2011. Après une seconde réunion du forum à Washington en (9 décembre 2014), une troisième réunion se tiendra à Tokyo le 3 mars 2018.

Le programme Galileo

Lancé en 1999 par l’Union européenne pour doter l’Europe d’un système de positionnement et de datation autonome, de couverture mondiale, précis et robuste, compatible et interopérable avec les systèmes existants (GPS américain et GLONASS russe), Galileo offre depuis décembre 2016 aux utilisateurs un certain nombre de « services initiaux » qui sont appelés à grandir jusqu’à atteindre en 2020 leur pleine capacité opérationnelle.

Après l’abandon du principe de la concession, le Conseil Transports de l’Union européenne a défini en novembre 2007 les conditions d’une relance du programme, fondé sur le déploiement du système avec des moyens publics et un financement communautaire.

Sur le plan institutionnel, le règlement 683/2008 du Parlement européen et du Conseil a confié à la Commission européenne la responsabilité de la gestion des programmes européens de navigation par satellites et celle de la gestion des homologations de sécurité et de l’exploitation des centres de sécurité à l’Agence du GNSS européen. Le règlement 912/2010 du Parlement européen et du Conseil, adopté le 22 septembre 2010, modifie le règlement 683/2008 en précisant les modalités d’exercice des compétences de l’Agence du GNSS européen. Le règlement 1285/2013, abrogeant le règlement 683/2008, a été adopté en 2013 en vue d’établir les règles relatives à la mise en œuvre et à l’exploitation du programme pour la période 2014-2020. Le règlement a doté le programme d’un budget de 7Md€ sur la période.

Le déploiement de deux satellites expérimentaux (GIOVE-A et B) en 2005 et 2008 a permis de tester en orbite des composants critiques du système. Deux premiers satellites opérationnels ont ensuite été lancés le 21 octobre 2011. Par ailleurs, EGNOS, précurseur de Galileo à couverture régionale et élément important de la modernisation de la gestion du trafic aérien en Europe, a été mis en service le 1er octobre 2009 et certifié le 12 juillet 2010 en tant que prestataire de service de navigation aérienne, conformément aux standards « ciel unique ».

A ce jour, 18 satellites opérationnels de la constellation Galileo ont été lancés par les lanceurs Soyouz et Ariane 5 depuis le Centre spatial guyanais. La fabrication de 30 satellites de la phase de déploiement et d’exploitation (FOC/full operational capability) a été confiée à l’industriel allemand OHB

L’approvisionnement de la phase de déploiement et d’exploitation (FOC/full operational capacity) s’est fait sur la base de l’appel d’offre lancé le 1er juillet 2008 pour les six lots suivants : satellites, lanceurs, conception et ingénierie du système, infrastructure de contrôle au sol (contrôle des satellites), infrastructure de mission sol (fourniture des signaux et messages de navigation), de mission opération (deux centres de contrôle des satellites situés en Allemagne et en Italie).

L’initiative Copernicus

L’initiative Copernicus, anciennement GMES (Global Monitoring for Environment and Security), de surveillance mondiale de l’environnement et de la sécurité a été lancée en 1998. Elle a pour objectif de mettre en place six services thématiques liés à l’information environnementale : la surveillance des territoires, des océans, de l’atmosphère, du climat, la gestion des urgences et l’appui à la sécurité. Depuis septembre 2008, cinq de ces services sont en phase pré-opérationnelle. Outre cette composante "services", Copernicus comporte un segment spatial (les satellites "Sentinelles") et une composante "in-situ".

Le financement communautaire de Copernicus a été assuré pour la période 2007-2013 par la Commission européenne à hauteur de 1,2 Md €. Un financement additionnel de 107 Md€ a été mis en place dans le cadre du dispositif GIO (GMES Iinitial Operations) couvrant la période 2011-2013. Ce dispositif, adopté dans le règlement 911/2010 du 16 juin 2010, a constitué la première base légale de l’Union européenne identifiant une ligne de financement spécifique à GMES. De son côté, l’ESA finance la majeure partie du développement des "Sentinelles".

Le règlement 377/2014 du 3 avril 2014 a abrogé le règlement 911/2010, établissant le programme Copernicus et fixant les règles applicables à sa mise en œuvre. Le règlement a doté le programme d’un budget de 4,3Md€ pour la période 2014-2020.

Mise à jour : 13.12.17